Par
Laurène Fertin
Publié le
24 avr. 2025 à 17h58
Presque deux mois après sa mort, la question taraude toujours la famille. Que s’est-il passé les heures, les jours précédant le décès de Kévin Boudou, au centre pénitentiaire de Rennes-Vezin ? Le jeune homme avait en effet été retrouvé pendu dans sa cellule disciplinaire, aussi appelée « le mitard ». Un suicide auquel ne croît (toujours) pas ses proches. Alors qu’une autopsie a été réalisée le 28 mars dernier, d’autres éléments restent à investiguer, selon leur avocate.
Une autopsie demandée par la famille
« L’enquête est toujours en cours et nous attendons les résultats », débute, en quelques mots, Me Beigelman, l’avocate de la famille de Kévin Boudou. « Toutefois, une autopsie a effectivement été réalisée », précise-t-elle.
L’autopsie était très attendue par la famille : lorsque le trentenaire avait été découvert dans sa cellule, celui-ci n’était pas décédé. Il avait été transporté au CHU de Rennes et placé dans le coma. C’est à ce moment que ses proches avaient découvert « des traces de coups » et des « traces de strangulation » sur le corps de Kévin Boudou.
« Une autopsie a été réalisée parce que la famille a été vigilante », résume Me Beigelman. « Initialement, l’autopsie n’était pas prévue : elle est en effet réalisée seulement quand les personnes sont retrouvées mortes. En l’occurrence, ce n’était pas le cas de Kévin Boudou. »
« Je reste vigilante »
Toutefois, les conclusions de cette autopsie n’ont pas encore été dévoilées par le parquet de Rennes à l’heure où sont écrites ces lignes.
« Je reste vigilante », glisse Me Beigelman. « Si nous prenons l’hypothèse qu’il n’y a pas eu l’intervention d’un tiers – c’est-à-dire si c’est un passage à l’acte autoinfligé – cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas eu des éléments extérieurs qui l’ont poussé à se suicider. »
Pour cette raison, l’avocate a demandé à ce que des « actes supplémentaires » soient effectués par le parquet. « En d’autres termes, j’ai demandé à ce que soit réalisé des actes d’investigations : des auditions, des exploitations de vidéosurveillance », égrène l’avocate.
Par exemple, la pénitentiaire a réalisé la retranscription d’un appel téléphonique de Kévin Boudou avec sa compagne (…) Je demande qu’une retranscription soit faite par l’autorité judiciaire.
Me Beigelman
Avocate
Pour rappel, selon un membre de la famille de Kévin Boudou, ce dernier se plaignait régulièrement auprès de sa petite amie, qu’il avait au téléphone, d’un surveillant avec qui « c’était compliqué ». Ces actes supplémentaires pourraient alors permettre de « mettre en lumière le comportement d’une équipe de surveillants », précise Me Beigelman.
Pour cela, l’avocate souhaite que des auditions soient réalisées auprès des détenus également présents en quartier disciplinaire au moment des faits ; mais aussi des différents personnels du centre pénitentiaire.
De « la provocation au suicide » ?
« Si jamais il y a eu un acte autoinfligé, qu’est-ce qui a poussé Kévin Boudou à le faire ? Y a-t-il des éléments exogènes qui l’ont poussé à se suicider ? Ces éléments exogènes sont-ils des provocations, des brimades, de la maltraitance ? », s’interroge Me Beigelman.
J’ai en tête, par exemple, la provocation au suicide. C’est tout à fait possible (…) J’interviens souvent en détention, je sais que ce sont des réalités.
Me Beigelman
Avocate
« Mais à ce stade », tempère-t-elle, « on ne le sait pas. C’est pourquoi, selon mon avis, le parquet doit enquêter en ce sens. »
Pour l’avocate de la famille, le parquet de Rennes doit enquêter sur d’autres éléments qui pourraient comprendre le passage à l’acte de Kévin Boudou. ( © Archives actu Rennes)Une plainte déposée en mars
Pour le moment, aucun détail n’a donc été livré par le parquet de Rennes. « Le seul moyen d’inciter la Justice à livrer des informations, c’est au bout de trois mois à compter du dépôt de plainte, pour demander le cas échéant une ouverture d’information », affirme Me Beigelman.
Une plainte contre X pour homicide involontaire et non-assistance à personne en danger a été déposée le 5 mars dernier. Il faudra attendre encore un peu. « On compte donc sur le parquet pour nous transmettre les éléments en l’état », glisse l’avocate.
Nous avons hâte d’avoir les tenants et aboutissants. Nous sommes dans le flou.
Me Beigelman
Avocate
Un autre détenu retrouvé mort
Nous vous en parlions dans cet article, peu après la mort de Kévin Boudou, un autre détenu a été retrouvé pendu dans sa cellule.
Âgé de 39 ans, ce dernier était décédé jeudi 10 avril 2025 au sein du centre pénitentiaire de Rennes-Vezin.
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