Jour de sa rencontre avec Xi Jinping, Donald Trump a annoncé, jeudi, que les Etats-Unis allaient reprendre leurs essais d’armes nucléaires, une décision lourde d’incertitudes. Le président a déclaré sur son réseau Truth Social : « En raison des programmes d’essais menés par d’autres pays, j’ai demandé au (ministère de la Défense) de commencer à tester nos armes nucléaires sur un pied d’égalité » avec la Russie et la Chine. 20 Minutes vous explique tout.

Que veut réellement dire Donald Trump ?

Le message du républicain ne précise pas si ces essais concerneront uniquement les vecteurs – missiles ou autres systèmes de lancement – ou s’il s’agit de véritables explosions d’ogives nucléaires, ce qu’aucune grande puissance n’a fait depuis la fin du XXe siècle. Donald Trump a ensuite justifié sa décision en invoquant la compétition stratégique avec Moscou et Pékin : « S’ils font des essais, j’imagine qu’on doit en faire », a-t-il affirmé, sans donner plus de détails.

Autre ambiguïté : Donald Trump a parlé du ministère de la Défense, alors que la gestion des stocks d’ogives relève en réalité du ministère de l’Energie, via l’Agence nationale de sécurité nucléaire (NNSA). A noter que selon l’Institut de recherche international sur la paix de Stockholm (Sipri), les Etats-Unis posséderaient 3.700 ogives nucléaires déployées ou stockées.

Les Etats-Unis procèdent-ils déjà à certains tests ?

Oui, mais depuis le moratoire décrété en 1992 par George H. W. Bush, les Etats-Unis assurent la fiabilité de leur arsenal grâce à un vaste programme scientifique combinant simulations informatiques et « expériences nucléaires sous-critiques », qui libèrent de l’énergie sans réaction en chaîne. Avant cette date, AP News rappelle que les Etats-Unis ont mené plus de 1.000 essais nucléaires.

Ce dispositif, affirme la NNSA, « permet d’évaluer et de certifier les stocks avec une confiance extraordinaire ». Par ailleurs, l’armée américaine teste régulièrement ses vecteurs nucléaires : les missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) de type Minuteman III font l’objet de tirs d’essai non armés plusieurs fois par an.

Peuvent-ils vraiment reprendre les essais explosifs ?

Le président dispose techniquement du pouvoir d’en donner l’ordre. Selon le Service de recherche du Congrès, l’armée aurait la capacité de relancer des essais souterrains dans un délai de 24 à 36 mois. Une étude de 2012 précisait toutefois que ce délai serait « davantage dicté par les réglementations environnementales, sanitaires et de sécurité » que par les contraintes techniques.

Pour Doreen Horschig, chercheuse au Centre d’études stratégiques et internationales (CSIS), « un site d’essai pourrait être prêt en entre six et dix mois pour un test souterrain très basique ». Mais le calendrier serait « beaucoup plus long » s’il s’agissait de tester de nouvelles ogives ou capacités.

Une telle décision est-elle politiquement viable ?

La reprise d’essais nucléaires pourrait susciter de fortes oppositions au Congrès, y compris « des deux bords de l’échiquier politique », souligne encore Doreen Horschig. Les alliés des Etats-Unis, eux, n’en « voient pas la nécessité ».

Notre dossier sur les Etats-Unis

Washington, qui a signé mais jamais ratifié le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE), risquerait par ailleurs d’affaiblir l’équilibre international sur la non-prolifération. Dans un climat géopolitique déjà tendu, une telle initiative pourrait marquer un tournant majeur dans la doctrine nucléaire américaine et relancer une course aux armements que beaucoup croyaient révolue.