«C’est une honte », « une catastrophe »… L’hiver 2026, dans un an, sera chaud. Ceci n’est pas une prévision météo, mais un sentiment. C’est que la nouvelle réglementation sur les découverts bancaires, qui sera effective le 20 novembre 2026, inquiète et fait parler. Bruxelles change en effet les règles pour les clients des banques. Une directive européenne qui va s’appliquer en France : le découvert et la facilité de caisse vont en effet être encadrés comme jamais. Le découvert sera considéré comme un vrai crédit, et chaque demande devra être étudiée individuellement.
Si, sur le papier, cette nouvelle réglementation vise à « limiter les dérives et à mieux protéger les consommateurs », il est craint qu’elle touche surtout les foyers les plus modestes. Sollicités par 20 Minutes pour connaître leur sentiment, les lecteurs ont majoritairement enfoncé le clou des inquiétudes.
Nombreux sont ceux qui pensent que l’on va « droit dans le mur ». Denis n’a pas tourné autour de la tirelire : « Oui j’ai peur je suis à découvert tous les mois. » Comme lui, beaucoup craignent de perdre le seul petit filet de sécurité qu’ils avaient encore. Une lectrice s’emporte : « On va droit dans le mur avec ce truc. Quand les gens auront ces agios débités de leur compte, donc encore moins d’argent et peut-être jusqu’à l’interdiction bancaire, cela sera la révolution, prévient-elle. Quand on n’a plus rien à manger, on s’en moque totalement de tout le reste. On n’a plus rien à perdre. » Même bruit de fond révolutionnaire du côté d’Alain, qui avertit : « Depuis des siècles, ça s’est toujours très mal terminé, dans le sang. À force de pousser les gens à bout, cela finit toujours dans la démesure. »
Pierre y voit une injustice sociale : « Mauvaise chose. C’est encore les plus modestes qui vont encore être contraints. » Lucie raconte son quotidien avec colère : « C’est une honte. Encore une fois, une mesure qui va mettre un peu la tête sous l’eau de nombreux ménages. La classe moyenne ne fait que payer… La fin du mois arrive le 15 et lorsqu’un imprévu survient, il est impossible de ne pas utiliser notre découvert. »
« Une aubaine pour les banques »
Et même les seniors sont inquiets, témoignant d’un pouvoir d’achat sous tension. Marie-José, retraitée, écrit que « âgés de 80 et 81 ans, nous ne pourrions pas vivre sans notre découvert autorisé tout en comptant nos dépenses au moindre euro près. » Martine se souvient d’une époque plus simple, celle « d’avant » où les salaires se réglaient souvent « en liquide » : « Depuis qu’on nous a obligés à ouvrir un compte en banque, cela n’a cessé de se dégrader pour les petits salaires », affirme-t-elle. Muriel explique que sans son autorisation de découvert, elle ne pourrait plus carrément payer certaines factures, « ni subvenir à mes besoins alimentaires. C’est une vraie catastrophe pour moi si mon découvert diminue, je le suis dès le 10 de chaque mois ». « Quel effet d’aubaine pour les banques qui vont vendre du « découvert » à prix fort jusqu’à la date butoir, et du crédit à la consommation à des taux usuraires à partir de novembre 2026 », prédit Dominique.
Une autre lectrice parle d’une mesure « violente » qui « va mettre encore plus la pression sur les familles modestes. Comment vont faire celles qui ont parfois des fins de mois difficiles ? On va leur couper tout et ils ne pourront même plus manger ? Quelle mesure injuste ». Même inquiétude pour Alexandre, mais sur le ton de l’humour qui résume : « Le coût de la vie devient celui de la Suisse et les salaires sont Espagnols. » Xavier, au chômage s’en prend au gouvernement : « J’ai un découvert autorisé heureusement, […]. Si les banques ne m’avaient pas accordé ça, je me serais retrouvé très mal. Le gouvernement est vraiment à côté de la plaque. » Un gouvernement à qui il est souvent demandé par les lecteurs de 20 Minutes « de montrer l’exemple sur les découverts ».
Remonté également, Didier, qui ne cache pas son mécontentement, prédisant la fin des petites manips budgétaires des foyers. « Le découvert était un petit système tampon. Maintenant, sans découvert, les prélèvements se feront et permettront aux banques de ramasser de l’argent pour impayés », assure-t-il. Une nouvelle réglementation qui « bien sûr, favorise les gens aisés et les banques. Un coup très dur pour les pauvres dont on n’a rien à foutre. Ignoble comme d’habitude, merci l’Europe ».
« Bruxelles », c’est d’ailleurs bien elle qui revient souvent dans le viseur des mécontents. Dominique s’en prend directement à elle : « Ce n’est pas normal que la duchesse de la commission européenne décide pour tout le monde. Il faut reprendre le pouvoir dans chaque pays ». Même son de cloche pour Gérard : « Encore l’Europe qui veut régenter la vie des gens, et cela est fait par des personnes qui ne vivent qu’avec nos impôts ! ». « L’ UE, toujours plus dirigiste et toujours moins démocratique, ce qui finira par provoquer un Frexit ! », prévient Poulkam. D’autres enfin, voient de l’autre côté de la lorgnette et prédisent des difficultés techniques et ironisent un brin : « Je pense aux employés de banque, ça va faire une sacrée surcharge de boulot, à moins qu’ils automatisent ça à coups d’IA », ironise Benjo.
« Le découvert est un truc vicieux qui enfonce plus qu’il n’aide »
Dans ce lot de complaintes et de craintes, quelques voix sont tout de même plus mesurées, voire favorables, à cette nouvelle réglementation. Hildegarde trouve en effet la mesure cohérente : « C’est pertinent, que ce soit enfin considéré comme un crédit car cela en est un ! Vivre à découvert tous les mois n’est pas une normalité ». Florence n’est pas inquiète non plus et rappelle que « les autorisations déjà existantes seront conservées » mais moralise : « le découvert ne doit être utilisé qu’exceptionnellement. » Pernelle souligne quant à elle que « le découvert est un truc vicieux qui enfonce plus qu’il n’aide. Si la nouvelle réglementation peut aider à mieux gérer ses finances, pourquoi pas » alors que Sandrine appelle à mieux gérer son budget, si petit soit-il : « Etre à découvert tous les mois, c’est vivre au-dessus de ses moyens », tandis que Paul tranche : « Je ne dépense pas l’argent que je n’ai pas. » De quoi déplaire à un autre lecteur : « J’adore les gens qui écrivent, « moi, jamais de découvert ». Ces gens-là n’ont jamais eu d’accident de vie ? Une voiture en panne, la boîte qui ferme, la maladie ? J’adore ces gens parfaits. »
Cette réforme, encore floue pour beaucoup, paraît déjà comme un révélateur d’inégalités, avec d’un côté, ceux qui voient dans le découvert un piège à dettes et de l’autre, ceux pour qui il est une bouée de survie. En attendant sa mise en place, mieux vaut peut-être alors ironiser « à la française », comme un lecteur anonyme qui écrit : « Même pas un petit découvert pour payer une énième taxe ? » « Surtout pas, répond un autre, comme ça, vous payerez la taxe, les frais bancaires et les taxes sur les frais bancaires. » Avec en bruit de fond, cette phrase d’Alain qui résonne comme une mise en garde : « À force de pousser les gens à bout, cela finit toujours dans la démesure. »