Soldat discret, Jules Coulon compte déjà, à tout juste 23 ans, 52 matches avec Toulon. Lancé dans le grand bain le 7 novembre 2021 par Patrice Collazo à Clermont, le Messin poursuit son évolution. Lui qui, enfant, n’avait pourtant rien d’un gamin formaté pour devenir rugbyman. Pour le comprendre, il faut se replonger dans son enfance.
Né le 4 juillet 2002 à Metz, « Julot » de son surnom (à prononcer Djoulot), grandit dans une région estampillée football. « Mon père en avait fait et honnêtement, petit, j’étais très ballon rond, sourit le polyvalent troisième ligne. Alors forcément, j’ai essayé. » Mais l’amour entre le football et le petit Jules ne prend pas vraiment. « C’était compliqué, poursuit-il. J’étais plus grand et plus gros que les autres. Et à cet âge-là, ça ne se passait pas bien avec mes éducateurs. J’avoue que ça m’a un peu dégoûté… et j’ai décidé d’arrêter. »
« Partir à 800 kilomètres de chez soi à 15 ans, c’est dur »
Finalement à 10 ans, c’est grâce à Benoît, un de ses amis d’école, qu’il s’essaye au rugby. Il raconte : « Je me souviens très bien de la scène. J’étais dans la voiture de ma mère, sur la rocade. On est passé à côté du stade et, je ne sais pas pourquoi mais ce coup-ci, j’ai eu envie d’essayer. » Alors, coup de cœur immédiat ? « Ce qui m’a vraiment plu, c’est l’esprit famille. Sincèrement, je ne savais pas courir, j’étais en surpoids. On faisait des tours de stade et même si j’étais deux terrains derrière tout le monde, il y avait un éducateur avec moi pour m’aider. J’ai kiffé, je me suis accroché… et je n’ai plus arrêté. »
Au Rugby club Metz Moselle, Jules Coulon prend sa première licence. Et si, au départ, il « découvre » cette nouvelle discipline et « galère un peu », dès sa deuxième année, il prend son pied. Et en plus de s’éclater, il performe. Au point de taper dans l’œil de Jean-Jacques Bortolaï, du côté de l’association du RCT. « J’ai toujours dit : “Si ça doit se faire, on viendra me chercher. Ça voudra dire que j’ai le niveau pour. Je n’irai pas faire de tests”. »
Et c’est bien le RCT qui viendra à lui. Si bien qu’à 15 ans, il prend finalement la direction du Var. D’abord pour rejoindre le pôle d’Hyères, puis celui de Toulon. « Partir à 800 kilomètres de chez soi à 15 ans, franchement, c’est dur. Je ne pense pas qu’on puisse réellement s’y préparer, en fait. » Jules Coulon n’oubliera d’ailleurs jamais sa première semaine à Toulon. « Mes parents étaient descendus avec moi pour ce qu’on appelle la semaine d’acclimatation. Je pense que j’ai pleuré tous les jours jusqu’au départ. »
« Je les remercie »
Le samedi, Carole et Jean-Michel reprennent la route, direction la Moselle. « Trois heures après, j’étais en train de les appeler pour leur dire de venir me chercher. Ils ont refusé. Ils m’ont dit que je pouvais les appeler tous les jours, ils ne viendraient pas avant un mois. Que sinon, j’allais le regretter. Aujourd’hui, je les remercie. »
Si bien qu’aujourd’hui, « Julot » est parvenu à ce qui, au fil des années, était devenu son rêve : signer pro dans son club formateur (lire ci-contre). « J’ai appris, quelques années plus tard, que lors de ce fameux retour, mes parents ne s’étaient pas adressé un mot jusqu’à Metz. Me laisser, c’était aussi très difficile pour eux. Ils ont fait énormément de sacrifices. Bon, j’ai aussi appris qu’ils avaient fait des paris pour savoir quand est-ce que j’allais craquer et rentrer », se marre-t-il.
Gamin puis adolescent déterminé, Jules Coulon n’a pas lâché. Grand bien lui en a pris. Leader des équipes jeunes et désormais joueur à part entière de l’effectif pro, le Messin a réussi une première partie de sa mission. Et il n’a que 23 ans.
Formé et façonné à Toulon, Jules Coulon est à l’orée de son plus grand défi : s’imposer sur la rade. Jusqu’ici joueur de rotation par excellence, jamais décevant lorsqu’il est aligné et même plutôt performant, leader de touche, le minot sait qu’il doit poursuivre son évolution. Si bien qu’au retour de l’été, le troisième ligne a repris le chemin du Campus avec une nouvelle mentalité. Il raconte : « Je suis revenu avec de vraies intentions et de vraies ambitions. Sur la préparation, j’ai atteint mes objectifs au niveau physique. Maintenant, je dois le mettre à profit sur le terrain. »
Officiellement « pro » depuis début juin et engagé avec le RCT jusqu’à la fin de la saison 2026-2027, Jules Coulon a coché l’un de ses objectifs : « C’est forcément une fierté, poursuit-il. Toulon, c’est le premier club qui est venu me chercher et qui m’a fait confiance. J’ai fait tellement de sacrifices que c’est symbolique de signer pro ici. »
« Jules est là, et il faut compter sur lui »
S’il compte 52 matches avec Toulon, le Messin est conscient que désormais, il doit enchaîner : « C’est l’année où je dois engranger beaucoup d’expérience, jouer toujours plus de matches et me montrer à ce niveau-là. J’ai pu échanger avec Pierre [Mignoni]. On s’est fixé des objectifs, à moi de les atteindre. »
Joueur complet, « Coulock » de son autre surnom [trouvé par l’inspiré Baptiste Serin en comparaison avec Henry Pollock, diamant anglais], doit surtout parvenir, sur cette saison, à se détacher de l’image de l’éternel « jeune ». Pas si évident, quand on est issu de la formation. « Mon but, c’est aussi de changer, d’évoluer. J’aime pouvoir être un leader dans un vestiaire. Mais quand tu rentres dans un groupe pro, c’est forcément différent. Il y a des joueurs qui le font très bien. Mais je m’y fais. J’essaye de montrer un autre visage, tout en gardant ma personnalité. Je veux prouver que Jules est là, et qu’il faut compter sur lui. » Une chose est sûre, quand il est aligné sur le terrain, difficile de ne pas remarquer qu’il est là. Et c’est l’essentiel. F. DA.