Le commandant de la sécurité des frontières au ministère de l’Intérieur britannique, Martin Hewitt, a notamment blâmé l’«instabilité politique» de la France.
Les effets de l’accord franco-britannique sur les traversées de la Manche sont pour l’heure invisibles. Martin Hewitt, commandant de la sécurité des frontières et dépendant du ministère de l’Intérieur britannique, a jugé «frustrante» l’incapacité de la France à lutter contre les migrants embarquant à bord de canots pneumatiques pour rejoindre le Royaume-Uni, ont rapporté plusieurs médias britanniques ce jeudi 16 octobre.
Le patron des gardes-frontières britanniques était interrogé ce jeudi par la commission des Affaires intérieures, dans le cadre de la lutte contre le crime organisé et contre l’immigration irrégulière. Une audition particulièrement attendue, alors que le nombre de migrants ayant traversé la Manche depuis le 1er janvier a augmenté de 21% par rapport à la même période l’année dernière, s’établissant à 32.000 individus.
Durant l’été, Paris et Londres ont également établi un accord qui prévoit le retour en France de migrants arrivés à bord de canots au Royaume-Uni, en échange de l’envoi outre-Manche de migrants se trouvant en France. Enfin, en juin dernier, un responsable du ministère de l’Intérieur britannique avait assuré au Guardian que les autorités françaises s’étaient engagées à intercepter les «small boats » dans lesquels embarquent les migrants cherchant à traverser la Manche, même s’ils étaient déjà en mer. «Les Français ont déclaré qu’ils interviendraient pour s’attaquer aux canots des passeurs qui opèrent à l’intérieur des terres et près des plages françaises, afin de prévenir ces traversées dangereuses», avait clamé cette source.
«Instabilité politique»
Auprès de nos confrères du Monde le 16 septembre dernier, le ministère de l’Intérieur avait confirmé l’existence d’une nouvelle doctrine «en cours de finalisation», avec un dispositif d’entrave à la traversée constitué d’un «intercepteur et de plusieurs bateaux de secours, afin de pouvoir récupérer des gens s’ils tombent à l’eau».
Mais si l’on en croit Martin Hewitt, qui a «rencontré à Paris» un haut responsable français «il y a trois semaines», ce dispositif ne serait toujours pas en vigueur. «Je l’ai rencontré à Paris il y a trois semaines pour vraiment insister sur l’importance que revêt pour nous la mise en œuvre de cette tactique maritime», a-t-il déclaré devant la commission des Affaires intérieures. «Le président Macron a évoqué ce sujet lors du sommet de juillet, lorsqu’il s’est entretenu avec le premier ministre britannique (Keir Starmer ). Il est donc frustrant que cela ait pris autant de temps.» Selon lui, l’«instabilité politique» qui règne en France a probablement joué un rôle sur le retard de son entrée en vigueur.
Martin Hewitt a poursuivi son audition en précisant que le nombre moyen de personnes présentes dans chaque bateau était de 60. «Le chiffre le plus élevé que nous ayons enregistré ces derniers temps est de 125, ce qui est extraordinaire et incroyablement dangereux pour ces migrants», a-t-il ajouté. Il a également souligné que la nationalité des demandeurs d’asile avait changé ces derniers mois, nombre d’entre eux étant originaires d’Érythrée, d’Éthiopie, du Soudan et de Somalie. «Pendant un certain temps, les passeurs ont un peu perdu le contrôle de (leur trafic). Les migrants érythréens et éthiopiens ont (été vus) en train de prendre d’assaut les bateaux, et monter à bord sans payer». Pour l’heure, vingt-six migrants ont été expulsés du Royaume-Uni vers la France et 18 ont été accueillis dans le pays depuis le début de l’application de l’accord franco-britannique.