La Marseillaise : Vous êtes actuellement en tournée pour votre dernier album, « Charlotte ». Un album intimiste où vous vous dévoilez. C’était un besoin pour vous à ce stade de votre carrière ?

Vitaa : Oui, complètement, cet album est celui où je suis allée le plus loin. Déjà par le titre de l’album, je révèle mon vrai prénom et c’est quelque chose que je n’aurais jamais pensé faire pendant ces années de carrière, tellement je me suis attachée à créer une armure derrière Vitaa. Pour cet album, je me suis dit qu’il était temps de tout révéler. Mes failles, les doutes, les complexes. C’est mon dernier album solo et j’avais besoin de cette mise au point, de vider mon sac. Je suis en train d’organiser la suite, on me verra moins sur le devant de la scène, mais je me mettrai davantage au service des autres tout en continuant à faire ce que j’aime.

Montrer votre vulnérabilité, vos failles au grand public, est-ce aussi un moyen d’aider les femmes
à s’accepter
 ?

Vitaa : J’ai réalisé, avec le temps et quand je suis sur scène, que j’ai la chance d’avoir un public qui a grandi avec moi. Ce sont essentiellement des femmes de ma génération qui sont devenues mamans parfois, qui font 5 000 choses en même temps, qui travaillent, qui sont éprouvées et c’est aussi ce que je raconte dans cet album, en tournée et dans un documentaire disponible sur TF1+ . En fait, je veux dire que je suis une femme comme tout le monde. Personnellement, je ne m’aime pas. J’essaie d’être la meilleure des mamans possibles, mais je suis en tournée tout le temps, j’ai une culpabilité énorme de rater des moments avec mes enfants… Je sais qu’on ressent toute la même chose.

Vous ne cachez
plus vos échecs,
vous racontez votre parcours et les remarques qui
ont été faites
sur votre physique notamment, au-delà de la chanson. C’est quoi être une femme dans l’industrie musicale
 ?

Vitaa : C’est très dur d’être une femme dans ce métier. On vieillit, et je crois que les regards portés sur nous sont cent fois plus durs que sur les artistes masculins. On est dans une ère de viralité violente, cruelle, et je me dis que si j’avais dû démarrer ma carrière dans cette ère-là, je n’en aurais pas été capable. Je n’aurais pas eu les épaules pour subir les critiques permanentes des gens sur les réseaux. J’ai l’impression qu’aujourd’hui, on passe notre temps à se regarder le nombril, à critiquer et je crois que ce n’était pas comme ça il y a 20 ans. Ce qu’il y a de plus compliqué, c’est de durer dans le temps en tant que femme, artiste et moi, j’ai décidé de le faire. Je ne voulais plus dépendre de personne, alors avec mon mari, on a décidé de lancer notre propre label, c’est un immense chemin que nous avons parcouru. J’ai vécu tant de traversées du désert et quand je vois mon public qui me suis depuis toutes ces années, qui chante mes chansons par cœur comme Confessions nocturnes, je ne peux être que pleine de gratitude, donc je m’arrête à ça et je laisse les méchancetés derrière, parce que la finalité est de faire ce qu’on aime.

Vous répétez souvent que vous
faites de la musique populaire,
c’est important pour vous
 ?

Vitaa : Pour certains, le populaire, c’est presque une insulte malheureusement. Nous, artistes populaires, nous faisons des chansons pour toucher les gens, on ne fait pas des chansons pour être branchés et aimés des médias. Je peux vous dire que quand vous faites une chanson qui raconte votre vie et que 8 000 personnes en concert la reprennent, c’est le plus beau des cadeaux. Je n’ai jamais fait de la musique pour les chiffres, j’ai fait de la musique pour partager avec les gens, alors je suis très fière d’être une artiste populaire aujourd’hui et j’en aurais jamais honte !

Vous avez toujours raconté votre vie dans vos chansons. Pensez-vous que c’est l’une des raisons qui fait votre succès et votre longévité ?

Vitaa : Je pense que la clé, c’est d’avoir toujours été une artiste qui ne triche pas. J’ai commencé dans ma chambre à raconter mes histoires chaotiques, la rupture la plus difficile de ma vie, c’est ce que raconte À fleur de toi et l’album est un journal intime, les chansons ont traversé le temps et, aujourd’hui, c’est toujours le cas, j’ai toujours raconté ce qui me touchais, ce que je vivais et je continue au-delà des rapports hommes-femmes, qui est un peu mon thème de prédilection, avec mes enfants, ma vie en tant que mère, etc. Ce n’est pas un choix, c’est juste parce que je ne sais pas faire de la musique autrement qu’en étant moi-même.

Les premières images du reportage
de TF1 parlent de l’acceptation de la différence, alors que votre fils raconte une poésie. Vous aviez repris, aux côtés de Camélia Jordana et Amel Bent, la chanson «
 Marine » de Diam’s. Que pensez-vous de la montée des extrêmes en France et de la situation politique actuelle ?

Vitaa : Je pense que les extrêmes ne seront jamais la solution, c’est ce que je pense du plus profond de mon cœur. C’est une priorité pour moi d’apprendre à mes enfants que le but dans ce monde, c’est le respect et la tolérance, donc le jour où ces valeurs-là seront respectées, le monde ne s’en portera que mieux.

Est-ce que Marseille est une ville
que vous appréciez particulièrement
 ?

Vitaa : Marseille est ma ville de cœur, ma famille est à Marseille, on va souvent au Vélodrome et le public est mon préféré en France parce qu’il y a une ferveur particulière. Je me sens très bien dans le Sud et je ne m’en cache pas.