Sa silhouette est bien connue des supporters du Stade Rennais. Longiligne, les cheveux blonds et une moustache fournie, Erik van den Boogaard fait partie de ces attaquants qui ont enchanté le stade de la route de Lorient dans les années 80 finissantes. 55 buts en 98 matchs avec les Rouge et Noir, de la classe et du tempérament, à une époque où le club de la capitale bretonne n’était pas la propriété d’une des plus riches familles de France mais portait le nom du laboratoire pharmaceutique Pfizer et zonait entre la D2 et la D1.

Trente-cinq ans plus tard, VDB (son surnom) est toujours là. Quand la grande majorité des chouchous du public plie bagage une fois leur contrat terminé, lui a décidé de revenir s’installer ici. De retour en Bretagne depuis 2019, c’est à Gévezé, au nord de Rennes, qu’il s’est installé. Et c’est au bar-PMU Le relais des amis, dans le bourg, qu’il donne rendez-vous.

Erik van den Boogaard lors de la saison 1988-1989.Erik van den Boogaard lors de la saison 1988-1989. (Photo d’archives Le Télégramme)« Les gens me parlent plus de ma moustache que de mes buts »

À 61 ans, la silhouette est toujours longiligne, la tignasse est toujours blonde. La moustache, elle, a disparu. « C’est hallucinant, les gens me parlent plus de ma moustache que de mes buts ! Je l’ai rasée à 28 ans à la naissance de ma fille. Et quand je suis revenu vivre ici, c’est la première chose qu’on m’a demandée : » Elle est où ta moustache ? « L’enlever, c’est la meilleure décision de ma vie », se marre le Néerlandais au français impeccable.

Mais qu’est-ce qu’un joueur de football hollandais peut-il bien faire dans un petit bourg du nord de Rennes ? « J’ai toujours su que j’allais revenir. Je suis tombé amoureux de la région lors de mon passage au Stade Rennais, et surtout de la côte, Saint-Jacut, Dinard, Saint-Briac. J’ai attendu que mes filles, qui vivent en Hollande, soient indépendantes, pour revenir. » Affable, VDB est comme chez lui dans son petit bistrot du bourg, où il serre la pogne ou claque la bise à tout le monde en buvant son café. « C’est ça aussi la Bretagne, des petits bars, des rapports simples. J’ai été très bien accueilli ici, cette commune a une âme. »

J’ai arrêté ma carrière à 28 ans, dégoûté par le milieu après que mon entraîneur à Lausanne m’a accusé d’avoir abandonné l’équipe alors que j’assistais à l’accouchement de ma femme. Je n’ai plus joué un match depuis.

Arrivé à la soixantaine, l’ancien joueur du PSV Eindhoven et coéquipier du Ballon d’Or Marco Van Basten en sélection de jeunes n’est pourtant pas revenu en Bretagne pour couler une retraite paisible. Entrepreneur, il a créé VDB Concept il y a quatre ans. « L’idée, c’est de mettre en relation les entreprises bretonnes et hollandaises qui veulent travailler à l’étranger. »

Bientôt monsieur le consul ?

Mais ça ne s’arrête pas là puisque le Néerlandais est également community manager de plusieurs commerces locaux. « J’adore communiquer et assez actif sur les réseaux sociaux. Quand je suis arrivé à Gévezé, j’ai vu qu’il n’y avait pas de vie digitale sur les réseaux sociaux, alors j’ai créé les pages « Tu es de Gévezé si » et « Gévezé et ses alentours ». C’est avant tout pour faire plaisir, les assos y partagent leurs évènements, les particuliers mettent des annonces quand ils ont perdu leur chien. Ce que j’aime, c’est réunir les gens ».

Un sens du contact qui pourrait lui permettre de devenir… consul honoraire des Pays-Bas en Bretagne ! « L’ambassadeur de Hollande en France est un ancien camarade de classe. Il m’a contacté car il cherche un Hollandais qui parle la langue et a un bon réseau. Je coche les cases mais il y a de la concurrence. La procédure prend un an avant la nomination. Je ne cours pas après, mais je ne me vois pas refuser, ce serait un tel honneur ».

Erik van den Boogaard face au Stade Quimpérois en D2, en novembre 1988.Erik van den Boogaard face au Stade Quimpérois en D2, en novembre 1988. (Photo d’archives Le Télégramme)« Je n’avais pas porté de chaussures de foot depuis 25 ans »

Et le foot dans tout ça ? Jusqu’à il y a quelques mois, VDB organisait des stages pour les clubs pros étrangers au Château du Bois-Guy, à Parigné, au nord de Fougères. « C’est fini depuis quelques mois avec eux, mais je continue à en organiser ». En revanche, il sera plus difficile de le voir sur un terrain. « J’ai arrêté ma carrière à 28 ans, dégoûté par le milieu après que mon entraîneur à Lausanne m’a accusé d’avoir abandonné l’équipe alors que j’assistais à l’accouchement de ma femme. Je n’ai plus joué un match depuis ».

Enfin presque. Depuis son retour en Bretagne, il joue avec le Stade Rennais History Club, qui regroupe les anciennes gloires du SRFC. « Je n’avais pas porté de chaussures de foot depuis 25 ans. Je suis allé à Decathlon en acheter, mais je n’arrivais à entrer dans aucune des chaussures actuelles, alors j’ai pris des Copa Mundial. Je ne les ai portées que quatre fois, parfois même pour du foot en marchant ». Et même sans sa moustache et en marchant, nul doute que VDB a dû planter.

« Le Stade Rennais, mon club de cœur »
Erik Van den Boogaard n’a joué que deux ans et demi au Stade Rennais, de 1988 à 1990. Mais est resté l’un des chouchous du public de cette époque. « C’est mon club de cœur, celui où je me suis senti le plus fort », pointe VDB. Auteur de 55 buts sous les couleurs rennaises, il a été l’un des grands acteurs de la montée du club en D1 en 1990. « C’est à Rennes que j’ai vécu mes meilleurs moments en pro. Il y a la montée bien sûr, mais aussi mon doublé pour l’un de mes premiers matchs en Coupe de France face à Strasbourg. »

Chouchou du public, il vivait alors à Montgermont, à l’ouest de Rennes, où il aimait aller au bar Chez Monique, et « discuter avec les joueurs du club local, notamment avec l’avant-centre, ce qui ne se faisait déjà plus trop à cette époque. »

En 1990, le Stade Rennais recrute le Camerounais François Omam-Biyik en attaque, et laisse partir VDB, officiellement pour des raisons financières. « Je me souviens qu’une pétition avait été lancée pour que je reste. Il y a un mois, je suis allé aux obsèques de celui qui l’a lancée, à Saint-Quay-Portrieux. »

Parti ensuite à Rouen, en D2, il a rejoué contre Rennes peu de temps après, en Coupe de France. 1-0 pour Rouen, but de… VDB évidemment. « Ça m’a donné un sentiment bizarre, je ne voulais pas éliminer mon club de cœur, et en même temps, les supporters des deux équipes scandaient mon nom. Ça me donne encore des frissons ».