La future ligne à grande vitesse (LGV) entre Bordeaux et Toulouse se rapproche de la réalité, malgré des oppositions encore présentes. Maintes fois reportée, puis annulée, et à nouveau devenue prioritaire, cette ligne doit rapprocher les Toulousains à un peu plus de trois heures de Paris en 2032. «Pour l’instant nous sommes à 10-0», se réjouit Guy Kauffmann après le rejet par la cour administrative, jeudi 30 septembre, d’un dernier recours. Pourtant, le directeur général de la Société du grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (SGPSO) n’oublie pas l’exemple de l’A69 : un recours peut tout bloquer.


«Il existe trois types d’opposition, explique-t-il. Ceux qui ne veulent pas que le train passe près de chez eux, essentiellement dans le sud de la Gironde ; les défenseurs de l’environnement et des espèces menacées, qui sont plus dans une logique de compensation, mais nous y avons répondu ; enfin, les activistes qui s’opposent par principe, et notamment ceux de l’A69, qui migrent au nord de Toulouse.» 


Toile de fond de ces contestations, l’impact négatif sur l’environnement d’un tel chantier – artificialisation des sols et émissions de gaz à effet de serre des travaux – est largement compensé par le report modal envisagé de l’avion vers le train, assure la SGPSO. Qui garantit que tout sera compensé largement. Un récent sondage réalisé par Odoxa pour le compte de la SGPSO, contesté par les anti-TGV, estime que 87% des habitants du sud-ouest sont favorable au projet


Une augmentation de la participation de l’Europe attendue


Ainsi le projet suit son cours. Un appel d’offre a été lancé par SNCF Réseau pour le BTP et l’ingénierie sur l’axe Bordeaux-Toulouse. Il comprend les ouvrages d’art, les voies, les caténaires, mais pas la signalisation qui bénéficiera d’un marché à part. Son résultat devrait être connu en 2027 pour une fin des travaux en 2032.


2,5 milliards d’euros ont déjà été engagés dans des conventions de financement signées entre la SGPSO-Etat et la SNCF, avec une parité SGPSO-Etat. La part engagée par la SGPSO, composée de 24 collectivités territoriales du Sud-Ouest, provient des contributions de ses membres, de la fiscalité et des emprunts qui lui permettent de lisser le financement sur 40 ans. Un premier emprunt de 50 millions d’euros contracté par la SGPSO auprès de la Banque des territoires a été signé jeudi 9 octobre pour accélérer les aménagements ferroviaires au Sud de Bordeaux (AFSB) et au Nord de Toulouse (AFNT). Le même jour étaient approuvés les programmes de trois nouvelles gares à Agen, Montauban et Mont-de-Marsan, ainsi que les modalités de leur intégration dans les marchés de conception-réalisation qui devraient être lancés au printemps 2026.


Le coût total du projet, estimé à 14,2 milliards d’euros – 18 selon ses opposants – doit être pris en charge à 40% par l’Etat, 40% par les collectivités et 20% par l’Europe. En période de disette de l’Etat, la SGPSO compte sur le fléchage de la manne financière autoroutière vers le ferroviaire à partir de 2028, comme prévu dans le rapport Ambition Transport 2030. Elle est évaluée entre 2,5 et 4 milliards d’euros, selon les calculs de Bercy.


La société espère par ailleurs voir l’Europe augmenter sa participation. Signe encourageant : le 15 octobre, le nouveau coordinateur européen François Bausch, a annoncé le doublement du budget du Mécanisme pour l’Interconnexion (MIE) en Europe, passé de 25,8 milliards à 51,5 milliards d’euros pour la période 2028-2034. Celui-ci a aussi réaffirmé la priorité de connecter Lisbonne, Madrid et Paris en grande vitesse dans les meilleurs délais. Pour cela, les maillons manquants des projets transfrontaliers, dont la Ligne Nouvelle du Sud-Ouest, sont essentiels. La SGPSO milite ainsi pour relier Bordeaux à Dax dès 2034, contre 2037 prévu actuellement.


Un projet alternatif irréalisable 


Face au projet alternatif, présenté en 2012 et beaucoup moins coûteux (environ 5 milliards d’euros), qui permettait de faire passer le TGV sur la voie existante avec un gain de 30 minutes, la SGPSO rétorque qu’il nécessiterait d’interrompre la circulation des trains entre Bordeaux et Toulouse pendant les travaux, et qu’il y aurait un problème de capacité et de circulation entre le fret, les TGV et les TER. La création d’une nouvelle voie pour la grande vitesse doublera au contraire la capacité et permettra de faire circuler davantage de trains de fret, de TER et de trains d’équilibre du territoire (TET) entre Bordeaux et Marseille sur le tracé actuel.