Le procès a dû être délocalisé dans une autre salle du tribunal de Paris, plus grande. La rumeur selon laquelle Brigitte Macron serait née homme a fait le tour du monde. Les médias comme le public sont venus en masse ce lundi.

Dans la salle comble, les sept prévenus présents sur les 10 cités à comparaître s’installent. La médium Delphine J., connue comme Amandine Roy dans la sphère complotiste, échange quelques mots avec son voisin, Jean-Luc Montégut, 63 ans, un élu d’un petit village de Saône-et-Loire. L’illustration de la variété des profils des prévenus venus de toute la France. Parmi eux, deux sont originaires de Haute-Savoie (un informaticien et un homme en situation de handicap qui n’a pas pu se déplacer à l’audience en raison de son handicap), un professeur d’EPS de Seine-et-Marne ou bien encore un galeriste parisien. Tous sont accusés de cyberharcèlement après avoir partagé des publications complotistes visant le genre de la Première dame, parfois agrémentées d’injures transphobes ou qualifiant Brigitte Macron de pédophile.

« Je dois avoir plus de vues par les enquêteurs que par les gens lambda »

Les prévenus plaident l’humour et minimisent l’impact de leurs publications sur la famille Macron, revendiquant leur liberté d’expression. C’est le cas de Jérôme Amiot, un informaticien de Meythet (Haute-Savoie) de 49 ans, le premier prévenu à s’avancer à la barre. Il est accusé d’avoir partagé en 2024 et publiés des commentaires injurieux affirmant que Brigitte Macron est Jean-Michel Trogneux. « Je me demande ce que je fais là. C’est même effrayant. Pour quelques tweets, on peut nous envoyer en garde à vue », se désole-t-il.

L’informaticien aux cheveux gris et aux lunettes rectangulaires minimise l’impact de ses publications : « J’ai une moyenne de 30 tweets par jour. On me reproche neuf tweets sur quatre mois. Je dois avoir plus de vues par les enquêteurs que par les gens lambda », se défend-il. Au sujet du commentaire injurieux publié sur Brigitte Macron dans lequel il écrit « Qui doute de la bite à Brigitte ? », il déclare : « C’est un commentaire dans un tweet, pas une seule seconde vous vous dites que Mme Macron va le voir », déclare-t-il, rejetant ainsi l’accusation de cyberharcèlement. Une des d’assesseures s’agace : « Si vous aviez Brigitte Macron devant vous vous lui auriez parlé de sa bite ? » L’informaticien bafouille, sans réponse claire…

« Ça peut blesser oui, mais c’est factuel »

Jérôme Claveri, lui, a publié quatre tweets sur l’anatomie de Brigitte Macron : « Mes tweets, je veux bien les assumer. C’est pour informer », dit le prévenu de 55 ans, qui se revendique de l’esprit satirique de Charlie Hebdo. « On ne parle pas d’humour mais d’infraction pénale », recadre le président. À la barre, le salarié courtier en crédit réaffirme ces accusations de pédophilie à l’encontre de Brigitte Macron, lisant la définition de la pédophilie. « Ça peut blesser oui mais c’est factuel », tranche-t-il.

« Si ma mère était venue me dire qu’elle partait avec un gamin de 15 ans, j’aurais été très perturbé », poursuit-il. Jean-Christophe Denoual, le professeur d’EPS, revendique aussi sa liberté d’expression : « À travers mon travail, on a un comportement de retenu par rapport à certaines valeurs », admet-il. « En dehors, j’essaye de profiter un maximum de ma liberté d’expression et de pensée. »

« Un usage disproportionné de la force publique »

Jean Luc Montégut, 63 ans, élu dans la commune de Culles-les-Roches, un petit village Saône-et-Loire, interrogé par notre journal en marge de l’audience, plaide aussi l’humour. « Je ne connais pas la vérité et n’ai pas la capacité à porter un jugement quelconque. C’est simplement de la plaisanterie potache. » Il poursuit : « Apparemment, on ne peut pas rire de tout. »

« Ce n’est pas un gamin d’école qu’on harcèle, mais une personnalité publique », relativise le deuxième adjoint de la commune de Culles-les-Roches, encore marqué par son arrestation, qui s’est déroulée le 10 décembre 2024 à 7 heures du matin : « Trois gendarmes, que je connaissais de par ma fonction, et deux policiers de la PJ parisienne sont venus me chercher chez moi pour me placer pendant 48 heures en garde à vue à la gendarmerie de Buxy », explique cet ancien cadre dirigeant dans une PME métallurgique de la région chalonnaise, aujourd’hui retraité, dénonçant « un usage disproportionné de la force publique ». « Je n’ai retweeté que quatre ou cinq tweets sur Brigitte Macron », nous certifie-t-il. Il affirme n’avoir « qu’un petit compte (1 300 abonnés au moment des faits) » et en avoir gagné « plusieurs centaines » après cette affaire. Ses tweets n’ont généré « que 2,3 réponses à chaque fois », selon lui. Jean-Luc Montégut sera appelé à la barre mardi.

La médium Amandine Roy endettée de 44 000 euros

Sur le banc des prévenus, certains sont plus connus dans la sphère complotiste. La médium Amandine Roy a, à plusieurs reprises, suscité la controverse en soutenant la thèse selon laquelle la Première dame serait Jean-Michel Trogneux qui aurait fait une transition de genre pour devenir Brigitte Macron. Condamnée pour diffamation en première instance, elle a été relaxée en appel le 10 juillet. Brigitte Macron et son frère Jean-Michel Trogneux ont saisi la Cour de cassation. « J’ai sept procédures actuellement concernant les Macron », confie la médium du Maine-et-Loire à notre journal. Ce lundi, à la barre, elle a fait valoir son droit au silence. Endettée à hauteur de 44 000 euros, celle qui se décrit également comme « cheffe d’entreprise » dit que le cyberharcèlement, dont elle est victime après sa forte médiatisation dans l’affaire Brigitte Macron, nuit à son activité.

Autre prévenu médiatique présent : Aurélien Poirson-Atlan, 41 ans, connu et suivi sur les réseaux sociaux sous le pseudonyme de “Zoé Sagan”. « J’en suis à 150 heures d’audition en un an, dont 40 heures concernant Brigitte Macron », indique celui qui se définit comme écrivain, également poursuivi pour diffamation dans d’autres affaires notamment par Gabriel Attal et Cyril Hanouna. Son compte X a été suspendu en juillet 2024.

Le père de famille, qui sera entendu à la barre mardi, plaide à chaque fois la satire. En ce qui concerne la rumeur visant l’épouse d’Emmanuel Macron, il concède « une blague de mauvais goût ». « Les Macron, je ne veux plus jamais en entendre parler de ma vie », lâche-t-il à notre journal. « Mon fils de neuf ans est terrorisé à l’idée que son père puisse aller en prison », poursuit-il. Les prévenus encourent jusqu’à deux ans d’emprisonnement. Aurélien Poirson-Atlan précise avoir des contrats d’édition en attente, le temps de la procédure. Et indique qu’il s’apprête à publier un best of de “Zoé Sagan”, « un truc provocateur, mais légal », nous glisse-t-il. Mardi, Tiphaine Auzière, la fille de Brigitte Macron, devrait venir témoigner à la barre.