BERTRAND GUAY / AFP
« La maison vide » de Laurent Mauvignier, prix Goncourt 2025.
LITTÉRATURE – Ce n’est pas la peine de poser de RTT, mais le lauréat du dernier Goncourt risque bien d’occuper beaucoup des journées de vos prochaines vacances. Et pour cause, La Maison vide, roman de Laurent Mauvignier récompensé de la plus prestigieuse des récompenses littéraires ce mardi 4 novembre, compte 752 pages.
Son histoire à cheval sur plus d’un siècle et demi, c’est celle d’abord d’un souvenir de son auteur quand, à l’âge de 9 ans, il fait la redécouverte d’un lieu : la maison de ses ancêtres, une vieille bâtisse peuplée de trésors en tous genres, dont de vieilles photos découpées et de lacunaires documents d’identité.
Une matière inépuisable dont l’écrivain de 58 ans s’est servi pour bâtir cette saga faite des joies et (surtout) des peines d’une famille corsetée par les traditions, mais aussi frappée de plein fouet par les deux guerres mondiales. Un récit proche de celui « de millions de Français avec ses zones d’ombre et ses parts plus glorieuses », dit-il à l’AFP.
1 403 pages
Dans son pavé, lui s’interroge. Pourquoi cette « forteresse de silence » autour de Marguerite, la grand-mère du romancier née en 1913 ? Que cache le destin de Marie-Ernestine, jeune fille dont les rêves de monter à Paris pour vivre de sa passion pour le piano ont été mis à mal par son union forcée avec Jules ?
De par son nombre de pages, La Maison vide peut dissuader, grand comme lecteur occasionnel. Et il est un cas rare dans l’histoire du Prix Goncourt : le livre de Laurent Mauvignier est le deuxième plus long Goncourt depuis la première édition du prix, en 1903, ex æquo avec Rabevel ou le mal des ardents, qui valut à Lucien Fabre le trophée en 1923.
La première place du classement n’a pas changé depuis 2006, année du sacre de l’écrivain franco-américain Jonathan Littell pour Les Bienveillantes, dont les 1 403 pages n’ont pas impacté son succès en librairie. Les mémoires en sept parties de Maximilien Aue, un officier SS fictif pendant la Shoah, s’étaient écoulées à plus de 700 000 exemplaires, un an après sa sortie.
Un roman « fondamental »
Sur la troisième marche du podium, on trouve Les Grandes Familles, premier volet en 747 pages d’une suite romanesque de Maurice Druon, Goncourt 1948. On est loin des 86 pages de Dingley, l’illustre écrivain, qui, en 1906, a fait bondir la cote de popularité des frères Tharaud, ex-stars de la littérature aujourd’hui très contestés pour leur vision coloniale antisémite.
Sacré dès le premier tour avec six voix, Laurent Mauvignier a eu du mal à dissimuler sa joie à l’annonce de son nom au balcon du Drouant, à Paris. « On est dans le salut à un auteur qui a une œuvre déjà très importante derrière lui et qui, cette année, nous a livré non pas une somme, mais un roman quand même fondamental », a commenté le président du jury, Philippe Claudel.
Parmi les romans les plus vendus depuis le début de la rentrée littéraire, La Maison vide pourrait voir ses ventes se démultiplier grâce au bandeau rouge apposé sur sa couverture, comme en ont bénéficié bien des lauréats, qui ont parfois dépassé les 500 000 exemplaires vendus. Car oui, quand on aime, on ne compte pas. Y compris les pages.