l’essentiel
À 41 ans, Caroline Bascoul fait renaître la lecture à Montech (Tarn-et-Garonne) avec L’IrMiTi, un lieu de culture et de rencontres. Une création d’entreprise singulière…
À Montech, commune traversée par le canal des Deux-Mers, un nouveau lieu attire les regards depuis juin 2025. Derrière la grande baie vitrée du 18, avenue André-Bonnet, les passants découvrent un café-librairie au nom intrigant : L’IrMiTi. Trois syllabes qui sonnent comme une comptine et cachent un hommage intime – Iris, Milo, Timothée, les enfants de Caroline Bascoul, 41 ans.

Caroline Bascoul a ouvert L’IrMiTi en juin 2025. Montech retrouve ainsi une librairie et même un peu plus…
DDM – MANUEL MASSIP
Non, l’histoire n’a rien d’une lubie post-confinement. Pas de reconversion hâtive ni de rêve d’exode né d’un ennui sanitaire. Le projet, Caroline le couvait depuis des années : « C’était dans un coin de ma tête, je savais qu’un jour il verrait le jour, dans le bon lieu et au bon moment », raconte-t-elle.
Médiatrice culturelle de formation, nourrie d’art et de rencontres, elle a longtemps vadrouillé – Lille, Aveyron, Normandie, Alpes, Aude – avant de poser ses valises à Montech il y a six ans, pour raisons professionnelles.
Le pari du livre
Dans cette ville sans librairie depuis la fermeture de la maison de la presse en 2019, elle a vite repéré le manque. « On m’interpellait souvent : Vous savez où on peut acheter un livre ici ? », se souvient-elle. Ce fut le déclic. Contact avec l’Agence régionale du livre, rendez-vous à la mairie, accompagnement par la CCI : le projet prend forme.
En 2024, elle réalise son étude de marché, affine sa connaissance du territoire, apprend à pitcher et finit même par décrocher le prix 2025 Venez pitcher votre projet, qui récompense le créateur d’entreprise le plus convaincant.
Puis tout s’enchaîne : la recherche du lieu, la formation à la reconversion, le crowdfunding, les travaux, la création d’une identité graphique, d’un programme d’événements culturels. Un an de chantier plus tard, la maison de ville est métamorphosée en un cocon de lecture, baigné de lumière et d’odeur de café.
L’IrMiTi, un lieu à soi
Dans les deux pièces de la boutique, près de 4 000 références s’alignent : romans, albums jeunesse, essais, poésie. Un coin lecture pour les enfants, des tables en bois, quelques fauteuils dépareillés. On y commande son livre comme son cappuccino. On s’y attarde pour feuilleter, discuter, respirer un peu.
« Je voulais un lieu accessible à tous, ouvert aux familles, où l’on puisse ralentir », explique Caroline. Ce n’est pas seulement une librairie, c’est une halte : une parenthèse dans le vacarme ambiant. Les enseignants des collèges et lycées du secteur passent commande, les curieux s’y réfugient, les habitués s’y retrouvent. Le café bruisse doucement des conversations du jour.
Un militantisme tranquille
Ouvrir une librairie aujourd’hui, à l’heure où la lecture recule et où le numérique avale tout, relève du geste militant. Caroline l’assume : « Faire circuler des livres, proposer un éclectisme éditorial, offrir un accueil en sourires… c’est ma façon de résister. »
Elle ne vit pas encore de sa librairie, mais qu’importe : L’IrMiTi vit. Et dans cette ville traversée de voitures pressées, elle a créé un point fixe, un espace de lenteur. « Le passé nous vient de traces écrites, la lecture est associée aux émotions. Il faut transmettre cela aux générations futures, pour apprendre à ralentir dans le tumulte de nos vies. »
Entre deux étagères, un client commande un roman, un autre demande un thé. Au mur, un mot écrit à la craie : « Ici, on prend le temps. » Tout est dit.