(Londres) Le géant américain Apple a perdu jeudi un procès à Londres pour « abus de position dominante » de son magasin d’applications au Royaume-Uni, qui pourrait le conduire à devoir rembourser des millions d’utilisateurs, mais le groupe conteste la décision et fera appel.

Publié à 14 h 37

Partager

Olivier DEVOS

Agence France-Presse

Les demandeurs, qui se plaignaient notamment de commissions jugées trop élevées prélevées par Apple sur son App Store, avaient précédemment chiffré les dommages à plus de 1,5 milliard de livres (2,8 milliard de dollars CAN).

Apple a « abusé de sa position dominante en empêchant la concurrence » sur la distribution d’applications et les services de paiement intégrés, mais aussi en facturant des commissions aux « prix excessifs et inéquitables », indique le jugement du Tribunal d’appel de la concurrence, consulté par l’AFP.

Il s’agit de la deuxième déconvenue en deux jours au Royaume-Uni pour le groupe de Cupertino, qui a été désigné mercredi par l’autorité britannique de la concurrence (CMA) comme une « société stratégique » sur le marché des écosystèmes pour téléphones intelligents et tablettes en raison de sa position dominante.

Si cette désignation, aux côtés de Google, n’entraîne aucune exigence immédiate, elle permettra dans un second temps à la CMA d’intervenir pour contraindre les groupes visés à ouvrir leurs plateformes, en vertu d’un régime qui s’inspire du Règlement européen sur les marchés numériques (« Digital Markets Act », DMA) dans l’UE.

« Profond désaccord »

Apple, qui avait déjà regretté la décision de la CMA, dit jeudi être en « profond désaccord » avec le jugement du tribunal londonien, estimant que sa boutique d’applications, l’App Store, « est confrontée à une concurrence féroce de la part de nombreuses autres plateformes ».

Le groupe a indiqué à l’AFP son intention de faire appel.

Les plaignants dénonçaient notamment le fait qu’Apple « exige que toutes les applications natives », c’est à dire conçues spécifiquement pour son système d’exploitation, soient distribuées dans l’App Store, avec une commission de 30 % « imposée sur les applications achetées » via ce magasin d’applications.

Le dossier était porté par Rachael Kent, universitaire au King’s College de Londres, mais selon la loi britannique, dans ce type d’action collective, toutes les personnes potentiellement concernées sont incluses par défaut dans la procédure (et pourraient bénéficier d’une compensation) à moins de s’en retirer volontairement.

Le tribunal a notamment estimé jeudi que, dans les cas où Apple a surfacturé les développeurs d’applications et où cette surcharge a été répercutée sur les consommateurs, ceux-ci étaient fondés à en obtenir le remboursement avec intérêts.

Multiples plaintes

Le procès avait duré sept semaines en janvier et février et la décision, qui a vocation à s’appliquer à des millions de détenteurs d’iPhone ou d’iPad ayant utilisé les fonctionnalités payantes de l’App Store au Royaume-Uni à partir de fin 2015, avait été mise en délibéré.

Apple avait dénoncé pendant le procès une procédure « sans fondement », insistant sur le fait que 85 % des applications sur l’App Store sont gratuites et que les commissions appliquées sont en réalité « très proches de celles facturées par toutes les autres places de marché numériques ».

Les enquêtes et les plaintes se sont multipliées dans le monde contre Apple ces dernières années, en particulier au sujet de son magasin d’applications.

Le géant américain est ainsi visé par une autre procédure à 785 millions de livres (1,5 milliard CAN) au Royaume-Uni sur les tarifs facturés aux développeurs.

Apple s’est par ailleurs vu infliger en avril une amende de 500 millions d’euros (812 millions CAN) dans l’UE pour des clauses abusives dans l’App Store, au détriment des fournisseurs d’applications et de leurs clients, contre laquelle le groupe a fait appel.