Selon la Banque européenne d’investissement (BEI), qui participe au financement fléché par l’Union Eropéenne,  le projet consiste en la construction d’une ligne de 400 kilovolts sur environ 540 kilomètres. Elle reliera Abidjan aux régions de l’Est et du Nord, jusqu’à Ferkessédougou, avec de nouveaux postes de transformation et un programme d’électrification rurale le long du tracé.

L’objectif est de renforcer la fiabilité du réseau électrique ivoirien et d’intégrer davantage le pays au système interconnecté ouest-africain (WAPP), qui regroupe une quinzaine d’États de la CEDEAO. Cette ligne doit aussi faciliter les échanges régionaux de courant électrique, et soutenir l’insertion des énergies renouvelables dans le mix national.

Le poids de la Côte d’Ivoire dans la sous-région

La Côte d’Ivoire est déjà un exportateur net d’électricité. Elle fournit du courant à plusieurs voisins, dont le Ghana, le Burkina Faso et le Mali. La Dorsale Est augmentera la capacité de transmission haute tension du pays de près de 38 %, la faisant passer de 2,5 à 3,5 GW. Elle contribuera aussi à réduire les pertes techniques dans le WAPP, et devrait sécuriser jusqu’à 0,9 TWh d’exportations annuelles.

Le gouvernement ivoirien présente ce projet comme une composante clé de son Pacte national Énergie 2025-2030, qui prévoit 4,5 milliards d’euros d’investissements, dont 2,6 milliards pour les infrastructures de transport. Ce programme vise la couverture électrique universelle d’ici fin 2025, et l’intégration d’au moins 1 GW de capacités renouvelables supplémentaires à l’horizon 2030.

Pourquoi Bruxelles mise sur Abidjan

Pour la Commission européenne, la Côte d’Ivoire est un partenaire stratégique. Le pays combine en effet une croissance soutenue de la demande, estimée à 8% par an, et une capacité de production déjà supérieure à celle de nombre de ses voisins. Bruxelles entend ainsi faire de la nation éburnéenne une vitrine de son initiative Global Gateway, lancée en 2021 pour rivaliser avec les financements chinois et renforcer la présence européenne dans les infrastructures africaines.

Selon le communiqué officiel de la Commission, l’annonce de ce financement entre dans le cadre de la campagne internationale « Scaling Up Renewables in Africa », menée avec l’appui du président sud-africain Cyril Ramaphosa et de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Bruxelles présente son soutien à la Côte d’Ivoire non seulement comme une réponse aux besoins énergétiques régionaux, mais aussi comme un choix stratégique et moral.

D’après Ursula von der Leyen, il s’agit d’accélérer l’accès à une énergie propre pour des centaines de millions de personnes, tout en créant des emplois verts et en renforçant la résilience des chaînes d’approvisionnement mondiales. L’initiative fait également office de contribution européenne aux objectifs fixés lors de la COP28, notamment le triplement des capacités renouvelables d’ici 2030.

Enfin, d’après la BEI, le projet est aligné sur les engagements climatiques ivoiriens inscrits dans les Contributions déterminées au niveau national (CDN). Il devrait contribuer à réduire les émissions de 30 % et à porter la part des énergies renouvelables à 45% d’ici 2030. La banque rappelle par ailleurs que le projet devra respecter la législation nationale en matière d’environnement, et se conformer à des standards sociaux et environnementaux.

Un test pour l’Europe et pour Abidjan

Pour les autorités ivoiriennes, la réussite du projet de la Dorsale Est est essentielle pour absorber la hausse rapide de la demande domestique et maintenir la compétitivité de l’économie, en particulier dans l’industrie et les mines. Pour l’Union européenne, c’est l’occasion de démontrer que sa promesse de partenariat énergétique avec l’Afrique se traduit par des résultats concrets et visibles.

La question est désormais de savoir si la mise en œuvre, qui s’étalera sur plusieurs années, sera à la hauteur des ambitions affichées.