Les derniers chiffres de la croissance aux Etats-Unis manquent à l’appel jeudi du fait de la paralysie budgétaire, transformant de plus en plus en casse-tête le décryptage de la première économie mondiale.
Depuis le 1er octobre, le shutdown a placé de nombreux fonctionnaires en congé forcé, notamment ceux censés concocter les indicateurs économiques phares.
Les données sur la santé de l’emploi en septembre n’ont pas été communiquées. Celles pour octobre risquent de ne jamais être collectées. Le site des statistiques du ministère du Commerce n’a pas été actualisé depuis le 29 septembre.
La publication de la première estimation du produit intérieur brut pour le troisième trimestre, initialement programmée ce jeudi, est donc repoussée à une date inconnue. L’indice d’inflation PCE doit connaître le même sort vendredi.
Or l’économie « n’est pas facile à déchiffrer », remarque Sarah House, économiste pour la banque Wells Fargo.
Economie résiliente
Cette année, l’économie américaine a déjoué de nombreux pronostics. Elle a globalement résisté au choc douanier déclenché par le président Donald Trump depuis son retour au pouvoir en janvier.
L’inflation a réaccéléré, mais pas autant que redouté. Le PIB est resté solide – à l’exception du premier trimestre, quand un bond des importations (pour prendre de vitesse les nouveaux droits de douane) s’était traduit par une contraction. Et Wall Street vole de record en record, soutenue par les promesses de l’intelligence artificielle.
Créations d’emplois au point mort
Les chiffres officiels sur le marché du travail ont toutefois causé un réveil brutal cet été, en montrant que les créations d’emplois étaient quasiment au point mort.
La publication a fâché Donald Trump. Il a renvoyé la directrice du service statistique du ministère du Travail en avançant – sans fournir d’éléments – qu’elle avait forcément dû manipuler les données en sa défaveur.
>> Sur le sujet, lire : Le chômage grimpe aux Etats-Unis, la création d’emplois ralentit
Taille de l’économie réduite
Le pays fait par ailleurs face à une inconnue de taille, pointe Wendy Edelberg, chercheuse à la Brookings Institution: combien de personnes vivent, dépensent et travaillent sur son sol?
La politique dure du gouvernement concernant l’immigration, tant légale qu’illégale, a non seulement réduit les entrées, mais aussi accéléré les sorties, via des expulsions ou des départs volontaires.
« Il y a des estimations selon lesquelles il pourrait y avoir 500’000 personnes en moins aux Etats-Unis depuis le début de l’année. Elles ne consomment plus sur place, n’ont plus besoin de se loger. Cela réduit la taille de l’économie », souligne Wendy Edelberg.
Projection difficile pour les entreprises
Pour Heather Long, économiste de la banque Navy Federal Credit Union, les entreprises ont également besoin des chiffres gouvernementaux pour se projeter.
« C’est la période de l’année où la plupart des organisations finalisent leur budget pour 2026, et presque toutes se demandent si ce sera une année de reprise, de ralentissement, voire de récession », décrit-elle.
C’est ainsi, poursuit-elle, qu’elles décident ou non d’investir, d’embaucher ou de licencier.
>> Pour aller plus loin, lire : Guerre commerciale: « L’économie américaine va souffrir à long terme »
afp/juma