A la cour d’assises de Paris,
Le président de la cour d’assises prévient les proches de Lola. Des photos du corps dénudé de la fillette de 12 ans, retrouvée ligotée avec du ruban adhésif dans une malle, vont être projetées dans la salle d’audience. « Ce peut être utile pour que la cour et les jurés puissent voir et savoir ce que l’on juge exactement », explique le magistrat qui propose aux membres de la famille de la victime de sortir un instant. Delphine, la mère de la préadolescente, et Thibault, son frère, restent assis sur le banc des parties civiles. A la barre, le commissaire Maximilien G., un ancien policier de la brigade criminelle, commente les clichés. « La tête était complètement entourée de scotch, il y avait une plaie très importante au niveau de la mâchoire et une autre au niveau du cou. » C’en est trop pour la maman de la petite victime qui finit par sortir. L’accusée, Dahbia Benkired, reste impassible.
A l’époque, ce policier expérimenté, cheveux gris courts, costume sombre et cravate bleue, était l’un des directeurs d’enquête de la Crim’ qui a travaillé sur cette affaire. Lorsqu’ils commencent leurs investigations, les enquêteurs regardent les images des caméras de surveillance installées dans la résidence où vivent Lola et sa famille, rue Manin, dans le 19e arrondissement. Son père, Yohan, est le gardien de l’immeuble. La jeune fille rentre dans le bâtiment à 15h11. Dahbia Benkired la suit de près. « On a l’impression que Lola Daviet n’est pas très rassurée quand elle croise le regard de cette femme », remarque le commissaire Maximilien G.. A 16h59, l’accusée sort de l’immeuble, avec deux valises, une rose et une noire, et une grosse malle, mal fermée. « On voit qu’elle est très lourde, qu’elle a du mal à la tirer », poursuit le policier. Il constate également que l’accusée a changé de vêtements.
Des nuggets et des frites
Après la découverte du corps, un témoin va se manifester auprès des policiers. Il a rencontré Dahbia Benkired plus tôt dans l’après-midi, alors qu’elle sortait de l’immeuble de la rue Manin avec la malle contenant le cadavre de la fillette. Ensemble, ils sont allés dans un café, Le Rallye. Selon ce témoin, elle lui a proposé de lui vendre « des reins ». Les enquêteurs vont saisir et examiner les images des caméras de surveillance de l’établissement. On voit le duo s’installer à une petite table et avoir une « discussion sur le contenu de la malle ». « Elle est très détendue quand elle lui parle, observe le commissaire Maximilien G.. Cela contraste réellement avec les faits dont elle sait qu’elle les a commis. » L’homme qui accompagne l’accusée soulève le couvercle de la malle et plonge sa main à l’intérieur. Puis il se lève et quitte les lieux. « Il voulait commander deux cafés mais il a renoncé parce qu’il ne sentait pas l’affaire », poursuit le policier.
Dans la soirée, elle va dîner avec l’un de ses amis dans un fast-food, les 3 Atlas. « Elle est souriante » lorsqu’elle commande des nuggets et des frites, constate le président de la cour en visionnant les images captées par la caméra installée dans le restaurant. Elle retourne après ce repas à Paris en VTC pour déposer le corps de la victime rue Manin, avant d’aller passer la nuit chez un ami à Bois-Colombes.
« On a vu qu’elle avait les yeux bleus »
Le 15 octobre 2022, Dahbia Benkired est interpellée au petit matin. Maximilien G. a participé à la perquisition de l’appartement de la sœur de l’accusée, situé au 6e étage de l’immeuble. « Un petit F1, d’une vingtaine de mètres carrés », décrit-il en regardant les photos prises ce jour-là. « Dans la salle principale, il y a deux clic-clac, deux matelas contre le mur, une kitchenette, de l’eau dans la baignoire avec un petit tabouret dedans », poursuit-il. A l’intérieur, les limiers de la PJ vont utiliser du Bluestar, « un produit qui permet de révéler les traces latentes de sang » dans l’obscurité. Les clichés projetés montrent de nombreuses traces de sang dans la salle de bains. Un couteau Ikea, avec une lame longue de 20 cm, a aussi réagi au produit. Les enquêteurs vont aussi saisir un flacon de vernis à ongles rouge « qui a pu servir à écrire les chiffres 0 et 1 sous les pieds de la victime ».
Les policiers ont pris des photos de l’endroit où ont été découvertes les deux valises de Dahbia Benkired et la malle contenant le cadavre de la victime. « La malle faisait 70 cm par 40 cm », décrit le commissaire de police. Les autres clichés projetés montrent le corps meurtri de la préadolescente. « Il était entièrement nu. C’était le corps d’une jeune fille, de type caucasien, couvert de scotch gris, souffle le policier. Les deux mains étaient attachées ensemble. Le visage et le cou étaient recouverts de scotch. Il y avait une plaie au niveau du cou qui a presque entraîné la décapitation. 18 plaies ont été constatées. On a constaté que deux chiffres avaient été inscrits sous les pieds, un 0 et 1, avec une espèce de liquide rouge. On a retiré le scotch du visage de la victime qui était très déformé. On ne pouvait pas affirmer que c’était Lola Daviet. On a vu qu’elle avait les yeux bleus. »
Le verdict est attendu le 24 octobre. L’accusée encourt la réclusion criminelle à perpétuité.