Par

Clémence Pays

Publié le

26 oct. 2025 à 10h40

Quelques vases aux styles disparates, une sculpture et des tableaux tiennent compagnie aux livres présents dans le bureau de Pierre-Guillaume Klein, à Rennes. C’est dans cette pièce que souvent le commissaire-priseur passe de longs moments à analyser chaque détail des objets qu’on lui confie, dans l’espoir d’y découvrir une valeur insoupçonnée. « Vous voyez ce vase, il est en verre. Il y a une signature d’Émile Gallet, mais à côté, il y a une petite étoile. Ça, ça veut dire que le vase a été fait après la mort du verrier », explique avec enthousiasme Pierre-Guillaume Klein. Cet entrain face à l’art et à ses moindres détails est apparu dès l’enfance chez l’homme passé par l’école du Louvre et bientôt coanimateur d’une émission de télévision.

Le déclic face à une œuvre d’art

C’est à 12 ans que Pierre-Guillaume Klein a su qu’il voulait devenir commissaire-priseur. Déjà, le jeune garçon est passionné d’histoire et découvre les salles des ventes grâce à ses parents. Un jour, alors qu’il visite la Galerie Borghèse à Rome, Pierre-Guillaume Klein est frappé par une œuvre : L’Enlèvement de Proserpine, de Le Bernin.

« J’ai eu ce qu’on appelle le syndrome de Stendhal (1). Et je me suis dit : c’est merveilleux, mais je ne peux pas le toucher. J’ai trouvé ça triste », se souvient le commissaire-priseur. Aujourd’hui encore, lorsqu’il revoit cette œuvre en photo « même si ça ne rend pas aussi bien », il s’émerveille devant le travail du marbre.

J’ai fait toutes mes études en fonction de ça.

Pierre-Guillaume Klein
Commissaire-priseur à Rennes

Après son bac, Pierre-Guillaume Klein se dirige donc vers des études de droit à Cholet et Angers pour acquérir les notions juridiques nécessaires à la profession. Il intègre ensuite l’École du Louvre, « une formation complète et passionnante ».

Une formation dense au Louvre

Après trois années au Louvre, le Rennais tente l’examen d’entrée à la formation de commissaire-priseur. Celui-ci repose sur deux épreuves écrites, l’une sur des sujets juridiques, l’autre sur la connaissance des arts et techniques. « C’est vaste comme sujet », se remémore Pierre-Guillaume Klein.

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Finalement, il accède à la formation. « Pour l’examen de première année, on doit faire un tour de salle à l’Hôtel Drouot. On nous présente 20 objets au hasard dans la réserve et on doit faire des fiches dessus. À l’époque, c’était effrayant. »

Au fil des expériences et de la formation, ce qui était source d’appréhension devient un plaisir.

Plus on voit d’objets et on découvre de choses, plus on prend conscience de sa parfaite ignorance.

Pierre-Guillaume Klein
Commissaire-priseur à Rennes

Vient l’examen final. « Puis le Graal, on a le droit de diriger sa première vente. » Pour Pierre-Guillaume Klein, ce moment tant attendu est arrivé un jour de janvier 2019, à l’Hôtel Drouot, alors qu’il était en stage dans une étude à Saint-Cloud. Son tuteur lui a fait confiance « parce que lâcher son marteau, c’est quelque chose ». Malgré « le stress », cette première vente est un moment « plus qu’émouvant » et signe le début officiel de la carrière de l’homme désormais âgé de 36 ans.

Connaître le maximum d’objets

En mars 2020, il rejoint Ouest Enchères Publiques à Nantes, en vue de s’associer avec Juliette Jourdan et Alban Perdereau. En 2021, Pierre-Guillaume Klein quitte la cité des ducs de Bretagne direction la capitale bretonne pour ouvrir un nouvel hôtel des ventes à Rennes.

Lors d'une vente
Lors d’une vente « on met un objet devant les gens pendant une minute. Il faut expliquer son histoire et pourquoi il est intéressant », raconte Pierre-Guillaume Klein. (© Clémence Pays/actu Rennes)

La vente aux enchères, « c’est la partie immergée de l’iceberg », recontextualise le commissaire-priseur. « Mon quotidien, c’est aller faire des inventaires dans le cadre de successions, pour les assurances, ou simplement chez des gens qui ont des choses à vendre. »

Je suis toujours sur la route. Ma voiture, c’est mon bureau.

Pierre-Guillaume Klein
Commissaire-priseur à Rennes

Lors de ces inventaires, Pierre-Guillaume Klein l’admet : il « ne tombe pas toujours sur des Caravage ». Si certains de ses cours au Louvre étaient dispensés devant des œuvres reconnues, il a aussi fait des stages, « pour se faire un réseau, mais aussi connaître les choses qui ne sont pas muséales, mais intéressantes. Il faut appréhender le maximum de choses ».

La passion du « beau »

Quoi qu’il en soit, ce métier doit se faire par passion « du beau et du sens de l’esthétisme, pas pour l’argent ».

Les gens nous font confiance. On pénètre dans leur intimité. On essaye de connaître l’histoire : est-ce que c’est un objet de famille, est-ce qu’il a été chiné ?

Pierre-Guillaume Klein
Commissaire-priseur à Rennes

Parfois, le professionnel doit aussi faire des recherches de son côté pour comprendre l’origine d’un vase, d’un meuble ou d’une assiette. « Si on ne connait pas l’Histoire, on ne peut pas comprendre. Par exemple, en Bretagne, on trouve beaucoup d’objets d’Afrique et d’Indochine. Cela peut s’expliquer par le fait qu’il y a beaucoup de marins et de militaires. »

Des déceptions et des trésors

Le résultat des expertises n’est pas toujours à la hauteur des espoirs des propriétaires. « Les situations sont parfois difficiles, quand il y a une croyance autour de certains objets. On casse un peu un rêve », raconte avec émotion Pierre-Guillaume Klein.

Et parfois, « on découvre des trésors ». Comme une assiette achetée deux euros en brocante par « une dame » et vendue « plus de 7 000 euros aux enchères ». « Ça m’a touché parce que cette dame était ravie de son achat et elle voulait juste savoir ce qu’elle avait acheté à la brocante. C’était un super moment. »

Il faut rester humble. On peut être surpris par un objet, comme face à un moulin à épices adjugé à 15 000 euros.

Pierre-Guillaume Klein
Commissaire-priseur à Rennes

Il y a aussi des moments historiques, comme en avril 2025, lorsqu’un particulier dépose une boîte en bois oubliée dans un grenier, dans laquelle sont entassés de nombreux manuscrits. Après expertise, Pierre-Guillaume Klein est formel : ils sont signés de la main de Jean Jaurès. Lors de la vente, l’un de ces documents a trouvé preneur pour la coquette somme de 2 900 euros.

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«Cette découverte restera un bon souvenir, parce que pour moi, ça a été un sauvetage in extremis », confie le commissaire-priseur.

Et qui sait, des sauvetages et trésors, il y en aura peut-être d’autres. Certains seront peut-être même filmés puisque Pierre-Guillaume Klein a été contacté pour co-animer une émission bientôt diffusée à la télévision.

(1) Trouble psychosomatique, forte émotion éprouvée face à une création artistique.

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