Dans « Chien 51 » sorti le 15 octobre, Gilles Lellouche et Adèle Exarchopoulos enquêtent sur un meurtre politique dans un Paris divisé en trois zones séparant les classes sociales. Sur fond d’IA et d’ultra-surveillance, cette adaptation du best-seller de Laurent Gaudé s’avère efficace, mais superficielle.

Le cinéma français et la science-fiction, c’est un peu comme la pizza et l’ananas: c’est contre-nature. Et quand il s’agit de convoquer l’arrivée d’extraterrestres sur sol hexagonal, on est souvent plus proche de « La soupe aux choux » que de « La guerre des mondes ».

L’adaptation à 40 millions d’euros de « Chien 51 », best-seller dystopique de Laurent Gaudé, par le cinéaste de « Bac Nord » et « Novembre » Cédric Jimenez, laissait augurer d’un résultat moins potache. C’est réussi, visuellement en tous les cas.

La lutte des classes

Paris, 2045. Une voiture passe un poste de contrôle avant d’entrer sur l’île Saint Louis. Au moment de rentrer chez lui, un homme se fait brutalement abattre. Aussitôt, une course-poursuite s’engage dans la capitale et l’auteur supposé du meurtre échappe à la police avant d’être retrouvé, criblé de balles.

On apprend que la victime est l’inventeur d’Alma, une intelligence artificielle qui règne sur Paris, capitale française divisée en trois zones distinctes qui séparent les classes sociales. Enquêtrice de la Zone 2, Salia (Adèle Exarchopoulos) doit s’associer à Zem (Gilles Lellouche), flic désabusé de la Zone 3, pour mettre la main sur le suspect désigné par le Premier ministre: Jon Mafram, chef d’un groupe de hackers souterrains opposé à l’I.A..

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Un polar sans nuances

Disons-le d’emblée! Du livre de Laurent Gaudé ne subsiste ici que la membrane. L’Athènes futuriste, dominée par une multinationale, la crise financière, la critique du capitalisme sauvage, est remplacée ici par Paris, l’ultra-technologie et l’intelligence artificielle. Cédric Jimenez a retenu avant tout la séparation des zones sociales. Pourquoi pas? Le cinéaste est tout à fait légitime pour poser un regard personnel sur le texte qu’il transpose sur grand écran.

Après, que reste-t-il à regarder? Un univers où la population est contrôlée par des bracelets personnels. Où un jeu télévisé permet aux enfants défavorisés de la Zone 3 de vivre dans la Zone 2. Des drones qui saturent l’espace aérien. Une intelligence artificielle qui assiste la police pour proposer des scénarios probables aux enquêtes les plus nébuleuses. Des résistants. Des puissants. Un complot. Bref, rien de très nouveau et Cédric Jimenez, comme dans ces précédents films, a tendance à écarter toutes nuances, toutes subtilités, toutes complexités pour foncer, tête baissée, dans le polar bourrin.

>> A écouter aussi, l’interview du réalisateur Cédric Jimenez dans Vertigo : L’invité: Cédric Jimenez, « Chien 51 » / Vertigo / 24 min. / le 10 octobre 2025 Un Paris futuriste bluffant

Dès lors, on a l’impression d’un projet écartelé entre deux tendances contradictoires: la fresque dystopique (trop simpliste) et le polar basique (trop ambitieux). Sacrifiant beaucoup sur l’autel de l’efficacité, « Chien 51 » parvient toutefois à restituer un Paris futuriste assez bluffant. Et trouve ses scènes les plus réussies à travers son duo de flics, deux solitudes abîmées jouées par une Adèle Exarchopoulos et un Gilles Lellouche inhabituels, tout en sourdine, en maladresse et en hésitation.

Du bel ouvrage, solide, carré, emballé avec savoir-faire, dont on aurait rêvé qu’il embrasse, dans son mélange d’anticipation et de polar, tout le potentiel politique et subversif de son histoire.

Note: 3/5

Rafael Wolf/olhor

« Chien 51 » de Cédric Jimenez, avec Gilles Lellouche, Adèle Exarchopoulos, Louis Garrel, Romain Duris. A voir dans les salles romandes depuis le 15 octobre 2025.