Les forces de sécurité russes ont récemment opéré une intéressante saisie. À Moscou, elles ont procédé à l’arrestation de ressortissants chinois envoyant du matériel militaire russe hors du pays, afin de le reproduire en version contrefaite, avec des matériaux de piètre qualité. Le but final de la manœuvre ? Revendre les copies bas de gamme… à la Russie elle-même, relève Newsweek, sur des informations du quotidien russe Izvestia.
Le cas n’est pas isolé. Quelques mois plus tôt, un étudiant chinois avait ainsi été interpellé dans un dortoir universitaire, en possession de plaques balistiques, de douilles et de matériel de combat. Il affirmait avoir acquis ces objets via des petites annonces en ligne, sans lien apparent avec un réseau structuré.
Un marché chinois moins cher… et moins fiable
Les douanes ont identifié plusieurs affaires impliquant notamment des gilets pare-balles et des uniformes militaires russes, reproduits avec des matériaux de qualité inférieure. Cette pratique de rétro-ingénierie alimente les accusations occidentales selon lesquels la Chine et la Russie entretiennent un marché du double-usage (c’est-à-dire à la fois civil et militaire) difficile à délimiter, sur des biens tels que les composants électroniques, les équipements de précision, ou les textiles militaires.
Ukraine – Russie : les avions militaires de la guerre
Pour Ruslan Shapiev, directeur général du sous-traitant de défense russe RUSARM interrogé par Izvestia, ces affaires traduisent une hausse de la demande en contrefaçons militaires, alimentée par les écarts de prix entre marchés. « Le matériel chinois est moins cher, mais nettement moins fiable, notamment les gilets pare-balles ».
Ruslan Shapiev va même plus loin : selon lui, des équipements militaires chinois bon marché auraient été retrouvés entre les mains de soldats ukrainiens, suggérant une circulation transversale vers les deux camps.
Un commerce bilatéral bondissant… et opaque
Les relations entre Chine et Russie sont scrutées à la loupe depuis le début de la guerre en Ukraine. Alors que Volodymyr Zelensky accuse la Chine de « fournir des armes » à la Russie et de participer à la « production de certaines armes » sur le territoire russe, Pékin se défend de toute stratégie militaire commune avec Moscou.
« La Chine n’a jamais fourni d’armes létales à aucune partie au conflit et contrôle strictement les articles à double usage », a tonné mi-avril Lin Jian, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, fustigeant des « accusations arbitraires » et la « manipulation politique » de Kiev.
Pourtant les soupçons demeurent, encouragés par la capture récente de deux soldats chinois par Kiev, et la proximité économique grandissante de la Russie avec Pékin. Ainsi, rappelions-nous encore en février, les échanges commerciaux entre la Russie et la Chine ont bondi depuis 2022, et atteint en 2024 le chiffre record de 245 milliards de dollars (221,78 milliards d’euros), selon Le Monde. Plus du double de 2018.
Une alliance économique qui s’applique aux armes ? Sans doute, répondent certains observateurs, quand la Chine hausse les épaules et joue la neutralité. Interrogé par la presse internationale, Guo Jiakun, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, a ainsi réaffirmé en mars la position officielle de Pékin : « La Chine soutient tous les efforts en faveur d’un cessez-le-feu. Le dialogue est la seule voie vers la paix. »