C’est un nouveau coup de massue pour l’aciérie française et européenne ! La direction d’ArcelorMittal vient d’annoncer aux représentants du personnel un plan de suppressions de postes dans « sept sites du nord de la France ». Le détail de ces annonces n’a pas été encore communiqué. Sommes-nous face à un ajustement à la marge ou une véritable nouvelle saignée industrielle ?

« Dans le contexte de crise qui frappe l’industrie de l’acier en Europe (une baisse de la demande de 20 % sur cinq ans et une forte augmentation des importations qui représentent aujourd’hui 30 % du marché), ArcelorMittal France Nord doit en permanence travailler à améliorer son efficacité et sa compétitivité (…) ArcelorMittal France Nord a déjà mis en œuvre toutes les mesures possibles d’adaptation à court terme, mais l’entreprise doit maintenant envisager des mesures de réorganisation pour adapter son activité au nouveau contexte du marché et assurer sa compétitivité future », vient de communiquer la direction française de l’aciériste.

Mercredi après-midi, un comité social d’entreprise s’est tenu pour la partie France, au siège français de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), et un autre, au niveau européen, à Luxembourg, pour présenter ce plan. La direction fait savoir qu’il va concerner 600 personnes « environ » sur les 7 100 salariés concernés par ces annonces. « À ce stade, il est trop tôt pour chiffrer le nombre de personnes qui pourraient être concernées », ajoute-t-elle. ArcelorMittal dispose précisément d’implantations à Dunkerque (Nord), Florange (Moselle), Basse-Indre (Loire-Atlantique), Mardyck (Nord), Mouzon (Ardennes), Desvres (Pas-de-Calais) et Montataire (Oise). Tous seront concernés par les réductions des effectifs. « Nous serons extrêmement vigilants sur le fait qu’il n’y ait aucune fermeture de site », a mis en garde le ministre de l’Industrie et de l’Énergie, Marc Ferracci.

« Nous sommes surpris par l’ampleur du plan, mais nous savions que nous devions passer par là. La réflexion est engagée depuis six mois pour réduire nos coûts. C’est peut-être un mal pour un bien. Cet effort pourrait convaincre les actionnaires à lancer les investissements de décarbonation, notamment l’installation de fours électriques, pour assurer l’avenir de notre production d’acier», commente à chaud Xavier Le Coq, coordinateur central CFE-CGC pour le groupe ArcelorMittal, joint par La Tribune.

Des éléments plus précis fin avril

La direction de la société et les syndicats doivent à nouveau échanger lors d’une réunion fixée au 30 avril, pour connaître l’impact de cette organisation en France, nommée « plan React », site par site. « Ce qui nous inquiète à ce propos c’est que nous ne connaissons pas encore l’outil social qui va être utilisé. Un PSE ? Un plan de départs volontaires ? Des non remplacements de départs à la retraite ? Nous n’en savons rien », ajoute Xavier Le Coq.

Cette annonce intervient dans un contexte déjà morose pour le groupe industriel sur le plan social. Si ArcelorMittal a annoncé un investissement de 53 millions d’euros pour son site de Fos en mars dernier, il a en revanche mis en pause son très important investissement de production d’acier décarboné dans le nord de la France, à Dunkerque supérieur au milliard d’euros. Ce qui a laissé craindre aux collaborateurs des jours à venir plus sombres, qui savent désormais à quelle sauce ils vont être mangés, ou presque.

« L’État soutiendra ArcelorMittal à hauteur de 850 millions d’euros dans son projet de décarbonation de la production d’acier à Dunkerque, évalué lui à 1,8 milliard d’euros, uniquement si cet investissement est réalisé. Nous espérons qu’il sera concrétisé prochainement », tient à rappeler Marc Ferracci.

De plus, en fin d’année 2024, la filiale ArcelorMittal Centres de Services (AMCS) a confirmé la fermeture prochaine des sites de Reims (Marne) et de Denain (Nord) et la disparition à venir de 136 emplois. « Les PSE ont été récemment validés par la Dreets et les premières notifications de licenciement économique seront envoyées le 1er juillet », confie un syndicat de la filiale joint par La Tribune.

Par ailleurs, selon nos informations, le CSE qui s’est tenu au niveau européen, au Luxembourg, a fait l’objet d’une annonce de 1 000 emplois supprimés dans les fonctions du groupe ArcelorMital, dans toute l’Europe, au travers d’une délocalisation de ces postes vers l’Inde ou la Pologne. ArcelorMittal France devrait, de sources syndicales, absorber environ 200 de ses délocalisations de postes, déjà comptabilisées dans les 600 suppressions de postes totales annoncées pour l’Hexagone.

Une crise avant tout européenne

Cette réorganisation des effectifs n’est pas unique dans le secteur. Son concurrent allemand, Thyssenkrupp, a annoncé fin novembre 11 000 suppressions de postes d’ici 2030 dans sa branche acier. Une saignée qui s’explique par une crise de la sidérurgie au niveau européen. « En dix ans, la production d’acier en Europe est passée de 7 % de la production mondiale à 4 % », regrettait il y a peu Stéphane Séjourné, vice-président exécutif de la Commission européenne et commissaire chargé de la prospérité et de la stratégie industrielle. « Il y a des sites en voie de fermeture, il y a urgence à agir », ajoutait-t-il alors.

En cause ? Des surcapacités chinoises, à bas coûts, qui accaparent le marché européen et nuisent aux sidérurgistes du continent, des prix de l’énergie qui ont augmenté pour ces industriels électro-intensifs et des marchés qui se ferment, notamment avec les droits de douane de 25 % pour l’acier et l’aluminium qui entre en territoire américain. Ce qui a obligé la Commission européenne a présenté un plan de sauvetage en urgence. « Nous devons aller plus loin encore », a néanmoins prévenu le ministre de l’Industrie à propos du soutien européen à la sidérurgie.