Emma Chenu, après quinze années de fermeture, vous assumez avec Astrid Toussaint la coprésidence du Planning Familial 54. Pourquoi le réactiver ?
« Les droits des femmes sont attaqués de toute part, dans l’Amérique de Trump bien sûr, mais même en Europe. La vigilance est donc d’une absolue nécessité. Il y a urgence. Des militantes féministes des années 70-80 ont alors décidé de réinstaurer un Planning Familial à Nancy qui fonctionne depuis juin dernier. »
Et porté par qui aujourd’hui ?
« À ce jour, nous sommes 27 bénévoles, avec une nouvelle présidence, où les jeunes générations trouvent aussi leur place. Mais c’est encore en structuration, parce qu’il n’est pas question de tenir une permanence sans une formation très solide. Or ces formations, ce sont nous qui les finançons. … Elles sont dispensées au sein d’antennes professionnalisées du Planning Familial, dont la spécificité est l’approche inclusive des genres et laïque, précision fondamentale. »
Que proposez-vous lors de ces permanences ?
« Pour l’instant, notre principale action, c’est d’orienter les personnes en quête d’information sur leur santé sexuelle, ou qui subissent des violences (sexuelles et autres), ou qui s’interrogent sur l’IVG, vers les différentes associations et organismes ad hoc. De sorte qu’elles puissent accéder à leurs droits. À terme, quand nous serons parfaitement prêtes, nous pourrons nous permettre de leur fournir cette information directement. Et les besoins en la matière sont aigus. »
Ces informations ne sont-elles pas déjà accessibles dans les diverses structures publiques ?
« Sincèrement, je défendrai le service public jusqu’à ma mort. Mais le fait est qu’on n’y est pas toujours très bien accueilli, notamment pour l’IVG. Ne serait-ce que par manque de moyens. C’est pourquoi, si nécessaire, on n’hésite pas à renvoyer les personnes vers des associations ou structures semi-privées qui n’ont aucun a priori sur le genre ou l’orientation sexuelle. Des sages-femmes, par exemple. »
Ce qui confirme votre approche militante…
« Absolument. Et plus inclusif. On accueille tout le monde, c’est anonymisé (on ne tient aucune fiche) et inconditionnel (ce qui inclut les sans-papiers). Et gratuit ! Et on y considère les personnes accueillies dans leur globalité et toute leur complexité. »
Prendre une adhésion implique-t-il nécessairement qu’on soit bénévole ?
« Non, pas du tout. En revanche, ça implique qu’on partage nos valeurs. Et plus on aura d’adhésions (20 € à l’année), plus on pèsera lourd, ce qui nous aidera aussi à trouver des subventions. »
À quel rythme tenez-vous ces permanences ?
« Aujourd’hui, on a 3 permanences de 2 heures par semaine, dans des locaux mis généreusement à disposition par l’UL-CGT. Mais c’est trop peu. Et on est appelées à monter en charge. Seulement, on ne peut pas s’appeler Planning Familial sur un claquement de doigts, on doit faire les choses parfaitement. Or la charge administrative est colossale. Il nous faudrait des fonds pour pouvoir salarier quelqu’un qui assume cette tâche. »
Quels sont vos projets à court terme ?
« Lancer, dès la rentrée 2026, des interventions de prévention et promotion en contraception à des groupes de femmes, en partenariat avec des associations sociales et la future Maison des Femmes. Par ailleurs, nous avons reçu des demandes de plusieurs établissements scolaires de la région. Malheureusement, nos fonds ne sont pas suffisants actuellement pour former beaucoup de bénévoles donc cela risque de commencer doucement. Et ce, malgré l’urgence. »