Par

Laurène Fertin

Publié le

14 oct. 2025 à 6h32

Ne pas céder à la panique, utiliser les bons gestes et préserver son intégrité physique. C’est, en résumé, ce qu’essaie de transmettre Hervé, professeur de judo et intervenant auprès de personnes en situation de handicap. Tous les lundi et jeudi, dans le gymnase du Sdis (Service départemental d’incendie et de secours) à Rennes, il anime une séance d’autodéfense à celles et ceux qui, compte tenu de leur handicap, se sentent « plus vulnérables » et cherchent des clefs pour mieux se protéger.

Prendre le temps

« En soi, qu’il y ait un handicap ou non », expose Hervé, « ça ne change pas grand-chose. La seule différence, c’est qu’on va prendre le temps. » Le temps d’expliquer les techniques de riposte, les gestes à adopter, les attitudes à maintenir lorsque l’on se trouve dans l’espace public et que l’on peut se faire agresser.

Car les personnes en situation de handicap sont, comme le résume Georgette Péniguel, coprésidente du Handisport Rennes Club, « des proies plus faciles » que les personnes valides dans l’espace public. À l’initiative de cette démarche, Georgette est, comme la majorité des participants à ces séances d’autodéfense, malvoyante.

On peut être exposé à des agressions. Il y a quelques années, lorsque je voyais difficilement mais toujours plus que maintenant, un homme m’a mis la main aux fesses. J’ai tellement été surprise, que je me suis retournée, j’ai hurlé et je lui ai mis une gifle.

Georgette Péniguel
Coprésidente du Handisport Rennes Club

« J’y pensais depuis un moment »

Georgette est coprésidente, depuis 2016, du Handisport Rennes Club (HRC). Les séances d’autodéfense ont été lancées lors de cette rentrée 2025-2026, avec, au total, dix cours dispensés par Hervé Gianesello. « J’y pensais depuis un moment », sourit Georgette, « et j’ai vu que cela existait déjà dans d’autres villes. Je me suis dis : ‘pourquoi pas chez nous ?' ». Georgette rencontre alors Hervé lors d’un événement animé entre le Comité d’Ille-et-Vilaine de Judo et le HRC. Les séances se sont ensuite lancées.

Les conseils

La gifle est d’ailleurs au programme des séances quand celle-ci se révèle efficace lorsqu’il s’agit de faire fuir l’agresseur.

Lors de ce cours matinal, lundi 13 octobre, Lisa, 21 ans, s’y essaie avec le sourire et un brin de timidité. « Je liste dans ma tête tout ce que j’ai appris : reprendre mes appuis pour ne pas perdre l’équilibre, et, avec ma main libre [celle qui n’est pas immobilisée par l’agresseur, N.D.L.R], donner une gifle et appeler à l’aide », énumère la jeune femme, qui tamponne doucement les joues d’Hervé pour éviter de lui faire mal.

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Photo prise le 13/10/2025
Lisa (pantalon bleu) s’entraîne avec Marie-Paule. (© Laurène Fertin / actu Rennes)

Parfois, c’est le handicap qui peut être utile dans un moment de tension : frapper avec sa canne, utiliser son fauteuil roulant. C’est le cas de Lucien, 58 ans, qui est atteint d’une neurofibromatose – une maladie génétique rare affectant essentiellement le système nerveux et la peau.

L’astuce : bloquer et rouler sur son agresseur (venant de l’arrière) pour le neutraliser. « Déjà, il y a un effet de surprise », rit Lucien, « mais surtout, avec un fauteuil électrique qui pèse 300 kg, ça peut faire très très mal. »

« Une question de confiance »

Alors, oui, toutes ces techniques permettent de se protéger en cas d’agression. Mais il ne s’agit pas d’avoir peur à chaque coin de rue… « Je ne pense pas à me faire agresser en permanence », raconte Michèle, atteinte d’une paralysie obstétricale du plexus brachial (POPB), qui va bientôt souffler ses 70 bougies. « Mais l’évolution sociétale fait qu’on doit rester vigilant. »

Et s’il y a bien une façon de pouvoir faire face à une agression, c’est aussi sans doute celle de (re)prendre confiance en soi dans l’espace public.

Par exemple, quand Lisa a entamé les séances, son regard était toujours porté sur le sol. Maintenant, elle a la tête bien droite, le regard situé devant elle. L’autodéfense, c’est aussi cela : l’attitude, la posture.

Hervé Gianesello
Intervenant

Car le message renvoyé est aussi celui-ci : « Ce n’est pas parce que nous avons un handicap que nous ne pouvons pas marcher dans la rue, comme tout le monde, sans se faire agresser », souligne Georgette.

Les cours d’autodéfense vous intéresse ? Vous pouvez contacter le Handisport Rennes Club au 02 99 51 33 54 ou via le mail [email protected]

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