Chaque nouvelle étude sur le microbiote apporte son lot de révélations. Mais cette fois, la surprise est totale. Des chercheurs viennent de mettre en évidence chez la souris que le cerveau est capable de moduler significativement et très rapidement le microbiote intestinal.

C’est une découverte étonnante que viennent de faire des chercheurs. On sait depuis une quinzaine d’années que les micro-organismes vivant dans notre intestin – le fameux « microbiote intestinal » – sont capables de moduler le fonctionnement du cerveau.

Les métabolites produits par les bactéries quand elles fermentent les débris alimentaires peuvent stimuler les cellules de l’intestin qui vont répondre en produisant des hormones et des neurotransmetteurs (sérotoninesérotonine, par exemple) capables de transmettre des messages au cerveaucerveau. Les métabolites bactériens peuvent aussi être libérés dans la circulation sanguine et être transportés jusqu’au cerveau où ils vont pouvoir moduler le fonctionnement des neuronesneurones.

Cet « axe microbiote-intestin-cerveau » est, on le sait aujourd’hui, impliqué dans la régulation de l’appétit, de la dépense énergétique et du métabolismemétabolisme du glucoseglucose et des lipideslipides.

Mais est-ce que le cerveau est capable, à l’inverse, de moduler le microbiote ? Cette question était totalement énigmatique… jusqu’à aujourd’hui. Des chercheurs viennent en effet de démontrer l’existence d’un « nouvel axe cerveau-intestin inattendu qui ajuste de manière aiguë la composition du microbiote à des échelles de temps rapides ».

L’hypothalamus, centre de régulation de l’appétit

En temps normal, les zones du cerveau qui contrôlent l’appétit, situées dans l’hypothalamushypothalamus, s’allument en cas de faim et s’éteignent quand l’organisme est rassasié. Lorsque l’hypothalamus est en position « off », le corps puise dans ses réserves d’énergieénergie, ce qui permet de réguler le poids. Chez les personnes souffrant de diabète de type 2, ce système « on/off » dysfonctionne, l’information de satiété n’est pas transmise correctement, ce qui explique une tendance à l’obésitéobésité.

Pour mieux comprendre ce dysfonctionnement, les chercheurs ont analysé 1 500 échantillons de microbiote de souris équipées d’implantsimplants cérébraux capables d’injecter des hormones de l’appétit (ghréline, leptineleptine et GLP-1) directement dans l’hypothalamus. Objectif : évaluer comment le blocage ou au contraire l’activation des neurones de l’appétit influence le microbiote.

Le saviez-vous ?

La ghréline et la leptine sont qualifiées d’« hormones de la faim ».

La ghréline, sécrétée par l’estomac, stimule l’appétit. On dit qu’elle est orexigène. Son taux est élevé avant le repas et s’abaisse au fur et à mesure du repas. La leptine, sécrétée par le tissu adipeux, mais également sous forme de « flash » par l’estomac, diminue la sensation de faim. On dit qu’elle est anorexigène.

Toutes les deux agissent sur l’hypothalamus pour réguler la prise alimentaire.

Un système adaptatif hypersensible

Les résultats, publiés dans la revue Nature Metabolism, indiquent que le blocage ou l’activation des neurones de l’hypothalamus grâce aux hormones de la faim modifient fortement, mais surtout très rapidement (deux heures) le microbiote, avec des augmentations ou au contraire des diminutions très nettes des différentes souches bactériennes.

C’est le caractère rapide et significatif de ces changements qui a le plus surpris les chercheurs. Il s’agirait en effet d’un système adaptatif ultra-sensible, bien plus réactifréactif qu’on ne le pensait. Ainsi, les bactériesbactéries répondraient aux signaux neuronaux avec la même intensité que si elles avaient reçu des nutrimentsnutriments.

Vers de nouvelles pistes thérapeutiques

L’expérimentation des scientifiques montre aussi que chez les souris qui étaient obèses et diabétiquesdiabétiques, cette influence du cerveau sur le microbiote n’avait pas lieu. Cette absence de communication pourrait être en lien avec l’altération des signaux de faim et de la prise alimentaire dont souffrent souvent les personnes en grand surpoidssurpoids.

Pour les chercheurs, « ces observations représentent un changement de paradigme, car elles introduisent le cerveau comme un modulateur actif de la plasticitéplasticité et de la composition du microbiomemicrobiome en réponse à des signaux métaboliques ». Si elles représentent un point de départpoint de départ passionnant pour de nouvelles recherches, elles ouvrent aussi la porteporte à de potentielles nouvelles cibles thérapeutiques pour la prise en charge des troubles métaboliques comme le diabètediabète ou l’obésité.