Des milliards, des milliards et… des milliards. Ces derniers mois, les montants qui circulent autour du secteur de l’intelligence artificielle (IA) donnent tout simplement le vertige, alors que les craintes d’une bulle spéculative se multiplient. On fait le point.

Une semaine frénétique

Durant cette dernière semaine d’octobre, la folie des grandeurs a atteint un nouveau sommet dans le monde de la tech, NVIDIA devenant la première entreprise de l’Histoire à franchir la barre symbolique des 5 000 milliards de dollars de capitalisation boursière. Un chiffre vertigineux, porté par sa domination quasi absolue sur le matériel d’intelligence artificielle : la firme fournit entre 70 et 95 % des processeurs graphiques (GPU) utilisés pour entraîner et faire tourner les modèles d’IA dans le monde.

Mais ce n’est pas tout. OpenAI, l’éditeur de ChatGPT a récemment atteint une valorisation record de 500 milliards de dollars, en faisant la startup la plus chère de la planète. Devenue structure à but lucratif cette semaine, la société est désormais tournée vers une entrée en Bourse qui serait tout bonnement historique.

Et la frénésie s’étend à tout l’écosystème. Anthropic affiche déjà une valorisation de 183 milliards de dollars, tandis que xAI, la startup d’Elon Musk, continue d’attirer les capitaux à un rythme effréné. De prime abord, il semblerait que l’on évoque une technologie qui permet à ses créateurs d’engranger des sommes folles. Mais c’est loin d’être le cas, et la réalité a de quoi soulever de nombreuses questions.

Openai (1)© Photo Agency / Shutterstock.com Tant de dépenses, si peu de revenus

Car, on le sait désormais, faire tourner l’intelligence artificielle à grande échelle coûte une fortune. Derrière les chiffres mirobolants des valorisations, se cachent des dépenses massives en infrastructures, énergie et matériel informatique. Les géants du secteur investissent des milliards dans des centres de données, des GPU toujours plus puissants, des systèmes de refroidissement et d’alimentation électrique capables de soutenir ces monstres de calcul.

Selon le cabinet McKinsey, le monde pourrait devoir engager près de 6 700 milliards de dollars d’ici à 2030 pour répondre à la seule demande en puissance de calcul liée à l’IA. Son exploitation au quotidien consomme d’énormes quantités d’électricité, de bande passante et de maintenance humaine. À cela s’ajoutent les coûts liés aux données, à la recherche et à la main-d’œuvre hautement qualifiée.

Mais pour quel résultat ? L’IA s’est sans aucun doute immiscée dans notre quotidien, et ses promesses sont immenses. Cependant, force est de constater que pour l’heure, la transformation positive tant vendue par les géants de la tech ne s’est pas concrètement matérialisée. Et les résultats économiques ne suivent pas, malgré l’intégration de la technologie à tous les niveaux des produits numériques. Si les entreprises obtiennent des revenus grâce à leurs produits, ceux-ci ne leur permettent absolument pas de compenser leurs dépenses. L’IA n’est pas rentable.

Openai Samsung Puces Memoires© Anggalih Prasetya / Shutterstock.com De la bouillie

Pire encore, de nouveaux obstacles surviennent. Depuis des années, OpenAI, Anthropic ou Google ont la conviction que plus on alimente un modèle avec de la puissance de calcul, des données et des paramètres, plus il devient intelligent. Selon cette logique, il suffirait de continuer à grossir les machines pour atteindre, tôt ou tard, l’intelligence artificielle générale, le Graal tant vanté par les acteurs du secteur.

Mais cette équation commence à montrer ses limites. Malgré des investissements pharaoniques, les progrès se tassent et les retombées peinent à suivre le battage médiatique. L’exemple le plus frappant reste GPT-5, présenté pendant des mois comme une avancée majeure, mais accueilli avec des réactions mitigées lors de sa sortie en août.

Sans parler du phénomène désormais reconnu de « bouillie d’IA » : le travail généré par IA dans les entreprises serait moins qualitatif et ferait finalement perdre des millions de dollars annuels pour la perte de productivité engendrée.

Sam Altman Openai Chatgpt© Photo Agency / Shutterstock.com Déjà des doutes ?

De quoi faire durcir le ton de certains experts. Le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque d’Angleterre ont tous deux mis en garde, début octobre, contre les risques d’un krach boursier lié à la frénésie autour de l’intelligence artificielle.

Le scénario d’une bulle spéculative, évoquée depuis maintenant deux ans, se dessine concrètement : des valorisations qui s’envolent, portées par l’espoir d’un avenir radieux, avant un retour brutal à la réalité lorsque les profits ne suivent pas. Même Sam Altman, patron d’OpenAI et figure de cette ruée vers l’or numérique, le reconnaît : « Oui, les investisseurs sont surexcités. Mais l’IA reste, à mes yeux, la chose la plus importante qui soit arrivée depuis très longtemps ».

Cette semaine, la situation de Microsoft et de Meta a parfaitement illustré la fébrilité actuelle. Google, Meta et Microsoft ont dépensé à eux seuls près de 80 milliards de dollars en un trimestre pour leurs infrastructures d’IA, une somme historique, qui n’a pourtant pas eu le même effet sur les marchés.

Les investisseurs ont salué la firme de Mountain View, faisant grimper le cours de son action de 3 %. À l’inverse, Meta s’est effondrée de 12,6 %, soit près de 240 milliards de dollars envolés, après l’annonce d’un plan d’investissement massif pouvant dépasser 100 milliards de dollars en 2025. Microsoft, pourtant solide financièrement, a également vu son action reculer après avoir révélé 35 milliards de dollars de dépenses trimestrielles, soit +74 % sur un an.

Concrètement, les investisseurs commencent à douter que cette course effrénée à la puissance puisse encore se justifier, tant que les bénéfices de l’IA restent hypothétiques.

  • Les investissements dans l’intelligence artificielle atteignent des sommets, mais les profits ne suivent toujours pas.
  • Les coûts d’infrastructure, d’énergie et de recherche explosent, tandis que les progrès techniques commencent à stagner.
  • De plus en plus d’experts redoutent désormais que cette frénésie ne cache une bulle prête à éclater.

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