Municipales 2026

En août dernier, différentes formations politiques alliées à la majorité écologiste strasbourgeoise lançaient le « Pôle de gauche ». Souhaitant un « tournant populaire », Alternative Alsacienne, Génération.s, Place Publique et le Parti communiste se sont réunis pour « pousser un projet politique plus audacieux ». Alors que les municipales s’accélèrent, rencontre avec Hülliya Turan, élue PCF et adjointe à l’éducation pour présenter l’initiative.

Dans la course aux municipales strasbourgeoises, pratiquement tout le spectre politique s’est désormais déclaré. À gauche, la seule incertitude reste les communistes, alliés de la majorité lors de l’élection de 2020. Dans un contexte où Jeanne Barseghian a été mise en difficulté par un premier sondage [plus vraiment d’actualité au vu des derniers changements politiques, ndlr], leur appui pourrait se révéler utile, voire nécessaire.

Et pour se préparer à l’échéance électorale en approche, le Parti communiste a fait le choix de créer un « Pôle de gauche » en août dernier, avec trois autres formations politiques, elles-aussi alliées à la majorité en 2020 : Alternative Alsacienne (représentée par Jonathan Herry), Génération.s (par Sophie Dupressoir) Place Publique (par Marina Lafay). Ce pôle est rejoint par le mouvement politique de l’Après, qui a comme volonté principale d’« outiller la municipalité pour un projet politique plus audacieux ».

1000049526 © PCF Bas-Rhin / Document remis

Pourquoi un tel « Pôle de gauche » ?

2020 a été une première expérience de mandat pour les élu(e)s communistes [il n’y en avait plus eu à Strasbourg depuis les années 60, ndlr]. Une première marquée par la création en avril 2022 d’un groupe politique distinct de celui des écologistes. Les communistes sont alors restés dans la majorité, votant avec les écologistes sur la majorité des grands projets, mais ne manquant pas de s’opposer sur plusieurs sujets, dont la politique de stationnement.

Avec les écologistes, on est d’accord sur la vision de la ville à horizon 2030-2050, mais les chemins pour y parvenir ne sont pas forcément les mêmes.

Hülliya Turan, élue communiste et adjointe à l’éducation

Si Hülliya Turan réfute le terme de « désaccords », préférant celui plus policé de « nuances d’appréciation », la volonté du « Pôle de gauche » s’inscrit dans cette même logique : soutenir, mais en allant plus loin dans les politiques mises en oeuvre. L’élue rappelle que « le contexte de 2026 n’est pas le même qu’en 2020 : l’urgence sociale que l’on a appelée de nos voeux de nombreuses fois durant le mandat est de plus en plus une réalité. » En ce sens, « les piliers démocratiques et sociaux de la majorité sont en retard et le pilier écologie doit être davantage tourné vers l’écologie populaire. »

Le « Pôle de gauche » pose un regard critique sur l’action passée du mandat écologiste : « Il y a évidemment eu de grosses avancées, mais pour aller plus loin, il faut être en capacité de dire où l’on s’est trompé. Par sincérité envers les électeurs/rices, pour corriger le tir et garder le cap clair par rapport à une politique qui défende les intérêts populaires. » En n’oubliant pas d’expliquer pourquoi de telles actions sont menées. Car comme le résume l’élue : « Il y a une nécessité de renouer un dialogue de proximité avec les Strasbourgeois(es). »

1000049527 © PCF Bas-Rhin / Document remis

Quelles propositions ?

Ainsi, le Pôle souhaite « pousser le curseur du projet politique plus à gauche et travailler collectivement à donner des perspectives aux Strasbourgeois(es). » Hülliya Turan y revendique « une radicalité qui permettrait d’améliorer la vie des gens. » Dans le détail :

  • La gratuité des transports en commun, notamment pour les moins de 25 ans sans revenus,
  • La gratuité des premiers mètres cube d’eau,
  • La reprise en main de la tarification du stationnement,
  • Le renfort des services publics pour mettre fin au sentiment d’un « Strasbourg à deux vitesses »,
  • Lutter contre la cherté de la ville,
  • Réfléchir plus en détails à une sécurité sociale de l’alimentation,


On ne peut pas faire le bonheur des gens sans les gens.

Hülliya Turan, élue communiste et adjointe à l’éducation

  • Décréter l’urgence sociale,
  • Rénover le bâti, résorber les îlots de chaleur dans les quartiers populaires,
  • Développer les aides aux mobilités et les rendre plus accessibles,
  • Affirmer le droit universel au logement et à l’hébergement digne, notamment en engageant un rapport de force avec la CEA et à l’État

En résumé, insérer « les questions de justice sociale au cœur de toutes les politiques municipales, en les articulant systématiquement aux enjeux écologiques et démocratiques ». Avec en tête, le projet « d’armer la future majorité de gauche pour un projet politique plus audacieux » et éviter « que la mairie tombe à droite et que des d’élu(e)s d’extrême droite n’arrivent au conseil municipal ».

Une démarche de soutien pour travailler à un vrai projet politique de gauche

Alors que la gauche ne partira pas unie aux municipales, Hülliya Turan assure que les communistes et leurs allié(e)s se placent pour l’instant davantage dans une démarche de rassemblement que dans une logique électoraliste. Selon l’adjointe à l’éducation, le « Pôle de gauche » a mené différentes discussions avec « tous les partis que l’on juge de gauche », citant LFI et les Écologistes, mais pas le PS.

On n’est pas du tout dans une démarche de jusqu’au-boutisme ; on ne veut pas faire une liste pour faire une liste, on veut la gauche unie rassemblée sur un projet politique clair porteur d’espoir.

Hülliya Turan, élue communiste et adjointe à l’éducation

Si ses différentes mesures et marqueurs le rapprochent davantage de LFI, le « Pôle de gauche » s’imagine pourtant davantage comme renfort de la politique de la majorité écologiste, en jouant le rôle d’un contrepoids pour la faire pencher plus à gauche. Hülliya Turan résume : « Pour l’instant on est plus dans la construction d’un projet politique avec davantage de marqueurs de gauche. On veut l’union la plus large possible, à la condition que on ait des gages sur nos marqueurs. »

Reste à voir comment la possible union du « Pôle de gauche » et des écologistes va s’opérer, alors que la situation politique a évolué. En 2026, en sortie de mandat, les Écologistes ne sont plus autant en position de force que par le passé. Et sans doute que les forces politiques composant le « Pôle de gauche » le savent, et voudront une place plus importante dans la liste. La composition de celle-ci et son programme seront donc très intéressants à observer, car ils seront témoins du rapport de force entre la majorité écologiste et ses allié(e)s.