Par

Augustin Delaporte

Publié le

13 oct. 2025 à 18h16

Deux ans jour pour jour après « Paris à 50 °C », l’exercice inédit de préparation aux futures températures extrêmes du 13 octobre 2023, la capitale menait, à l’occasion de la journée nationale de la résilience, un second exercice de crise de grande ampleur, lundi 13 octobre 2025.
Ce dernier, baptisé « Paris Inondé », projetait cette fois « ses joueurs » au 13 mars 2026, dans un Paris vivant une crue accélérée de la Seine, aggravée par un épisode orageux violent et faisant craindre un dépassement du niveau historique de 8,62 mètres. Une journée de catastrophe fictive, dont le scénario a été créé de toutes pièces par les équipes de la société Crisotech, afin de tester la coordination d’un maximum de services de la Ville. Immersion.

Tous les services de la Ville concernés sans exception

« Depuis deux mois, la capitale est éprouvée. Quartiers entiers évacués, transports à l’arrêt, services publics en mode dégradé, réseau électrique sous tension… Près de 300 00 Parisiens ont déjà quitté leur domicile sur recommandation de la préfecture de Police. Selon les prévisions, ce chiffre pourrait doubler dans les prochains jours. Mais avec des routes devenues impraticables, les habitants pourraient rester bloqués alors que la montée des eaux semble inéluctable… »

Réunies dans la cellule de crise centrale (CCC) de la Ville Paris, située dans la caserne Napoléon, l’ensemble des directions des services de la municipalité assistent à la diffusion d’une édition spéciale de France 7 tv (une fausse chaîne). Il est 8 h 30 et l’exercice de crise vient de débuter. Chef de projet pour Crisotech, Ziad Touat, rappelle un élément déterminant : « Tous les joueurs découvrent le scénario en temps réel. »

Le premier journal télévisé (fictif) de la journée vient de se terminer et le tour de table a débuté au sein de la cellule de crise centrale de la Ville.
Le premier journal télévisé (fictif) de la journée vient de se terminer et le tour de table a débuté au sein de la cellule de crise centrale de la Ville. (©AD / actu Paris)

Une fois le décor planté, l’adjointe à la Maire de Paris chargée de la résilience, Pénélope Komitès, lance un tour de table au cours duquel chaque direction communique un bilan afin que tous aient le même niveau d’informations.

Peu avant 8 h 45, la direction de la communication et de l’information ferme la marche, avant que l’adjointe ne s’assure que tout le monde ait bien en mémoire les priorités de la Ville : assurer une continuité minimale des services et anticiper la dégradation de la situation dans le but de protéger les services et les agents.

Un document partagé aux différentes directions plante le décor et spécifie, entre autres, que la cellule de crise centrale (CCC) de la Ville est activée depuis trois mois dans le scénario.
Un document partagé aux différentes directions plante le décor et spécifie, entre autres, que la cellule de crise centrale (CCC) de la Ville est activée depuis trois mois dans le scénario. (©AD / actu Paris)

Votre région, votre actu !

Recevez chaque jour les infos qui comptent pour vous.

S’incrire

Louis Bernard, fondateur de Crisotech, donne du relief à ce qui se joue sous nos yeux : « Ce qui est important sur cette séquence, c’est de bien comprendre que toutes les directions sont présentes parce qu’une crise majeure affecte absolument tout le monde, il y a un effet de domino. On pense aux écoles, notamment, mais les musées, les espaces verts, les cimetières sont également concernés. »

Sensibiliser la population aux risques

En parallèle, tous les partenaires se mettent en branle. À un jet de pierre de la place Baudoyer, un centre d’accueil des impliqués (personnes sinistrées qui ne sont pas blessées) s’est installé dans une tente de la Protection Civile Paris Seine, montée au pied des marches de l’église Saint-Gervais.

À l’intérieur, des secouristes récupèrent les informations des sinistrés (identité, besoins et possibilité d’hébergement). Les familles sont alors jouées par des participants bénévoles, composés par une classe de CM 2 (de l’école élémentaire Pelloutier, située sur l’île Saint-Louis), du personnel encadrant, des habitants de l’immeuble et des volontaires de Paris.

Devant les caméras des journalistes, les secouristes de la Croix-Rouge reçoivent des participants jouant le rôle de familles évacuées de l'immeuble.
Devant les caméras des journalistes, les secouristes de la Croix-Rouge reçoivent des participants jouant le rôle de familles évacuées de l’immeuble. (©AD / actu Paris)

« Comment tu t’appelles ? Tu as froid ? ». Malgré la nuée de journalistes, les secouristes singent la réalité. « L’un des objectifs majeurs de ce type d’exercice, c’est d’acculturer la population au risque. Les Parisiens sont très peu sensibilisés aux catastrophes et, par conséquent, aux gestes à adopter », commente Pénélope Komitès.

L'adjointe chargée de la résilience accompagne une poignée d'enfants participant à l'exercice.
L’adjointe chargée de la résilience accompagne une poignée d’enfants participant à l’exercice. (©AD / actu Paris)

En amont de cette séquence, un « tri » des personnes à évacuer de l’immeuble d’habitation du 109 rue de l’Hôtel de Ville a été réalisé, entre ceux à réorienter vers le centre, ceux à prendre en charge en ambulance et ceux à prendre en charge directement sur place.

Un immeuble d’habitation évacué par le GRIMP

Pour l’occasion, une habitante avait « prêté son appartement », ce qui a permis au groupe d’intervention en milieux périlleux (GRIMP) des pompiers de Paris de faire descendre en rappel une civière avec une joueuse mimant une personne à mobilité réduite coincée dans l’immeuble à évacuer, mais aussi d’évacuer par vagues successives des familles grâce à un bras élévateur articulé.

Des enfants évacués du 109 rue de l'Hôtel de Ville par bras élévateur articulé.
Des enfants évacués du 109 rue de l’Hôtel de Ville par bras élévateur articulé. (©AD / actu Paris)

« Il faut garder en tête qu’on simule l’évacuation de personnes qui n’ont pas eu la possibilité de partir au moment de l’ordre du préfet de police, notamment parce qu’ils n’auraient pas de familles ou d’endroits ou aller. Celle-ci aurait débuté dès l’ordre d’évacuation (donc bien avant que le niveau de l’eau soit aussi haut que le 13 mars 2026) », resitue Pénélope Komitès.

Le GRIMP prépare son intervention.
Le GRIMP prépare son intervention. (©AD / actu Paris)

« On a travaillé sur deux scénarios. Un premier où le niveau serait autour des 7 mètres et donc avec des voies traficables, où l’on évacue les gens avec un bras élévateur. Le second avec un niveau de 8,62 mètres, dans lequel on se sert d’embarcations », précise pour sa part le lieutenant-colonel, Nicolas Belain.

Des objectifs à court et long terme

Chronométré, le déroulé prévoyait aussi un passage des participants par les stands présentant les dispositifs mobilisables en cas d’inondations, comme les passerelles piétonnes surélevées, les batardeaux, etc.

En fin de matinée, l’Académie du climat avait, elle, été transformée en centre d’accueil et de regroupement de la population (CARE). Un repas y a été proposé, sous forme de rations prises dans les stocks constitués avant la crue.

Les salles de l'Académie du climat transformées à l'occasion de
Les salles de l’Académie du climat transformées à l’occasion de « Paris Inondé ». (©AD / actu Paris)

Dans l’après-midi, les enjeux liés à la décrue, au retour à domicile, à la reconstruction et au retour à la normale ont été abordés. Avant un premier retour d’expérience (RETEX) « à chaud » avec l’ensemble des participants.

Le rôle d'un volontaire pour
Le rôle d’un volontaire pour « Paris Inondé ». (©AD / actu Paris)

Comme dans le cadre de « Paris à 50 °C », un second RETEX à froid aura ensuite lieu quelques semaines après l’événement, via des questionnaires adressés aux participants. Les enseignements tirés de « Paris Inondé » feront, enfin, l’objet d’une publication dédiée qui servira aux futures mesures prises par la Ville.

Personnalisez votre actualité en ajoutant vos villes et médias en favori avec Mon Actu.