Pacte de corruption ou extorsion ? Ce mercredi 23 avril, la représentante du ministère public Anne-Sophie Iarrouy a requis dix-huit mois de prison avec sursis, 10 000 € d’amende et une interdiction de territoire français pendant dix ans à l’encontre de Samir Altawill, ancien consul honoraire de Libye à Marseille. Absent lors des débats et non représenté, le haut fonctionnaire, qui avait contesté les faits devant les enquêteurs, est soupçonné d’avoir reçu des pots-de-vin de la part d’un entrepreneur réfugié syrien dans le cadre du chantier de rénovation du consulat situé dans le 8e arrondissement marseillais. Seul présent à l’audience, l’artisan âgé de 33 ans encourt douze mois de prison avec sursis, 5 000 € d’amende dont la moitié avec sursis et une interdiction d’exercice pendant cinq ans.
« Je n’avais pas le choix sinon il me tuait »
L’histoire commence début 2021 quand le maçon syrien est contacté par le chauffeur du consul pour postuler à un appel d’offres portant sur les travaux du consulat de Libye. Son dossier est retenu, le contrat signé, le chantier démarre le 15 mars. « Tout se fait en trois mois, résume la procureure Anne-Sophie Iarrouy. Tout roule mais c’était sans compter les promesses non tenues, les peurs, les angoisses… » Celles-ci se traduisent, en fin d’année, par un dépôt de plainte de l’entrepreneur portant sur des menaces proférées par le consul exigeant, selon ses dires, le versement d’une rétrocommission. « Je lui ai donné 5 700 euros en espèce, avoue l’artisan à la barre, sur questions de la juge Lola Vandermaesen. Je savais que c’était illégal mais je n’avais pas le choix sinon, il me tuait. » Le maçon affirme avoir été menacé de mort par le comptable du consulat et le consul lui-même, qui lui auraient rappelé qu »ils pouvaient (lui) faire comme on a fait au journaliste saoudien », en évoquant le cas de Jamal Kashoggi, tué au consulat d’Arabie saoudite à Istanbul en 2018.
Toujours d’après ses déclarations, les pressions ont continué après son dépôt de plainte, « quand il a su, il m’a dit qu’il allait payer quelqu’un un million d’euros pour me tuer », poursuit le trentenaire qui explique avoir également été contraint de fournir trois chèques d’un montant total de 40 000 euros, auxquels il a fait opposition. « J’ai quitté le chantier puis j’ai repris, il disait qu’il m’attaquerait pour non-exécution du contrat, qu’il était intouchable car il avait l’immunité diplomatique », explique encore le prévenu par la voix de son interprète.