Fait rare dans le paysage médiatique américain : ce mardi 14 octobre, des organes de presse et chaînes télévisées de tous bords politiques ont annoncé, quasi unanimement, leur opposition à la nouvelle politique du ministère de la Défense américain. Celui-ci voudrait leur imposer de s’engager à ne pas obtenir et publier d’informations non autorisées, et restreindre leur accès à certaines zones du Pentagone. Officiellement, tout représentant des médias qui n’aurait pas signé le document ce mardi avant 17 heures aura vingt-quatre heures pour rendre son accréditation et quitter les locaux du Pentagone.

Parmi les opposants à ces mesures, The Washington Post, The New York Times, mais aussi The Atlantic, The Wall Street Journal, la radio nationale NPR, l’agence de presse Reuters ou encore The Guardian, énumère The New York Times. Les publications spécialisées Task & Purpose et Breaking Defense sont également concernées, et même des médias traditionnellement acquis au gouvernement du président américain Donald Trump, à l’instar de la chaîne Newsmax.

Une opposition transpartisane

“Nous nous opposons fondamentalement aux restrictions que le gouvernement Trump impose aux journalistes qui couvrent les questions de défense et de sécurité nationale”, a annoncé Jeffrey Goldberg, directeur de la rédaction de The Atlantic, lundi. Comme Matt Murray, le directeur de la rédaction du Washington Post, il estime que les restrictions prévues sont contraires au premier amendement de la Constitution américaine, qui protège la liberté de la presse.

Pour Richard Stevenson, chef du bureau du New York Times à Washington, cette politique “limite la manière dont les journalistes peuvent rendre compte de l’armée américaine, qui est financée à hauteur de près de 1 000 milliards de dollars par an par les contribuables”. Or, selon lui, “le public a le droit de savoir comment fonctionnent l’État fédéral et l’armée”, rapporte The Washington Post.

Même son de cloche du côté de CNN. La chaîne annonce d’ailleurs que même “le média Maga (Make America great again) Newsmax refuse de signer les règles d’accès à la presse” définies par le Pentagone. Fin septembre, Jonathan Turley, collaborateur de la chaîne Fox News, réputée pour sa proximité idéologique avec Donald Trump, avait déjà mis en garde contre les potentielles conséquences “dévastatrices” de cette mesure pour les journalistes accrédités auprès du Pentagone.

La crainte d’une presse muselée

Et pour cause : s’il entre en vigueur, ce document empêchera les journalistes d’exercer librement leur profession : des sanctions sont prévues pour ceux qui divulgueraient des informations sans autorisation préalable du Pentagone.

Ces restrictions controversées s’inscrivent dans une vaste offensive contre les médias, rappelle The Guardian. Fin septembre, Trump avait émis le souhait de sanctionner des chaînes de télévision pour leur “couverture négative” : “97 % [des grandes chaînes américaines] sont contre moi”, avait-il déploré.

Pour l’heure, malgré la vague d’opposition, le Pentagone ne s’est pas exprimé sur un possible retrait des restrictions.