REPORTAGE – À la gare Saint-Charles ce lundi matin, presque aucun train ne roulait en direction de Paris après l’acte de vandalisme qui a perturbé le trafic des TGV. Les usagers, démunis, oscillent entre agacement et colère.

Une foule compacte guette le panneau d’affichage avec inquiétude. Il règne une certaine confusion dans la gare Saint-Charles de Marseille en ce lundi matin. Les agents SNCF dépêchés çà et là dans le hall de gare pour renseigner les voyageurs sont pris d’assaut, tandis que les files d’attente aux guichets s’allongent. La plupart des agents de la SNCF tiennent aux voyageurs dépités (voire franchement énervés), le même discours fataliste : «Aujourd’hui, il n’y aura aucun train pour Paris. Vous pouvez vous faire rembourser.»

Depuis le début de la journée, le trafic des TGV est fortement perturbé dans le sud-est de la France après un acte de vandalisme au sud de la gare de Valence au cours duquel des câbles ont été détériorés. Depuis, les voyageurs bloqués à Marseille n’ont d’autres choix que de s’armer de patience. Sur le panneau d’affichage, les trains qui circulent encore affichent jusqu’à trois heures de retard. «On est parti ce matin pour Paris à 6 heures, raconte Stéphanie. Quand nous sommes arrivés à Avignon, on a tout bonnement fait demi-tour pour revenir à la gare Saint-Charles. Depuis, c’est le flou.»


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Trains complets

Sam et Noémie tapent frénétiquement sur leurs téléphones portables. «J’ai fini le travail à trois heures du matin, confie le jeune Sam. On vient de Nice et on aimerait aller à Lyon. Et c’est le bazar. On a acheté un billet Ouigo et le train est supprimé. Il faut donc qu’on trouve un train.» «Il faut se dépêcher, regarde !», s’exclame Noémie. La majorité des trains en direction de Paris qui circulent encore affiche désormais complet pour les journées de lundi et mardi.

«Moi, je rentre d’une semaine de croisière, raconte Émilie. À bord, je n’avais pas de réseau. Quand on est arrivé ce matin, c’est une passagère qui m’a annoncé ce qu’il s’était passé. Lorsque j’ai reçu la confirmation de la SNCF, il était 10 heures du matin. Et je n’avais plus aucune autre solution : tous ceux qui l’ont su avant moi se sont rués sur les trains. Ils nous disent de reporter notre voyage à demain, mais moi, je ne peux pas, demain, je travaille ! Je dois rentrer chez moi, ma patronne a besoin de moi !» De son côté, Bérénice s’apprête à faire ce long trajet en covoiturage. «Je devrais être arrivée à Lyon vers 13 heures, si tout va bien», soupire la jeune fille.

Anne et Étienne, eux, sont désemparés. «Nous, on veut rentrer chez nous, à Lille, mais on a aucun moyen de le faire, souffle Étienne. Le billet d’avion qui part demain pour Lille de Marseille est affiché à plus de 600 euros par personne… À l’aller, déjà, on a eu trois heures de retard à l’arrivée car la toiture du train s’était envolée. Le challenge pour Jean Castex  est lourd !»

Près des voies, un TGV à quai attire l’attention de quelques voyageurs. Ce train n’est affiché nulle part. Impossible de savoir quelle est sa destination. Pourtant, au compte-goutte, des personnes pénètrent à l’intérieur, après approbation des agents de la SNCF, «Une agente SNCF nous a dit qu’on devait venir ici et qu’on pouvait monter dedans», lance Karine, qui veut rentrer à Dunkerque. «Vous êtes combien ?», demande l’agent derrière la barrière. «Dix !», répond-elle. C’est trop pour l’agent SNCF qui leur refuse l’accès. «Ce train est uniquement pour les personnes sensibles, les personnes âgées et enfants en bas âge», indique-t-il. «Je peux être sensible, moi, s’il le faut !», s’amuse le fils de Karine.

Retour à la normale mardi

Un autre train suscite beaucoup d’espoir. Le TGV Ouigo pour Paris prévu peu avant midi n’est toujours pas supprimé, simplement affiché avec une heure de retard. Certains agents SNCF conseillent d’abandonner, mais Émilie, optimiste, préfère patienter. Vers 13 heures, contre toute attente, la voie du train s’affiche, et les voyageurs en nombre se pressent à l’entrée. «On avait entendu que le train se préparait, donc on était bien placé, tout près du train, se réjouit Rodolphe. On avait peur que les gens veuillent rentrer dans le train et empêche notre fille de partir, mais c’est bon, elle est dedans !»


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«On est parti ce matin de Nice et on devait arriver midi, raconte Hélios. On n’a pas de billet pour ce train, mais on a tenté de rentrer. Mais pour l’instant, ils ne font passer que ceux qui ont un billet pour ce train précisément. Ils ont dit ensuite qu’ils reviendraient vers nous.» Une quarantaine de personnes patiente, guettant les faits et gestes des agents SNCF qui se trouvent de l’autre côté, sur le quai, au loin. Puis, sans bruit, les portes du Ouigo se referment, et le train part, sous les jurons de certains voyageurs. «Vous auriez pu venir nous voir au moins !», lance une première voyageuse. «C’est écœurant», peste une autre. «On est ici depuis ce matin avec les enfants, on va faire comment ?», s’emporte une troisième. Selon un communiqué du ministère des Transports, le retour à la normale est prévu pour mardi.