Maria Branyas Morera, doyenne de l’humanité, est morte à 117 ans sans jamais tomber gravement malade. Une équipe de scientifiques a étudié son corps pour comprendre comment elle a pu défier toutes les règles du vieillissement. Les résultats sont aussi fascinants qu’intrigants.
Quand Maria Branyas s’est éteinte en août 2024 dans sa maison de retraite catalane, elle avait 117 ans et 168 jours. Ce record de longévité a suscité un vif intérêt scientifique. Comment cette femme née en 1907, qui avait survécu à deux guerres mondiales, la grippe espagnole et même au Covid-19 à 113 ans, avait-elle pu vivre aussi longtemps sans jamais développer de cancer, de maladie neurodégénérative ni de problème cardiovasculaire ?
Avant sa mort, Maria Branyas avait autorisé une équipe de chercheurs à analyser son corps dans le cadre d’une étude multiomique publiée dans Cell Reports Medicine. Son ADN, sa salive, son sang, ses selles et son microbiote ont été passés au crible pour tenter de percer les mystères de son incroyable résistance au temps.

Une horloge biologique qui avait vingt ans de retard
Le plus surprenant reste sans doute l’analyse de son horloge biologique. Grâce aux marques de méthylation de son ADN, véritables chronomètres moléculaires, les chercheurs ont estimé que ses cellules correspondaient à celles d’une femme de 94 ans. Ce qui démontre que son âge biologique était donc « en retard de plus de vingt ans ». Un décalage spectaculaire qui pourrait expliquer pourquoi les pathologies du grand âge ne se sont jamais déclarées chez elle.
D’un point de vue génétique, les chercheurs ont identifié des variantes rares de gènes impliqués dans la réparation de l’ADN, la régulation du cholestérol et la réponse inflammatoire. Ces mutations auraient freiné l’usure cellulaire habituelle, retardant les effets du vieillissement. Quant à son métabolisme, lui aussi, semblait fonctionner à l’économie : un profil lipidique exemplaire avec un cholestérol bas et une présence importante de HDL, les « bonnes graisses », citées dans Enviro 2B.
Un système immunitaire stable et étonnamment calme
Si certains signes d’« inflammation de fond », typiques du vieillissement, étaient bien présents, les chercheurs ont été frappés par l’équilibre du système immunitaire de Maria. Malgré des globules blancs plus lents, cette inflammation chronique ne s’était jamais transformée en maladie auto-immune ni en fragilité accrue. Ils parlent même d’ »une forme de résilience rare : un système immunitaire faiblement activé, mais remarquablement stable ».
Cette stabilité se retrouvait également dans son microbiote intestinal, d’une richesse peu commune. Dès lors, les chercheurs ont observé une abondance de bactéries bénéfiques comme Akkermansia ou Bifidobacterium, connues pour leurs effets anti-inflammatoires. La flore intestinale de Maria ressemblait davantage à celle d’un adulte en bonne santé qu’à celle d’une femme de plus de 100 ans.
Un détail a particulièrement retenu leur attention. En effet, Maria Branyas consommait trois yaourts par jour, tous issus de la marque catalane La Fageda. Ces produits fermentés auraient joué un rôle clé dans l’entretien de son microbiote. Une piste que les scientifiques prennent désormais très au sérieux.
Une hygiène de vie simple et remarquablement constante
Dans ce cas de figure, les chercheurs affirment selon Comment Ça Marche que la génétique et les bactéries ne font pas tout. Autrement dit, Maria Branyas menait une vie calme, structurée et résolument positive. Elle ne fumait pas, ne buvait pas d’alcool, mangeait méditerranéen : fruits, légumes, huile d’olive, poisson, noix, produits laitiers fermentés et marchait chaque jour. Elle dormait bien, jouait du piano et entretenait des liens réguliers avec sa famille et ses amis.
D’ailleurs, elle expliquait elle-même son secret par l’importance de la tranquillité, d’un moral stable et « d’éviter les personnes toxiques ». Les chercheurs confirment aujourd’hui que cette combinaison de gènes protecteurs, d’alimentation équilibrée et d’un environnement émotionnel serein pourrait être une des clés d’un vieillissement réussi.
Ainsi, l’étude de Maria Branyas bouscule les certitudes sur le grand âge. Effectivement, elle montre qu’il est possible de vieillir sans forcément tomber malade, et que certains corps savent, littéralement, garder les effets du temps à distance.