Ces deux-là ne partiront pas en vacances ensemble… Le maire de Nice Christian Estrosi et l’ancien ministre de la justice Éric Dupond-Moretti, qui habite désormais Nice, se sont écharpés dans le célèbre restaurant du vieux Nice La Petite Maison, antre de la droite azuréenne et même nationale, puisque Nicolas Sarkozy y allait régulièrement lorsqu’il était encore en liberté.

La scène s’est déroulée mercredi 22 octobre, selon le Canard Enchaîné, qui révèle l’histoire. Christian Estrosi dînait avec son épouse Laura Tenoudji et son beau-père, alors qu’Éric Dupond-Moretti était attablé avec des amis.

« Espèce d’intermittent du spectacle »

D’un coup, le maire de Nice se serait invité à leur table, assis sur une chaise, et aurait lancé bruyamment, d’un ton sarcastique : « Ici, je suis avec de vrais amis. » – « Toi, t’es surtout un courtisan permanent ! », lui a répondu Éric Dupond-Moretti. « Espèce d’intermittent du spectacle », a répliqué Christian Estrosi. « Et toi, pas un intermittent de la connerie ! », a alors enchaîné l’ancien ténor du barreau.

Le ton est ensuite monté, rapporte le Canard Enchaîné. « Je vais t’en coller une », a lancé Christian Estrosi. « On sort, si tu veux ? », a alors répondu Éric Dupond-Moretti. « Tu seras bientôt sous OQTF à Nice ! », aurait alors répliqué Christian Estrosi.

« Estrosi est venu à ma table me provoquer »

Contacté ce mercredi 29 octobre, Éric Dupond-Moretti ne dément pas l’article du Canard. Mais que l’altercation a fuité dans la presse, ça a le don de l’énerver. « Ça n’avait pas vocation à être dans le journal, c’est pas moi qui ai balancé ça à la presse, s’agace-t-il. Demain si je m’engueule avec un mec dans la rue, ça doit être dans le journal ? J’étais attablé tranquille, Estrosi est venu à ma table me provoquer, il ne s’est pas bien tenu avec moi, on a eu des échanges de mots, c’est tout. » Violents ? « Quand vous vous engueulez avec des gens, vous faites ça en douceur ? Non, et ben moi non plus. »

« Nous ne vous traiterons pas de clown, nous avons trop de respect pour cette profession »

« Intermittent du spectacle », « OQTF »… Bienvenue sur la Côte d’Azur. « À Nice, pendant qu’Estrosi et Dupond-Moretti s’écharpent dans un restaurant de luxe, les Niçoises et Niçois, eux, comptent leurs euros à la fin du mois », a réagi Julien Picot, secrétaire départemental du Parti communiste français.

À la CGT Spectacle, on n’y va pas avec le dos de la cuillère : « La Petite Maison semble devenir un établissement dangereux qu’il serait peut-être judicieux de nettoyer au Karcher, réagit le syndicat dans un communiqué. Les bourgeois ne savent décidément plus se tenir. » Et d’enchaîner : « Pour insulter l’ancien garde des Sceaux, Christian Estrosi l’a traité d’intermittent du spectacle. […] Pour que la première insulte qui sorte de sa bouche soit celle-ci, c’est dire le peu de considération et le mépris qu’il a pour les près de 300 000 intermittents du spectacle de France ! Ces femmes et ces hommes qui créent des décors, des lumières, des musiques, qui jouent et qui dansent, qui font vivre la culture dans les villes et les villages. Quel mépris une fois de plus, quelle inculture, quelle tristesse. » Avant d’enfoncer le clou : « Nous condamnons et dénonçons une fois de plus ce dérapage qui vous fait de plus en plus ressembler à votre cousin Donald. Nous ne vous traiterons pas de clown Monsieur, nous avons trop de respect pour cette profession. »

« Une petite chicanerie »

Nicole Rubi, qui gère le restaurant Le Petite Maison, minimise l’altercation, tout en précisant que les faits se sont déroulés non pas le soir, comme l’écrit le Canard, mais lors du déjeuner, aux alentours de 15 h 30. « Ce n’était pas une grosse dispute, ils se connaissent depuis très longtemps, il y a même de l’affection entre eux, assure-t-elle. Mais Eric Dupond-Moretti aime tellement Macron – et c’est tout en son honneur – qu’il n’a pas supporté que Christian Estrosi réclame son départ. C’était une petite chicanerie entre deux hommes formidables que j’aime beaucoup, et qui sont à la base amis. Par contre, je ne comprends pas comment c’est sorti dans le Canard, car il n’y avait plus personne dans le restaurant à cette heure. »

« Je n’ai pas pour habitude de m’asseoir à une table quand je n’y suis pas invité »

Christian Estrosi a finalement réagi dans la soirée, en contre-attaquant : « Monsieur Dupond-Moretti, qui est aujourd’hui un opposant politique, est aussi devenu un récidiviste en matière de fake news. Après l’épisode de l’UNOC où il s’est incrusté dans un dîner en tête à tête entre le Président de la République et son épouse, voilà une nouvelle scène de théâtre qu’il s’amuse à raconter mais qui est bien loin de la réalité des faits. Je tiens donc à relever quelques inexactitudes et à préciser les choses suivantes. Premièrement, je n’ai pas pour habitude de m’asseoir à une table quand je n’y suis pas invité. Encore moins lorsqu’il s’agit de celle d’Eric Dupond-Moretti avec qui j’ai aucune envie de partager un repas ! Par ailleurs, contrairement à ce qu’il affirme, je ne l’ai pas ‘‘insulté’’ d’intermittent du spectacle pour la simple et bonne raison que j’ai beaucoup trop de respect et de considération pour eux que j’ai défendus et soutenus toute ma vie. Je lui ai néanmoins signifié qu’il était ‘‘meilleur en intermittent qu’en politique’’, en ayant la conviction qu’il peut y avoir d’excellents intermittents du spectacle et d’exécrables ministres. »

Le torchon brûle entre le maire de Nice et Éric Dupond-Moretti, a minima depuis que Christian Estrosi a appelé publiquement au départ d’Emmanuel Macron et à l’organisation d’une présidentielle anticipée. « Je n’ai jamais vu pire courtisan que Christian Estrosi, avait alors asséné l’ex ministre de la justice. Il a été le courtisan de tout le monde : d’Emmanuel Macron, mais avant lui de Médecin, de Peyrat, de Le Pen, de Sarkozy à qui il veut aujourd’hui donner le nom d’une place ! ».