Par
Antoine Blanchet
Publié le
24 oct. 2025 à 10h49
Vers la peine maximale. Ce vendredi 24 octobre 2025, au dernier jour du procès du meurtre de Lola à Paris, les mots de l’avocat général sont tombés comme la foudre sur la salle d’audience. Le dernier et terrible grondement de son réquisitoire a réclamé ce que l’arsenal judiciaire a de plus terrible. La réclusion criminelle à perpétuité a été requise avec une période de sûreté incompressible. Dahbia Benkired pourrait passer le reste de sa vie derrière les barreaux. Une interdiction définitive de territoire français a aussi été prononcée à son encontre.
« Elle en veut au soleil de continuer à rayonner »
La veille, les plaidoiries des avocats des parties civiles ont déjà noué l’estomac du prétoire. Sans dissimuler leur émotion, Mes Karine Bourdié et Clotilde Lepetit ont de nouveau fait résonner la voix de cette famille balayée par l’horreur. « Je suis là depuis trois ans. C’est un trou d’empathie. Delphine (la mère de la victime), elle en veut au soleil de continuer à rayonner. Comme s’il était indifférent. Comme s’il avait oublié sa Lola », clame d’une voix étranglée Me Clotilde Lepetit.
Dans les mots de la pénaliste, on revit ces 1h37, « le temps d’un film » dira l’une des avocates, où la vie de Lola se conclut dans un cauchemar. « Aurait-on pu prévoir ça ? Aurait-on pu imaginer que ce jour-là, c’était Lola qui n’avait comme seule défense qu’un cartable ? Une fillette qui a dit « ne me faites pas de mal » avec une marée d’eau salée dans les yeux ? Une fillette dont le corps a tremblé avant d’en faire trembler la terre ? », assène Me Lepetit.
L’insupportable « coffre-fort » mémoriel de l’accusée
Les mots des deux avocates de la famille deviennent amers à l’évocation de l’attitude de l’accusée pendant ces six jours éprouvants. Enfermée dans ses contradictions, Dahbia Benkired n’a pas répondu aux attentes de vérité de la famille meurtrie. Face à ce vide insupportable, Me Karine Bourdié cite Annie Ernaux : « J’ai mis beaucoup de temps parce qu’il ne m’était pas aussi facile de ramener au jour des faits oubliés que d’inventer. La mémoire résiste ». « Ce que je sais. Ce que je crois, c’est que la vôtre Dahbia Benkired, c’est un coffre-fort vérité », poursuit la pénaliste.
Pour l’avocat général, une possible tueuse en série ?
Dans son réquisitoire, l’avocat général fustige avec ironie les multiples mobiles égrenés par l’accusée durant les débats. « Il y a quelque chose de très contentant pour elle à être la seule à avoir les réponses », affirme le magistrat. Depuis son box, l’accusée le fixe avec un regard noir.
Après avoir relaté lui aussi ces 1h37 de crime, le représentant de la société revient sur un détail, macabre, qui avait suscité bien des questions : Les chiffres 0 et 1 marqués sur la plante des pieds de la victime. Si l’accusée a expliqué avoir voulu « faire comme au bled », le magistrat y voit une marque bien plus sinistre, celle d’une potentielle tueuse en série. » Le 15 octobre 2022, lorsque j’ai reçu l’appel de la brigade criminelle pour me signifier l’interpellation, j’avais en tête le 0 et 1. Mon analyse, c’est qu’ils étaient pour moi un décompte funèbre », confesse le magistrat, qui évoque le risque de récidive élevé pointé du doigt par les experts psychiatres.
Pour l’avocat général, c’est l’action de la famille Daviet qui a permis d’éviter de nouveaux crimes : « Si Delphine ne s’était pas précipitée au commissariat, Johan aux caméras, l’action policière n’aurait pas été aussi importante. C’est pas facile à dire, mais les disparitions de collégiennes la veille de weekend, c’est assez courant ».
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La peine maximale
Ces faits d’une extrême gravité, le magistrat demande aux jurés à ce qu’ils soient punis au maximum. « Une peine certainement pas par haine. Par méchanceté ou par une pression extérieure qui n’a pas lieu d’être, mais en responsabilité pour protéger la société d’une femme dont je suis intimement convaincue de sa dangerosité ».
Il demande alors la réclusion criminelle à perpétuité avec une période de sûreté incompressible. Cette peine, très rare, n’a été prononcée que quatre fois dans des affaires de droit commun. L’avocat général demande aussi une interdiction définitive de porter une arme et d’exercer une activité avec des mineurs. De plus, il réclame une interdiction de territoire français à l’encontre de l’accusée. Sans aucune émotion, Dahbia Benkired encaisse la charge.
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