Coup de pression sur les lots de bordeaux vendus à des prix indécents : les contrôles seront renforcés pour mettre sur le gril ces vins et vrac vendus plus de deux fois en dessous des coûts de production.

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u 31 mars au 13 avril derniers, les cours du Bordeaux rouge enregistrés par l’interprofession sont tombés à 894 euros le tonneau. Valorisé en moyenne à 927 € le tonneau, le millésime 2024

voit 9 % de ses volumes échangés en vrac à moins de 700 € : plus de deux fois en dessous du prix de revient modélisé par la Chambre d’Agriculture de Gironde ! « Nos prix restent bas, trop bas » reconnait amèrement Stéphane Gabard, le président des AOC Bordeaux et Bordeaux Supérieur, dans sa dernière lettre à ses adhérents. Pour « lutter contre ce fléau », l’Organisme de Défense et de Gestion (ODG) annonce « activer l’outil de contrôle sur les vracs à très bas prix ». Une décision qui « risque d’allonger les délais et de compliquer certaines transactions » prévient le vigneron de Galgon, qui l’assume : « face à une crise d’une telle ampleur, pouvons-nous rester les bras croisés ? Sommes-nous prêts à laisser mourir notre filière sans réagir ? »


Appelant ses ressortissants à faire bon accueil aux préleveurs de l’organisme de contrôle Quali-Bordeaux, Stéphane Gabard défend « un signal fort » pour « empêcher que certains produits repliés en Bordeaux ou que des opérations destructrices d’image ne tirent nos prix encore plus vers le bas, de manière injustifiée. Ces ventes ne bénéficient ni aux consommateurs ni aux producteurs — seulement aux intermédiaires. » Alors que le vignoble bordelais réduit fortement son potentiel de production (8 726 hectares à arracher par le plan girondin et 4 220 ha candidats à l’arrachage national) et que les millésime 2024 compte parmi les plus faibles volumes récoltés en Gironde après 2023 (moins de 900 000 hectolitres), « la valorisation de nos vins s’effondre. Sans justification technique, cette baisse des prix ne stimule ni les ventes, ni la consommation. Elle ne fait qu’appauvrir nos exploitations, mettant en péril des générations de travail et de savoir-faire » pointe le président des Bordeaux.

Jamais une crise n’avait été aussi dure et longue 


Si les plans d’arrachage ne permettent pas de revaloriser les vins malgré le rééquilibre entre offre et demande, Stéphane Gabard plaide pour l’accélération de la révision d’Egalim (suspendue au calendrier parlementaire incertain) et la mise en place d’Organisations de Producteurs (OP, qui divisent la filière), tout en surveillant l’outil de prix d’orientation pour les vins bio et HVE (porté par la coopération et déjà demandé par Pays d’Oc et Côtes-du-Rhône). « Notre filière viticole traverse l’une des périodes les plus critiques de son histoire » dresse Stéphane Gabard, pointant que « de mémoire de vignerons, jamais une crise n’avait été aussi dure et longue ».