La France relève son niveau d’alerte
sanitaire face à la grippe aviaire, à quelques semaines des fêtes.
Faut-il craindre une pénurie de volailles pour les fêtes de fin
d’année ?
C’est devenu un triste rituel automnal. Chaque année, à
l’approche de l’hiver, la grippe aviaire refait surface,
accompagnée de son cortège d’angoisses pour les éleveurs. À
seulement deux mois de Noël, le niveau de risque lié à l’influenza
aviaire hautement pathogène a été relevé de « modéré » à « élevé » par
les autorités sanitaires. Cette décision fait suite à la détection
de plusieurs foyers en France, notamment dans le Cher, où 800
volailles ont été abattues après la confirmation d’un cas à
Marmagne. Dans cette région, Alexandre Cerveau, éleveur de poulets
et président de la section avicole de la FDSEA (Fédération
Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricoles), applique
désormais des consignes strictes et se voit contraint de fermer
l’accès à son exploitation, même aux voisins curieux qui avaient
l’habitude de venir jouer avec les petits poussins : « zéro
visite non indispensable », tranche-t-il pour Le
Parisien. Le ministère de l’Agriculture explique cette
recrudescence par une forte activité virale chez les oiseaux
migrateurs, dont le passage favorise l’introduction du virus dans
les élevages par contact direct ou indirect : « Les détections
se multiplient en Europe chez les oiseaux migrateurs,
particulièrement en Espagne et en Allemagne, mais aussi en France
».
Grippe aviaire : confinement des élevages
Le passage à un risque « élevé » implique des mesures strictes :
confinement des volailles, restriction des
déplacements, mise à l’abri obligatoire, même pour les petits
élevages, les basses-cours ou
les poulaillers. Dans le périmètre de Marmagne, un éleveur
concerné témoigne au Parisien : « Mes volailles, qui
ont l’habitude d’être dehors, sont désormais confinées et je ne
peux plus ni les vendre ni faire venir de clients sur place ».
Pour les exploitations tournées vers la vente
directe ou les productions Label Rouge,
habituées à l’élevage en plein air, l’adaptation est
difficile. « Nous sommes dans un couloir de migration
des oiseaux sauvages et la menace plane désormais tous les ans
au-dessus de nos élevages », se désole cet éleveur.
Même constat du côté d’Alexandre Cerveau : « C’est
très dur pour les producteurs de volailles fermières ou label
rouge car leurs animaux ont l’habitude d’être
dehors et leurs bâtiments ne sont pas prévus pour
accueillir des oiseaux toute la journée mais la règle, c’est le
confinement ». Ces mesures concernent également les
particuliers possédant
des poules ou des oies, invités à renforcer la
sécurité sanitaire de leurs installations.
La vaccination des canards
Depuis l’automne 2023, la France a généralisé
la vaccination
des canards, afin d’enrayer les flambées du virus.
D’après Muriel Vayssier, chercheuse en
microbiologie, cette stratégie semble efficace : « Le vaccin a
très bien fonctionné et permis d’enrayer l’épidémie ». Cette
mesure a permis de réduire significativement le nombre de foyers
par rapport aux années précédentes. On est ainsi passé de 1
800 foyers entre 2021 et 2023, à quelques dizaines
seulement en 2024 et 2025.
Mais cette campagne vaccinale a un coût.
Initialement financée à 70 %
par l’État, la prise en charge a été abaissée à
40 %. « À la suite d’un arbitrage de Matignon,
l’État a décidé unilatéralement de baisser drastiquement sa
participation financière de 70 % à 40 %, transférant ainsi la
responsabilité de l’achat, de l’acheminement et du stockage des
vaccins aux filières concernées », dénoncent les
professionnels du secteur. Cette baisse de soutien suscite des
inquiétudes quant à la continuité et à l’efficacité de la
campagne actuelle, alors que la saison la plus sensible
commence.
Une incertitude pour les fêtes de fin
d’année ?
Face à cette situation, les éleveurs restent
prudents, mais aucun signal ne laisse pour l’instant
présager une pénurie généralisée de
dindes, chapons, oies ou canards pour les fêtes de fin
d’année. Les cas détectés restent localisés, les mesures de
confinement sont appliquées, et la vaccination continue dans les
élevages.
Mais tout dépendra de l’évolution de la situation
sanitaire. Le ministère de l’Agriculture rappelle que
l’épidémie est encore à ses débuts : «
L’épizootie débutant, nous ne pouvons pas présager de son évolution
et c’est pourquoi les mesures de prévention doivent être
strictement respectées pour éviter toute propagation du virus
depuis l’avifaune jusqu’aux élevages » . Si les
conditions météo restent douces, les
migrations d’oiseaux pourraient s’intensifier et rendre
le virus plus difficile à contenir. La vigilance est donc
maximale, tant du côté des professionnels que des autorités.