L’amylose à transthyrétine (ATTR) désigne un ensemble de maladies, caractérisées par l’accumulation anormale d’une même protéine dans différents organes : la transthyrétine (TTR).

La transthyrétine : de sa fonction essentielle à la maladie

Essentielle au bon fonctionnement de notre organisme, la transthyrétine (TTR) est une protéine produite principalement par le foie, mais aussi, en moindre quantité, par le cerveau et la rétine.

C’est une protéine de transport. Depuis le foie, elle est libérée dans le sang et assure le transport de l’hormone thyroïdienne (thyroxine) et de la vitamine A (rétinol). Son nom découle directement de cette fonction : TRANSport de THYroxine et de RETINol.

Dans certaines conditions, la transthyrétine normalement soluble peut s’agréger en fibrilles amyloïdes : des agrégats de protéines mal repliées et insolubles. Ces dépôts provoquent une toxicité cellulaire et des lésions tissulaires, perturbant le fonctionnement normal des organes concernés.

L’amylose à transthyrétine (ATTR) regroupe ainsi plusieurs pathologies ayant pour point commun l’accumulation de ces fibrilles insolubles, composées de protéines TTR anormalement agrégées.

Selon les formes, la maladie peut toucher le système nerveux périphérique et autonome (SNA), le cœur, le tube digestif, les reins, mais aussi le corps vitré de l’œil et les leptoméninges, fines membranes entourant le cerveau et la moelle épinière.

Deux formes principales d’amylose à transthyrétine

Deux formes principales d’amylose systémique peuvent se développer à partir de la transthyrétine (TTR) :

  • l’amylose à transthyrétine héréditaire, causée par la transmission d’une mutation génétique ;
  • l’amylose à transthyrétine de type sauvage, ou non mutée, qui n’est pas d’origine génétique.

ATTR héréditaire : une mutation génétique transmise

Dans l’amylose à transthyrétine héréditaire (hATTR), une mutation génétique modifie la séquence du gène codant pour la protéine TTR, ce qui la rend instable et favorise son repliement. Plus de 130 variants génétiques ont été identifiés à ce jour.

Les protéines défectueuses ainsi produites s’accumulent progressivement dans différents organes et peuvent alors provoquer des atteintes cardiaques, digestives, mais aussi neurologiques.

Chaque enfant d’un parent porteur a un risque sur deux d’hériter du gène muté. Bien que la mutation soit présente dès la naissance, les dépôts amyloïdes ne se forment qu’à l’âge adulte.

Chaque mutation détermine un profil clinique spécifique, avec un âge d’apparition, des organes atteints et des symptômes qui lui sont propres. Les atteintes les plus fréquentes concernent le cœur et le système nerveux, provoquant respectivement une cardiomyopathie ou une neuropathie. Le tube digestif peut aussi être touché. D’autres organes sont parfois concernés, comme les reins, les yeux.

Certains porteurs de ces mutations génétiques ne développeront aucun symptôme, tandis que d’autres auront des symptômes légers, ou présenteront une forme sévère de la maladie.

La majorité des amyloses héréditaires sont liées à la transthyrétine, mais certaines peuvent impliquer d’autres protéines. Dans l’ensemble, ces maladies restent rares, avec une prévalence estimée à environ un cas pour 100 000 personnes.

ATTR de type sauvage : la forme non héréditaire

L’amylose à transthyrétine de type sauvage (ATTRwt pour wild-type ATTR) n’est pas liée à une mutation génétique. On parle de type sauvage car la protéine en cause est la forme naturelle (non mutée) de la transthyrétine TTR.

Bien que non mutée, cette protéine peut devenir instable, se replier anormalement et former des dépôts amyloïdes similaires à ceux observés dans les formes héréditaires.

Le mécanisme exact à l’origine de ce mauvais repliement n’est pas encore totalement compris, mais la perte de stabilité naturelle de la protéine avec l’âge semble être un facteur déterminant.

L’amylose à transthyrétine de type sauvage est ainsi associée au vieillissement. Elle touche principalement les hommes âgés, l’âge moyen au diagnostic se situant autour de 75 ans. Souvent sous-diagnostiquée, elle concernerait environ 1 % des hommes de plus de 80 ans.

Il s’agit d’une amylose systémique : des dépôts amyloïdes de transthyrétine peuvent se former dans l’ensemble de l’organisme. Lorsqu’ils concernent le cœur, ils rigidifient ses parois, ralentissant son remplissage et entraînant des troubles du rythme ou une insuffisance cardiaque.

Un syndrome du canal carpien peut parfois constituer un symptôme précoce de la maladie.

Dans la majorité des formes d’ATTR, le foie est la principale source de production de la transthyrétine. Bien qu’il ne soit généralement pas endommagé, c’est lui qui fabrique la protéine anormale à l’origine des dépôts. C’est pourquoi la transplantation hépatique a longtemps constitué le traitement de référence pour réduire ou stopper la production de TTR défectueuse.

Depuis quelques années, l’arrivée des thérapies à base d’ARN interférents (ARNi) a profondément transformé la prise en charge des formes héréditaires de la maladie.

Ces traitements reproduisent un mécanisme naturel de régulation cellulaire. Ils ciblent précisément l’ARN messager (ARNm) codant pour la synthèse de la protéine TTR, afin de bloquer à la source la production de cette protéine défectueuse.

Les traitements ARNi empêchent ainsi la formation de nouveaux dépôts sans altérer le patrimoine génétique, car ils agissent uniquement sur l’ARN messager, une copie transitoire de l’ADN.

L’ARNi permet donc de stabiliser la maladie, mais ne la guérit pas. Si le traitement est interrompu, la production de TTR reprend et la maladie recommence à progresser, c’est pourquoi on parle d’un traitement au long cours. De plus, les dépôts déjà présents ne sont pas éliminés. Le traitement doit ainsi être pris le plus tôt possible après le diagnostic.

Capables de cibler un ARN messager précis, ces traitements ARNi agissent uniquement sur les cellules du foie qui produisent cet ARNm cible, là où la TTR est produite, ce qui limite fortement les effets secondaires indésirables.

De plus, le risque de toxicité hépatique est extrêmement faible, car les vecteurs utilisés pour délivrer les ARNi sont biodégradables et ne s’accumulent pas dans les tissus.

Avec plus d’une décennie de recul, les traitements à base d’ARN interférents ont fait leurs preuves comme thérapie efficace, fiable et bien tolérée contre l’amylose à transthyrétine. Leur simplicité d’administration (par simple injection sous-cutanée) et leur sécurité d’emploi en font aujourd’hui une approche thérapeutique de référence dans l’hATTR aujourd’hui et, demain, peut-être, dans l’amylose sauvage.

Article rédigé en partenariat avec Alnylam