L’Europe peut être de temps en temps magique. Avec beaucoup d’obstination et l’aide technique précieuse de l’agence spatiale de la commission européenne EUSPA, le commissaire en charge de la défense et de l’espace Andrius Kubilius, a réussi le pari crucial sur le plan stratégique de mettre en service le programme européen GovSatcom (Governmental Satellite Communications), certainement d’ici la fin de la l’année, pour le compte des 27 pays européens, selon des sources concordantes. Voire début 2026 si les derniers tests grandeur nature, actuellement en cours, de GovSatcom exigent de nouveaux ajustements. Ce programme vient d’obtenir la validation du Conseil européen d’accréditation de sécurité pour le spatial (Security Accreditation Board – SAB), selon nos informations (1).
Un service gratuit
Sous-estimé jusqu’ici, ce programme européen va notamment pouvoir rivaliser en Europe, et peut-être bientôt en Ukraine, avec Starlink, l’ogre américain contrôlé par SpaceX (Elon Musk), qui a déstabilisé tout l’écosystème spatial européen. GovSatcom est un programme de mutualisation (pooling and sharing) de capacités de communications satellitaires sécurisées provenant de satellites géostationnaires militaires et gouvernementaux.
Cinq pays, notamment l’Espagne (avec les deux satellites SpainSat NG ayant des capacités hors normes reliant plusieurs zones géographiques en même temps) et le Luxembourg, mais aussi, à des degrés moindres, la France (Syracuse), la Grèce et l’Italie (Sicral), vont fournir de la capacité qui sera achetée par EUSPA. Puis, ces capacités fournies par une petite dizaine de satellites seront offertes gratuitement aux 27 pays européens, qui en auront besoin. Les pays de l’Union européenne pourront proposer d’autres satellites.
Le budget de développement de ce programme européen ainsi que sa mise en service est modeste de l’ordre 150 millions d’euros. Sous la maîtrise d’ouvrage d’EUSPA, l’entreprise espagnole GMV a obtenu en septembre 2024 un contrat de 107 millions d’euros pour développer la plateforme (hub), qui relie le pool de fournisseurs de capacités aux utilisateurs gouvernementaux.
GovSatcom fait mieux que Starlink
Plus de la moitié des pays de l’Union européenne (UE) ont déjà exprimé un intérêt pour GovSatcom, notamment les pays scandinaves, baltes et ceux qui sont voisins de la Russie comme la Pologne ou la Roumanie. Pourquoi un tel intérêt ? Non seulement le service est gratuit mais il est surtout sécurisé contrairement à Starlink, précise-t-on. En outre, les satellites géostationnaires proposés à Govsatcom sont aussi performants que ceux de Starlink pour obtenir une communication 100% fiable. Seul bémol, le temps de latence mais très largement compensé par l’offre de communications sécurisées. « GovSatcom, tel qu’il est aujourd’hui en fédérant les capacités existantes en Europe, remplit tous les besoins des 27 États européens pour plusieurs années, jusqu’à l’arrivée d’IRIS² », explique-t-on à La Tribune. 
C’est pour cela que la Commission européenne a proposé au Conseil d’autoriser l’ouverture de négociations avec l’Ukraine en vue de sa participation à GovSatcom ainsi qu’au programme IRIS². La participation de l’Ukraine sera confirmée à la conclusion d’un accord international établi conformément à l’article 218 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Selon Andrius Kubilius, « la participation de l’Ukraine renforcera les capacités spatiales sécurisées de l’Europe à un moment décisif. C’est une étape déterminante vers une Europe plus forte et plus unie, capable de protéger ses citoyens, sur Terre comme dans l’espace ».
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(1) Le Conseil d’accréditation de sécurité (SAB) joue un rôle central en tant qu’autorité d’accréditation de sécurité pour l’ensemble du programme spatial de l’UE et toutes ses composantes (Copernicus, Galileo, IRIS, SSA)