Après huit mois de tensions exacerbées par de multiples différends, de la question migratoire à l’affaire Boualem Sansal, écrivain franco-algérien emprisonné à Alger, ponctuées par la polémique sur la reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sahara [occidental] par la France, les présidents français, Emmanuel Macron, et algérien, Abdelmadjid Tebboune, se sont engagés à relancer “la relation bilatérale dans un souci d’efficacité et de résultats”, selon un communiqué conjoint des présidences française et algérienne publié le 31 mars.
Ce dégel diplomatique, officialisé lors d’un échange téléphonique entre les deux chefs d’État à l’occasion de la fête de l’Aïd, se traduit par un “programme de travail ambitieux”.
Dès le 6 avril, la visite du ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, à Alger permettra d’entamer des discussions sur des dossiers cruciaux, notamment la coopération sécuritaire, judiciaire, économique, et le redémarrage du travail de mémoire initié par la Déclaration d’Alger d’août 2022.
Ce dernier point revêt une importance particulière, puisque la commission mixte franco-algérienne, qui devait œuvrer à la réconciliation mémorielle, avait été interrompue par les tensions diplomatiques.
“Les cartes étaient quelque peu brouillées”
“Dans la perspective algérienne, il ne s’agissait pas tant d’une crise contre la France que d’une crise contre l’extrême droite française”, assure Anas Abdoun, analyste géopolitique spécialiste du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. Pour cet expert, il s’agissait plutôt d’une opposition au ministre français de l’Intérieur, Bruno Retailleau, et au pan de la scène politique française qu’il représente. “Ainsi, avec la succession de crises, il y avait presque une perte d’objectifs : on ne savait pas vraiment ce que voulaient les belligérants”, note Abdoun.
D’un côté, “la présidence française souhaitait une réconciliation et le rétablissement de relations apaisées”. De l’autre, le ministère de l’Intérieur était “engagé dans une campagne électorale visant à chauffer l’opinion publique sur la question des OQTF [obligation de quitter le territoire français] et de la gestion de la mémoire”, analyse Abdoun.
Pour Alger, cette succession de crises a fini par flouter “sa vision des objectifs stratégiques”. S’agissait-il “de garantir la souveraineté de la justice concernant l’affaire Boualem Sansal ? De se repositionner diplomatiquement vis-à-vis du Sahara et de la reconnaissance française ? Ou simplement d’accepte