Par

Zoe Hondt

Publié le

2 nov. 2025 à 18h20

Lundi 27 octobre 2025, un homme de 33 ans a été jugé au tribunal de Lille (Nord) pour violences, rébellion et outrages à l’encontre de fonctionnaires de police. Les faits se déroulent quelques jours plus tôt, le 22 octobre, près de la gare Lille-Flandres : sans-abri, il se voit retirer sa tente par un agent municipal. Mécontent, il dégrade le véhicule de ce dernier avant d’être rattrapé par les forces de l’ordre. Six policiers ont porté plainte et se sont constitués parties civiles. Le prévenu dénonce des violences policières. Détails.

Une interpellation d’une rare violence

Le 22 octobre vers 12 h 30, près de la gare Lille-Flandres, deux tentes appartenant à des sans-abri sont délogées par un agent municipal. L’un des concernés demande de l’aide aux policiers du SISTC, brigade régulière qu’il connaît bien et avec laquelle il n’a jamais eu de problème. L’agent lui affirme qu’il n’était pas au courant de cette opération, qu’il peut récupérer une nouvelle tente auprès de la mairie et également porter plainte si des effets personnels se trouvaient à l’intérieur. Une réponse pas assez satisfaisante, qui pousse le sans-abri à faire justice lui-même. Il jette une pierre sur le véhicule municipal avant de prendre la fuite en courant. Il est rattrapé par les policiers qui procèdent à l’interpellation tant bien que mal. « Je ne l’ai jamais vu dans cet état d’excitation extrême », affirme l’un d’eux au tribunal.

Jusqu’au commissariat, c’est un « déchaînement de violences » : insultes, crachats, coups de pied, morsure, coups de poing et menaces de mort envers les policiers. Le prévenu est également retrouvé avec « la lèvre inférieure totalement tuméfiée, du sang séché, l’arcade gonflée et le tee-shirt déchiré ». Au total, il a fallu pas moins de six policiers pour maîtriser l’homme. Constitués parties civiles, ils témoignent au tribunal : « Son état d’énervement était très avancé, il se frappait la tête au sol, contre la vitre de la voiture. On a dû lui menotter les mains et les pieds car il sautait comme un diable. Les coups allaient dans tous les sens, on a maintenu sa tête contre le siège avec le genou. »

Dans le box des prévenus, l’homme a dû mal à se concentrer. Il explique souffrir d’épilepsie depuis la naissance. Ce serait d’ailleurs ce qu’il s’est passé : « Je ne suis pas conscient quand je fais une crise, je fais des gestes anormaux. Je les ai prévenus mais ils m’ont tabassé. » Il nie avoir agressé les forces de l’ordre, ce n’était que de la légitime défense selon lui. Les victimes penchent plutôt pour de « la simulation ». Au tribunal, se remémorer les faits énerve le prévenu et son humeur change brutalement. Il profère des menaces de mort envers les parties civiles et demande à retourner dans les geôles. Il revient quelques minutes plus tard, plus calme, avant de se révolter une seconde fois vingt minutes après. Le prévenu de 33 ans arrache le micro et crache en direction des victimes. La présidente l’expulse pour le reste de l’audience.

« Il n’existe pas sauf pour la justice »

Pour l’avocat des policiers, le comportement du prévenu est « extrêmement choquant » et surtout « inacceptable ». Il plaide des conditions de travail « de plus en plus compliquées » malgré une « habitude à être confronté à la violence ». L’avocat rappellent qu’ils « ne faisaient que leur travail » et affirme : « L’autorité est bafouée. C’est devenu un métier à risque, ils en prennent plein la gueule émotionnellement. » Il demande 1 000 euros de dommages et intérêts pour chacun.

L’avocate du prévenu demande au tribunal « de faire la part des choses » et de « cerner l’humain ». Elle défend : « Sans-abri depuis six ans suite au décès de ses parents, il n’existe pas sauf pour la justice. Il est totalement fracassé ! Il ne peut compter que sur lui-même alors il détruit tout ce qui l’approche. Lorsqu’il a un trop plein émotionnel, c’est l’explosion. » Elle soutient qu’un « parcours de vie est encore possible ».

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La procureure évoque une affaire « particulièrement désespérante » au regard de la cause de l’interpellation. Si elle se dit touchée par la situation du prévenu, elle rapporte tout de même une « intervention démesurée » malgré un « choc émotif fort ». Selon elle, « il faut évidemment faire usage de la force » : aucun état de santé ne peut justifier les actes et il ne s’agissait pas de légitime défense. La procureure requiert 18 mois d’emprisonnement avec mandat de dépôt et la révocation d’un précédent sursis à hauteur de quatre mois. L’homme de 33 ans est finalement condamné à huit mois d’emprisonnement. Le précédent sursis est révoqué.

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