C’est une première historique : des composés essentiels à la vie, comme l’éthanol ou l’acide acétique, ont été repérés en dehors de notre galaxie. Grâce au télescope James-Webb, on découvre que la chimie organique pourrait exister dans tout l’Univers, même dans des environnements très différents du nôtre.

Champ d’étoiles et nébuleuse lumineuse dans l’espace profond, aux teintes violettes et bleutéesUn spectacle céleste époustouflant : cette nébuleuse brillante s’étend au cœur d’une galaxie, entre volutes de gaz colorés et milliers d’étoiles scintillantes – DailyGeekShow.com

Pourquoi le Grand Nuage de Magellan est un témoin précieux de l’Univers jeune

Imaginez une galaxie satellite de la nôtre. Elle flotte à 160 000 années-lumière de la Terre, comme une luciole gravitant autour d’un feu de camp. C’est le Grand Nuage de Magellan. Dans cette galaxie naine, bien moins riche en éléments lourds que la Voie lactée, des étoiles se forment dans des conditions proches de celles de l’Univers primitif.

C’est précisément là que le télescope spatial James-Webb, grâce à son instrument MIRI (Mid-Infrared Instrument), a capté des signaux inédits autour d’une jeune étoile en formation appelée ST6. Le plus fascinant ? Ces signaux trahissent la présence de molécules organiques complexes (MOC) figées dans la glace entourant cette protoétoile. Il s’agit d’une première au-delà de notre galaxie.

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Quels types de molécules ont été détectés et pourquoi c’est une avancée majeure

Le catalogue de cette trouvaille est loin d’être anodin. On y trouve du méthanol, de l’éthanol, de l’acide acétique, du formiate de méthyle et de l’acétaldéhyde. Sur Terre, ces molécules sont courantes dans notre quotidien ou dans les industries. Mais dans l’espace, surtout à l’échelle galactique, leur détection est un événement marquant.

Par ailleurs, Marta Sewilo, astrophysicienne à la NASA, explique que la qualité du spectre infrarouge recueilli est telle qu’on peut affirmer la présence de ces composés avec confiance. De plus, un autre signal intrigue les chercheurs. Il pourrait s’agir de glycolaldéhyde, un sucre simple impliqué dans la formation de l’ARN. Toutefois, cette piste reste encore à confirmer.

En résumé, cela suggère que la chimie prébiotique, celle qui précède l’apparition de la vie, pourrait être bien plus universelle qu’on ne le pensait.

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Comment la vie pourrait émerger dans un environnement pourtant pauvre en éléments

Ce qui rend la découverte encore plus passionnante, c’est le contexte dans lequel elle a été faite. En effet, le Grand Nuage de Magellan possède trois fois moins d’éléments lourds que notre galaxie. Ces éléments, carbone, azote, oxygène, sont pourtant les briques fondamentales des molécules de la vie.

Alors, comment expliquer une telle richesse moléculaire dans un milieu aussi « pauvre » ? Justement, c’est là toute la puissance du James-Webb. Il nous montre que même dans des environnements extrêmes, la chimie organique peut s’installer et se développer. Ainsi, ce que nous observons là est peut-être une photographie fidèle de ce que la Voie lactée était il y a des milliards d’années.

Ce que cette découverte change dans notre vision de la vie ailleurs dans l’Univers

L’un des plus beaux enseignements de cette découverte, c’est qu’elle remet en question notre perception de l’unicité de la vie. Si ces molécules organiques complexes sont présentes dans une autre galaxie, dans des conditions très différentes des nôtres, alors pourquoi la vie ne surgirait-elle pas ailleurs ?

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Certes, cela ne signifie pas que la vie grouille dans le cosmos. Cependant, cela renforce l’idée que les briques de la vie peuvent se former partout. Hubert Reeves penchait déjà pour cette hypothèse. De son côté, Jean-Pierre Bibring reste plus sceptique. Quant à moi ? Je me demande si, dans quelques décennies, nous ne considérerons pas cette découverte comme un tournant majeur dans la quête de nos origines cosmiques.