Par

Léa Pippinato

Publié le

28 oct. 2025 à 16h47

C’est à 26 ans qu’Isaure Douat a pris la route de Montpellier, diplôme vétérinaire et cursus à l’École normale supérieure en poche. Un choix guidé par une idée ancienne : comprendre le cancer pour mieux le combattre. Depuis l’adolescence, la jeune femme voulait travailler en cancérologie. « C’était mon premier rêve ». Mais un passage inattendu par la médecine vétérinaire a façonné son regard sur la recherche. Elle comprend que science et soin peuvent se nourrir mutuellement.

De fil en aiguille, elle suit un double cursus rare, à la fois vétérinaire et scientifique, avant de soutenir sa thèse de doctorat. Une rigueur académique qui l’amène aujourd’hui à l’Institut de recherche en cancérologie de Montpellier (IRCM), au sein de l’équipe d’Emmanuelle Liaudet-Coopman.

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Les cancers du sein les plus redoutés

Sa thèse porte sur les cancers du sein dits « triple négatif ». Ces formes représentent entre 15 % et 20 % des cancers du sein, selon l’Institut Curie. Leur particularité : elles ne possèdent aucun des trois récepteurs habituellement visés par les traitements, ni aux hormones (œstrogènes, progestérone) ni à la protéine HER2. Résultat : les chimiothérapies traditionnelles agissent peu. Les rechutes sont fréquentes, les traitements limités. Ces tumeurs touchent plus volontiers des femmes jeunes, parfois âgées de moins de 50 ans. D’où l’urgence, pour la communauté scientifique, de trouver de nouvelles pistes thérapeutiques. Ces morceaux circulent autour de la tumeur et pourraient jouer un rôle clé dans son agressivité.

L’idée est d’identifier un maillon faible, une faiblesse que les traitements futurs pourraient cibler. Dans le langage des chercheurs, ce maillon faible s’appelle une cible thérapeutique. C’est un point précis de la tumeur que l’on peut viser sans endommager les cellules saines. « On essaie d’aller droit à la tumeur, pas ailleurs », résume la jeune scientifique. L’approche est prometteuse, mais lente. Entre la découverte en laboratoire et un traitement disponible, il peut s’écouler des années. Il faut déposer un brevet, convaincre des investisseurs, tester sur des modèles animaux, puis humains.

Vidéos : en ce moment sur ActuUne motivation intime

Derrière la rigueur du protocole, il y a une part de personnel. Isaure Douat a vu le cancer du sein frapper sa famille. Cette proximité nourrit sa détermination. « Je ne me voyais pas médecin, mais j’avais envie d’aider à ma manière. Me dire que ce que je fais servira peut-être un jour, même un peu, ça suffit à me motiver », confie-t-elle. Son engagement s’enracine dans une conviction : la recherche avance souvent à petits pas. Une découverte isolée, une protéine mieux comprise, peuvent devenir la base d’un futur traitement. « Même si mes travaux n’aboutissent pas directement, ils pourront aider d’autres chercheurs à aller plus loin », analyse t-elle.

Pour mener ses travaux, la jeune chercheuse a obtenu une bourse de la fondation ARC, qui finance sa thèse pendant trois ans, soit 150 000 euros au total. L’argent couvre son salaire, mais pas le coût des expériences. Pour cela, d’autres aides sont nécessaires. Sa directrice d’équipe dépose régulièrement des dossiers pour continuer à financer les recherches. Si la recherche est indispensable, Isaure Douat insiste sur l’importance du dépistage. Plus un cancer est découvert tôt, plus les chances de guérison augmentent. « C’est super d’avoir des traitements puissants, mais si la maladie est détectée trop tard, c’est plus compliqué. »

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🎗️ Le dépistage, un réflexe tous les deux ans

33 % des cancers diagnostiqués chez les femmes sont des cancers du sein. Aujourd’hui, un million de patientes vivent avec la maladie en France, et plus de 61 000 nouveaux cas sont détectés chaque année.

Entre 50 et 74 ans, chaque femme peut bénéficier du dépistage organisé, gratuit et proposé depuis 2004. Il comprend un examen clinique et une mammographie effectuée par un radiologue agréé, à renouveler tous les deux ans en l’absence de symptômes.

Le dépistage précoce sauve des vies : 88 % des femmes sont en vie cinq ans après un diagnostic précoce. La mammographie de dépistage est remboursée à 100 % par l’Assurance Maladie.

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