Par
Nicolas Zaugra
Publié le
13 oct. 2025 à 17h03
EXCLUSIF. En novembre 2023 ouvrait la LDLC Arena, l’immense salle de concerts, de spectacles et de grands événements sportifs à Décines-Charpieu dans la métropole de Lyon face au Groupama Stadium.
Près de deux ans après, Alexandre Aulas, patron d’Holnest – la holding de la famille Aulas actionnaire majoritaire de la salle – fait le bilan.
Le chef d’entreprise de 39 ans évoque sans tabou tous les sujets : les prochains concerts, la place du sport, les JO 2030, les projets de développement, la concurrence lyonnaise, son père Jean-Michel Aulas, candidat aux municipales à Lyon. Ses réponses.
« En avance de 9 à 12 mois sur nos objectifs »
Actu : Nous sommes presque deux ans après l’ouverture de la LDLC Arena. Quel bilan en tirez-vous ?
Alexandre Aulas : C’est un bilan qui est positif puisque aujourd’hui, on voit qu’on arrive à prendre progressivement notre place. On voit aussi qu’on crée un marché qui est nouveau sur les grands artistes internationaux. Donc, on sent quand même que le marché lyonnais s’est élargi. Sur les chiffres, on est à neuf à douze mois d’avance sur nos objectifs initiaux. Ce qui démontre l’intérêt pour la salle, le fait qu’elle réponde aujourd’hui à des enjeux de marché qui étaient de 100-110 manifestations par an.
Combien d’événements accueillez-vous chaque année ?
AA : Notre objectif à long terme est d’environ 120 manifestations par an, dont 70 % de concerts. Nous organisons également 12 à 15 matchs de LDLC ASVEL, des rencontres sportives nationales ou internationales (handball, basket, équipe de France), ainsi que de grands séminaires d’entreprises réunissant plusieurs milliers de personnes.

Le concert de Justin Timberlake à la LDLC Arena de Décines-Charpieu. (©Nicolas Zaugra/ actu Lyon)La folie Indochine, Lady Gaga et Katy Perry très attendues
Indochine donne dix concerts de sa tournée Arena ici à la LDLC Arena, dont six en octobre. C’est assez inédit. Pourquoi ?
AA : Indochine, c’est un groupe mythique français qui est très rassembleur. Ils sont très populaires. On va faire sur cette année dix dates, c’est le même nombre qu’à Paris. Précédemment, on avait fait le record d’affluence au Groupama Stadium avec le concert d’Indochine en cumulant 73 000 personnes. C’est à peu près ce qu’on va faire sur les six dates qui arrivent.
Il y a aussi des fans absolus qui voient plusieurs concerts. Le groupe change sa playlist à chaque date.
Vous recevrez aussi Lady Gaga et Katy Perry cet automne. Que pouvez-vous en dire ?
AA : C’est un immense honneur. Lady Gaga n’était pas revenue à Lyon depuis plus de quinze ans. Elle a choisi la LDLC Arena pour la qualité de son acoustique et de ses installations, qui permettent une expérience immersive. Sa tournée européenne compte 23 dates, dont seulement deux à Lyon et quatre à Paris — c’est exceptionnel. Katy Perry sera également là pour deux soirs.
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Peut-on dire que Lyon s’impose désormais comme la deuxième grande scène musicale en France face à Paris ?
AA : Oui, clairement. Paris reste incontournable, mais Lyon est désormais la seconde étape naturelle pour les grandes tournées internationales. Notre objectif est que, demain, venir à Lyon devienne une évidence pour tous les artistes majeurs — à l’image de Manchester vis-à-vis de Londres.

Alexandre Aulas devant la LDLC Arena, début octobre 2025. (©Nicolas Zaugra/ actu Lyon)« D’autres annonces » de concerts au Groupama Stadium
Travaillez-vous en coordination avec le Groupama Stadium pour l’accueil des artistes ?
AA : Depuis le rachat de la LDLC Arena par le groupe OL, nous sommes prestataires de service pour l’Olympique Lyonnais et développons l’activité concert du Groupama Stadium pour les trois prochaines années. Nous restons donc très liés à l’OL, avec la volonté de prolonger cette collaboration à long terme. Nous avons un rôle d’apporteur d’affaires et de partenaire opérationnel. Nous avons internalisé la billetterie, avec une équipe de cinq personnes qui travaillent directement avec les producteurs. C’est une spécificité de la LDLC Arena : nous maîtrisons toute la chaîne, de la mise en vente jusqu’à l’accueil du public.
Quelles sont les prochaines dates ? L’effet Taylor Swift a-t-il vraiment profité au stade ? Le nombre de concerts semble réduit au stade ces derniers temps…
AA : Deux grands concerts sont déjà annoncés : Linkin Park, déjà sold out, et Iron Maiden, dont la commercialisation se déroule très bien. D’autres annonces suivront prochainement. Le Groupama Stadium reste une infrastructure majeure du paysage français. Les producteurs veulent venir. À nous de continuer à travailler avec eux, main dans la main avec l’Olympique lyonnais, pour maintenir un haut niveau d’événements.
Un concert d’Oasis a été évoqué récemment dans la presse…
AA : C’est pour l’instant une rumeur sans fondement. Le projet n’est pas à l’étude. Oasis a une jauge trop importante pour le Groupama Stadium à ce stade. Peut-être que cela évoluera un jour, mais ce n’est pas d’actualité.

Taylor Swift, lors de son deuxième concert au Groupama Stadium de Lyon. (©Pierre Chemel/ actu Lyon)
Et David Guetta ? On le voit remplir des stades en France, Marseille notamment et prochainement trois fois le Stade de France…
AA : David Guetta est un artiste incontournable et universel. Nous serions ravis de l’accueillir au Groupama Stadium. C’est un projet que nous aimerions concrétiser, car il touche un très large public.
La nouvelle salle Fiducial Astéria bientôt inaugurée
Vous lancez également la salle Fiducial Astéria, voisine de la LDLC Arena. Où en est le projet ?
AA : Le chantier avance très bien. Astéria est une salle complémentaire au marché lyonnais, avec une jauge de 1 500 places assises ou 3 500 debout. Elle s’adresse aux artistes en pleine ascension, entre le Transbordeur et la LDLC Arena.
Nous voulons créer une expérience immersive : lumière, son, scénographie… Même le tunnel d’accès deviendra un espace d’émotion grâce à un partenariat avec une société de design lumière. L’idée est de faire de chaque venue un moment unique, au-delà du simple concert.
L’inauguration est prévue le 30 octobre avec une soirée électro autour du label Ed Banger (à l’origine de Daft Punk, Justice, etc.). Seront présents Busy P, Tatiana James et Kungs – une première collaboration entre ces artistes. Nous aurons ensuite une programmation mêlant musique, humour et événements privés.

Alexandre Aulas lors d’une interview avec actu Lyon à la LDLC Arena. (©Pierre Chemel/ actu Lyon)Faire de Lyon une « place forte européenne du e-sport »
Vous avez récemment accueilli plusieurs événements e-sport comme la finale de Rocket League ou Fortnite. Est-ce que ce secteur représente un nouveau relais de croissance pour la LDLC Arena ?
AA : Oui, clairement. Le marché du e-sport est en forte expansion, estimé aujourd’hui à près de 2 milliards d’euros au niveau mondial, et il pourrait atteindre 8 milliards d’ici 2032. C’est donc un secteur qui nous passionne et qui a un réel potentiel. Nous avons déjà prouvé que, même sans aide publique, nous pouvions accueillir deux des plus grands événements e-sport de l’année. Mais si nous travaillons ensemble, la région peut devenir une place forte européenne du e-sport.
De nouveaux sports et les JO-2030 dans le viseur
En dehors du tennis et du basket, quels nouveaux sports aimeriez-vous développer ?
AA : Nous réfléchissons à des disciplines émergentes, comme les fléchettes, en plein essor. Nous restons aussi en dialogue permanent avec les fédérations de sports indoor.
Les JO 2030 se préparent dans les Alpes. Quel rôle peut jouer Lyon avec son stade et la LDLC Arena ?
AA : Lyon doit être au cœur du dispositif olympique. Même si les JO sont naturellement tournés vers les Alpes et Nice, Lyon reste la capitale de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Nous serions ravis de participer à l’aventure, que ce soit via le Groupama Stadium ou la LDLC Arena.
Pour l’instant, nous sommes considérés comme un plan B pour certaines disciplines, comme le hockey sur glace, mais rien n’est figé. Nous restons disponibles et constructifs : l’important est que tout le monde travaille dans le même sens.
La concurrence avec la Halle Tony Garnier
Depuis votre arrivée, le marché lyonnais a beaucoup évolué. Certains évoquent un impact sur la Halle Tony Garnier, dont l’activité a baissé en 2024. Quel est votre regard ?
AA : Je ne connais pas en détail l’exploitation de la Halle Tony Garnier, mais 111 événements par an, c’est une belle performance (leur bilan 2024, NDLR). L’activité culturelle n’est jamais linéaire : elle dépend des tournées, des sorties d’albums, des cycles de production.
Notre arrivée n’a pas retiré d’activité : elle en a créé de nouvelle. Nous avons réalisé 75 dates la première année. Même si la Halle en a fait 20 de moins, il reste donc plus de 50 événements supplémentaires sur le territoire par rapport à avant. C’est donc un marché globalement en croissance, pas un jeu à somme nulle.
Certains élus affirment pourtant que votre succès fragilise une salle municipale historique…
AA : C’est inexact. Le projet de la LDLC Arena a été mené en concertation totale avec la Métropole de Lyon, contrairement au stade à l’époque, qui avait suscité de nombreux recours, tous gagnés. Pour l’Arena, il n’y en a eu aucun.
Notre objectif n’est pas d’affaiblir qui que ce soit, mais de renforcer l’attractivité culturelle de toute la métropole. Je parle souvent de Manchester : cette ville a su devenir une capitale européenne de la culture grâce à la coopération entre ses acteurs publics et privés. C’est exactement ce que je souhaite pour Lyon.
Candidat pour exploiter l’Astroballe de Villeurbanne
Vous avez évoqué tout à l’heure l’Astroballe, avec l’idée de l’agrandir, de la rénover et d’en confier l’exploitation à un acteur privé. Avez-vous officiellement candidaté à l’appel d’offres ?
AA : Oui, tout à fait. Je peux vous le confirmer, nous avons candidaté. Le processus vient tout juste de commencer, donc nous n’avons pas encore de retour à ce stade.
Quelle est votre vision pour le développement de l’Astroballe ?
AA : Je ne peux pas entrer dans le détail, car nous sommes tenus par des clauses de confidentialité liées à l’appel d’offres. Mais ce que je peux dire, c’est que l’ASVEL fera bien sûr partie du projet. L’idée est de garder l’Astroballe centrée sur le basket, tout en l’ouvrant aux concerts et spectacles, comme l’a d’ailleurs souhaité le maire de Villeurbanne.

L’ex-joueur français de basket-ball Tony Parker lors de la présentation de la LDLC Arena à Décines Charpieu, près de Lyon, le 6 septembre 2022. (©AFP/OLIVIER CHASSIGNOLE)
Justement, Tony Parker reste-t-il impliqué dans le projet ? Et qu’en est-il d’une éventuelle participation plus importante de votre groupe ?
AA : Ce qui compte pour nous, c’est que l’ASVEL continue d’aller bien et reste un acteur fédérateur du basket sur la métropole. Nous avons de très bonnes relations avec Tony Parker et Gaëtan Muller. Pour ce qui est d’éventuelles évolutions capitalistiques, il n’y a rien de concret aujourd’hui, mais nous ne fermons pas la porte à des discussions futures.
« Je suis fier de mon père », « pas de volonté de m’impliquer » dans sa campagne
Vous êtes à la tête de la holding familiale à 39 ans. Cela représente quoi de porter le nom Aulas à Lyon ?
AA : C’est à la fois un avantage et un poids. Le nom résonne dans l’inconscient collectif comme quelque chose de positif, mais cela implique aussi de transformer cette réputation en succès durable. Il y a beaucoup de pression, mais aussi une forte envie de faire les choses à ma façon, avec des ambitions personnelles et familiales. Mon père et moi avons des méthodes différentes, mais l’objectif reste de faire grandir nos projets et infrastructures à Lyon.
Votre père a officialisé sa candidature à la mairie de Lyon. Quel rôle allez-vous jouer à ses côtés ? Vous étiez par exemple à son premier meeting…
AA : Je suis évidemment fier de mon père, qui souhaite rendre à la ville ce que les Lyonnais lui ont donné. Cependant, je n’ai pas vocation à m’impliquer politiquement. Si j’étais présent à son premier meeting, c’était en tant que fils, pour le soutenir d’un point de vue familial. Mon parcours reste centré sur l’entrepreneuriat et le développement des salles et projets culturels.

Jean-Michel Aulas est désormais candidat aux municipales 2026 à Lyon. (©Anthony Soudani / actu Lyon)
Certains écologistes et leurs alliés de gauche s’interrogent sur un potentiel conflit d’intérêts entre la mairie et vos activités. Que leur répondez-vous ?
AA : Il est légitime de se poser des questions, mais à ce stade, il s’agit de fiction. Nous restons concentrés sur nos projets d’exploitation, et nous ne pouvons pas commenter des situations hypothétiques.
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