« À deux secondes près, je pouvais le renverser, pourtant je n’ai pas démarré vite mais il était dans l’angle mort et aucune loupiote n’a attiré mon attention. » Véronique a encore des sueurs froides en repensant à l’accident qu’elle aurait pu provoquer il y a quelques semaines. Ce matin-là, il est encore tôt et cette habitante de Bois-Colombes (Hauts-de-Seine) prend le volant alors que le jour n’est pas encore levé.

Après une halte chez le boulanger, elle redémarre et entend un cri : un cycliste qui la doublait sur sa droite. « Il avait un vieux vélo ressorti de sa cave et a convenu qu’il fallait qu’il s’équipe en phares », se souvient Véronique. Après un geste d’excuse, l’automobiliste et le deux-roues se séparent en bons termes. Mais à quelques secondes près le cycliste aurait pu être renversé.

Alors que la France va basculer à l’heure d’hiver ce week-end, la période est souvent jugée dangereuse par les amateurs de vélo. « À l’heure de sortie des bureaux, entre chien et loup, la luminosité baisse. Je suis toujours plus vigilant parce que ça peut vite être dangereux sur la route », explique Marc, un quadra qui utilise chaque jour son vélo pour parcourir les 15 km qui séparent sa maison de son bureau de consultant.

Éviter les vêtements sombres

Ce sentiment de vulnérabilité sur la voie publique est particulièrement marqué chez les cyclistes (90 %), les usagers de deux-roues motorisés (84 %), les piétons (83 %) et les utilisateurs de trottinettes électriques (EDPM) (82 %) d’après une étude réalisée par Toluna Harris Interactive pour l’association Assurance prévention qui regroupe les compagnies d’assurances.

« Beaucoup de personnes qui se sont mises au vélo au printemps pour profiter du beau jour déchantent un peu au moment du passage à l’heure d’hiver. Certaines décident même de reprendre le métro », admet Geneviève, formatrice pour une école de vélo.

Un blocage psychologique qui peut être dépassé en adoptant des réflexes sécurisants. « Il faut éviter de s’habiller avec des vêtements sombres et essayer d’emprunter au maximum les axes les mieux éclairés sans rester sur le bas-côté », préconise cette professeure. Et, surtout, ne pas oublier, de vérifier le bon état de son deux-roues. « Il faut s’assurer que les phares de son vélo sont bien propres, en état de marche et qu’on a tous les équipements obligatoires », rappelle Geneviève.

« Les gens peuvent aussi rajouter des dispositifs réfléchissants à poser sur les roues ou sur le vélo : ça, il n’y en a jamais trop. Et même si en ville, le gilet n’est pas obligatoire, c’est un accessoire qu’on peut glisser facilement dans son sac et qui s’enfile rapidement », conseille Aymeric, instructeur aux cours organisés par l’association Mieux se déplacer à bicyclette (MDB).

Éviter la « surenchère »

En revanche pour ces deux pros du vélo, mieux vaut éviter de multiplier les éclairages clignotants supplémentaires. « C’est parfois contre-productif : ça peut donner l’impression aux cyclistes qu’ils sont plus en sécurité et réduire leur vigilance, juge Geneviève. Et parfois, ça vire à la surenchère, il y a trop de lumières et ça perturbe la vigilance des autres usagers de la route. Un peu comme ces motards qui klaxonnent lorsqu’ils dépassent une voiture. »

Au-delà de ces conseils de bon sens, la Fédération française des usagers de la Bicyclette (FUB) aime à rappeler que la sécurité routière est une responsabilité collective qui ne doit pas reposer que sur les épaules des cyclistes. « Il y a souvent une forme de cycliste bashing qui consiste à dire : si vous avez eu un accident, c’est parce que vous êtes mal éclairés. Mais la sécurité des usagers de la route les plus vulnérables est collective. Les collectivités locales ont un rôle crucial à jouer, notamment dans la qualité des pistes cyclables qu’elles aménagent, et les automobilistes ont aussi un devoir de vigilance », insiste Angèle Radjagobal, responsable « outils et méthode » à la FUB.

Une période dangereuse aussi pour les piétons

D’autant que les cyclistes ne sont pas les seuls concernés par la baisse de visibilité décuplée par le changement d’heure. C’est aussi une période plus dangereuse pour les piétons. Selon une étude de l’Observatoire national interministériel de la sécurité réalisée l’an dernier, 43 % des décès de piétons surviennent entre octobre et janvier. Et le nombre d’accidents impliquant un piéton augmente de 34 % entre 17 heures et 19 heures après le passage à l’heure d’hiver.

L’association Assurance prévention organisera d’ailleurs ce vendredi 24 octobre (de 7 heures à 10 heures et de 16 heures à 19 heures) et ce samedi (de 8 heures à 11 heures et de 16 heures à 19 heures) à Paris (place de la Bastille, place République et gare Saint-Lazare) une opération de sensibilisation auprès des piétons, cyclistes et « trottinistes » en distribuant des stickers rétroréfléchissants, porte-clés, et brassards LED.