Les trois avocats marseillais espéraient créer une jurisprudence en attaquant sur citation directe Eric Tegner, le patron du média d’extrême droite Frontières, pour « divulgation d’information personnelle permettant d’identifier ou de localiser une personne et exposant à un risque indirect d’atteinte à la personne ou aux biens que l’auteur ne pouvait ignorer « . Un délit de « doxing » créé en 2021 en réaction à l’assassinat du professeur Samuel Paty et passible de 3ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.

En cause, un tweet daté de juillet 2024 au moment des élections législatives, publié sur le compte de Frontières, comptant alors 160 000 abonnés, comportant les identités des trois avocats Marseillais : « Avant même que les casseurs antifas ne dégradent toutes les villes de France trois avocats se rendent disponibles pour représenter les personnes interpellées ». Ceux-ci avaient seulement proposé leurs services sur des boucles professionnelles pour intégrer des « légales team » au cas où des gardes à vues auraient lieu, comme avant chaque mobilisation. Après le tweet de Frontières, ont raconté les plaignants à l’audience du 3 septembre dernier, ils avaient fait l’objet d’une campagne de cyberharcèlement et de menaces.

« L’État a une obligation de nous protéger »

Dans son délibéré rendu ce mercredi 22 octobre, le tribunal correctionnel de Marseille a toutefois opté pour une relaxe en estimant que les avocats avaient eux-mêmes accepté de « diffuser leurs noms et prénoms dans un contexte particulier » en se portant nommément volontaire par le biais d’une légale team. Et que par ailleurs, « l’intention » de ce « média d’opinion » d’exposer par le biais de ce tweet les avocats listés à « une atteinte directe » n’était « pas suffisamment caractérisé ».

« Le tribunal considère que, pour monsieur Tegner, on ne caractérise pas suffisamment qu’il a eu l’intention de livrer les avocats à la vindicte populaire. Mais nous nous interrogeons, quand il y a des commentaires qui écrivent qu’il faut les raser, monsieur Tegner ne se doutait pas que sa publication entraînerait cela ? Il a assimilé l’avocat à son client, il disait à ses lecteurs que les avocats contribuaient aux infractions », a réagi le Syndicat des Avocats de France (Saf) à l’annonce de la décision. » Quelle que soit la décision rendue aujourd’hui, devoir passer par une instance judiciaire pour nous protéger dans l’exercice de nos fonctions ne nous suffisait pas », a poursuivi le syndicat en appelant l’Etat à son « obligation de nous protéger »