Le musée de Montmartre présente une exceptionnelle collection qui révèle toute la richesse et la diversité de l’École de Paris du début du XXe siècle, des grands maîtres comme Modigliani aux artistes injustement oubliés.
Pour son exposition d’hiver (du 17 octobre au 15 février 2026), le musée de Montmartre a invité le collectionneur polonais Marek Roefler qui, en une vingtaine d’années, a constitué un fonds immense d’œuvres d’artistes de l’École de Paris. De Moïse Kisling à Tamara de Lempicka, ses collections sont habituellement présentées dans la Villa La Fleur à Konstancin-Jeziorna, qui propose actuellement une rétrospective de Boleslas Biegas, un sculpteur et peintre bien illustré dans l’exposition de Paris.
Tout pour l’École de Paris
Venus de l’Europe entière, de nombreux artistes sont venus s’installer à Paris au début du XXe siècle, s’entassant dans les nombreux ateliers de Montmartre, Montparnasse et La Ruche dans le XVe arrondissement. Cette École de Paris s’est développée dans de multiples directions artistiques, du cubisme à l’expressionnisme, mais les œuvres gardent parfois les traces du pays d’origine de leurs créateurs. Le collectionneur Marek Roefler a choisi ce moment très particulier de l’histoire de l’art, écumant les salles de ventes à la recherche d’œuvres de ces artistes en exil, en particulier ceux originaires de sa Pologne natale.
Nu allongé, Kiki de Montparnasse (1925) de Moïse Kisling, présenté dans l’exposition « L’École de Paris. Collection Marek Roefler », musée de Montmartre, Paris, 2025 © Villa La Fleur / Ph. Marcin Koniak
De Modigliani à Foujita
Sur les deux niveaux d’exposition du musée de Montmartre, on croise les grands noms de l’École de Paris : dessins de Modigliani et Foujita, sculptures de Chana Orloff et Biegas, toiles de Soutine et Lempicka. Il est impressionnant de voir qu’en un temps relativement rapide ce collectionneur polonais ait pu réunir autant de pièces historiques. On dit même que son fonds s’élève à plusieurs milliers de pièces et que, malgré les prêts importants consentis pour l’exposition de Montmartre, les murs de son musée sont encore copieusement garnis.
À droite : Portrait du peintre Ladislas Slewinski (vers 1910) de Jadwiga Rybaska, présenté dans l’exposition « L’École de Paris. Collection Marek Roefler », musée de Montmartre, Paris, 2025 © Connaissance des Arts / Guy Boyer
De grands noms, parfois oubliés
Tout l’intérêt de l’exposition est de mettre en lumière des artistes oubliés, qu’ils soient étrangers ou français. Bénéficiant de l’appui de nombreux intellectuels comme Guillaume Apollinaire, André Salmon ou Gustave Coquiot, les artistes de l’École de Paris ont pu exposer et être achetés par des collectionneurs et marchands comme Léopold Zborowski ou Paul Guillaume. Dans la collection Roefler, on retrouve aussi bien Jean Cocteau (Portrait d’Apollinaire) que Suzanne Valadon, Jean Metzinger ou Léopold Survage, Henri Hayden ou Jules Pascin.
Détail du Paysage aux poires (1920) de Léopold Survage, présenté dans l’exposition « L’École de Paris. Collection Marek Roefler », musée de Montmartre, Paris, 2025 © Connaissance des Arts / Guy Boyer
Une autre Tamara de Lempicka
L’exposition du musée de Montmartre laisse la place à plusieurs artistes femmes telles que Mela Muter et Alice Halicka. Pour Tamara de Lempicka, née à Varsovie, plusieurs œuvres de registres différents sont exposées. D’une part, cette Danseuse russe qui fait la couverture du catalogue et qui rappelle l’admiration de l’artiste pour les traditions russes comme ce kokoshnik, la coiffe folklorique qu’arbore la jeune femme. Plus loin, une Mère à l’enfant s’impose solidement (à droite) tandis qu’un Coin d’atelier accroche le regard par son petit pan de mur bleu et son coffre de même couleur. Enfin, une étrange toile bleue conclut l’exposition et montre que Lempicka s’est également engagée vers l’abstraction.
À droite : Mère et enfant (vers 1922) de Tamara de Lempicka, présenté dans l’exposition « L’École de Paris. Collection Marek Roefler », musée de Montmartre, Paris, 2025 © Connaissance des Arts / Guy Boyer
Des étrangers inconnus
Bien que leurs noms sonnent français, nombre des créateurs de l’École de Paris sont des étrangers venus de Pologne ou de Russie (Louis Marcoussis, Serge Férat, Henri Epstein ou Jean-Lambert Rucki). L’exposition regorge d’artistes dont le nom a été oublié. Abraham Weinbaum, par exemple, figure ici avec une très belle nature morte aux fruits en hommage à Cézanne. Nathan Grunsweigh célèbre la vie familiale juive avec une scène de repas pendant le Shabbat. Roman Kramsztyk surprend par sa Sapho reprenant les canons de la Renaissance.
Nuit II (Composition à la grenouille) (1937) de Louis Marcoussis, présenté dans l’exposition « L’École de Paris. Collection Marek Roefler », musée de Montmartre, Paris, 2025 © Connaissance des Arts / Guy Boyer
La sculpture à l’honneur
Même s’il s’agit souvent de tirages récents (on le regrette), la sculpture est bien représentée dans l’exposition. Ainsi de ce Van Gogh marchant par Ossip Zadkine près d’une scène de moisson d’Henri Hayden. Ainsi de l’impressionnant groupe de bustes d’artistes de l’École de Paris tels que Chaïm Soutine, Foujita et Jeanne Hébuterne (la compagne de Modigliani) par Léon Indenbaum ou Louis Marcoussis par August Zamoyski. Sans oublier, dans un cabinet sur l’inspiration classique, l’étrange Madone de Xawery Dunikowski près des portraits dessinés d’Eugène Zak.
Van Gogh marchant à travers champs (1956) d’Ossip Zadkine et Le Pouldu, les Moissonneurs (1910) d’Henri Hayden, présentés dans l’exposition « L’École de Paris. Collection Marek Roefler », musée de Montmartre, Paris, 2025 © Connaissance des Arts / Guy Boyer
« L’École de Paris, Collection Marek Roefler »
Musée de Montmartre, 12 Rue Cortot, 75018 Paris
Du 17 octobre 2025 au 15 février 2026
Collector Ecole de Paris Marek ROEFLER 2016 (English Subtitles)