L’académie de Strasbourg préfère-t-elle remplacer ses postes vacants par des contractuels plutôt que de piocher dans la « liste complémentaire » des candidats au concours de professeur des écoles ? C’est l’injustice dont estime être victime Vanessa Koehler. La Strasbourgeoise de 25 ans a entamé, le mardi 28 octobre, une grève de la faim pour protester contre « l’inhumanité » de la liste complémentaire, qui plonge chaque année de nombreux aspirants professeurs dans l’incertitude et la précarité. Depuis, elle est devant le rectorat « tous les jours de 7 h 30 à 18 h 30, dans l’espoir d’être reçue par le recteur », afin de pouvoir plaider sa cause.

En 11e position sur liste d’attente à l’issue du concours de professeur des écoles en juillet dernier, Vanessa Koehler attendait qu’on poste se libère pour pouvoir exercer le métier de ses rêves. Las, seuls neuf candidats ont été appelés cet été par l’académie de Strasbourg pour occuper des postes vacants. Vanessa Koehler est à présent deuxième et se retrouve bloquée : « Je ne peux pas prendre de travail, car je dois rester disponible au cas où un poste se libère », témoigne-t-elle ce lundi 3 octobre, affaiblie par ses six jours de grève de la faim qui l’ont déjà fait passer de « 57 kg à 52,5 kg ».

Elan de sympathie

Malgré son état de santé chaque jour plus faible, elle prenait le temps d’échanger, encore ce lundi, sur les réseaux sociaux avec d’autres candidats sur liste d’attente, qui témoignaient de leur désarroi : « Certains ont dû retourner vivre chez leurs parents, d’autres chez des amis, ils sont vraiment mal. » La jeune femme suscite une vague de sympathie plus largement dans la profession, car elle fait de son combat une question de principe : « A quoi cela sert de faire des listes complémentaires si c’est pour prendre des contractuels ? À part faire souffrir les gens ? »

Le rectorat lui a bien proposé un poste, mais en tant que contractuelle. Or, après cinq années d’études et un concours réussi, elle s’insurge contre cette pratique et veut par son action défendre ses collègues sur liste d’attente.

« Il manque des profs partout »

« À Besançon, tous ceux qui sont sur liste complémentaire ont été appelés. L’Alsace fait partie des trois académies, avec Marseille et Reims, qui vont chercher du précaire et du peu formé », accuse Gérard Lenfant, président national du syndicat (non représentatif) Snapen, qui a pris le dossier de la Strasbourgeoise en main au regard de l’urgence de sa situation et de son caractère emblématique. « Il manque des profs partout ! Ça veut dire que le calibrage de départ n’est jamais suffisant… » estime le syndicaliste.

La gréviste de la faim a été reçue ce lundi à 19 h par le recteur, qui a tenté de la convaincre de cesser son mouvement. « Le recteur était navré de ce qu’il se passe. Mais il a certifié qu’il n’y avait pas de poste de libre pour le moment. Il lui a proposé un emploi de contractuelle à l’année, que ce soit dans l’administratif ou dans l’enseignement, en attendant. Mais elle a refusé sa proposition », relate Jean-Pierre Gavrilovic, président du Snalc Alsace. Le syndicaliste est inquiet : « On ne peut pas laisser cette personne continuer à faire grève, elle est dans un état très faible. »