Par

Emilien Jacques

Publié le

6 nov. 2025 à 6h48

C’est un projet de vie remis en question avant même qu’il ne débute. Au printemps dernier, Julien et Sonia, deux habitants de Buchy, près de Rouen (Seine-Maritime), achètent un terrain à proximité de la commune. La parcelle sur laquelle devait s’élever la future maison du couple et de leurs enfants se révèle, dès le premier jour des travaux, inconstructible.
La faute à l’épave de véhicule et les nombreux autres déchets découverts enfouis dans le sol. Quatre mois plus tard, la justice ne s’est pas encore emparée du dossier, les déchets sont toujours sur le terrain, et la famille risque de se retrouver à la rue.

Une découverte invraisemblable

Dans le Hameau d’Écalles, à quelques kilomètres de Buchy, une parcelle de 1 200 mètres carrés séduit Julien et Sonia. Appartenant à une mère de famille et ses cinq enfants, le terrain leur est cédé en mai dernier.

« Ce ne sont pas des gens qui nous sont inconnus. On les connaît de vue », rapporte Julien. En effet, il croise régulièrement un des vendeurs dans Buchy, tandis qu’une « des sœurs est une ancienne collègue de ma femme », indique-t-il. La mère de cette famille vit même dans la maison voisine au terrain. Rien ne semblait donc à craindre pour Julien et Sonia en faisant l’acquisition de ce terrain. Et pourtant.

Pour continuer les travaux de construction, une évacuation des déchets et une dépollution du terrain sont nécessaires.
Le couple accuse les vendeurs de leur avoir cédé le terrain en sachant ce qui y était enfoui. ©Emilien Jacques

Le 3 juin, les travaux commencent. « Le jour même, le constructeur m’appelle en me disant qu’il y a un problème », se rappelle Julien, qui se rend immédiatement sur place. Il est sans voix devant la scène à laquelle il assiste. Dans un trou d’environ deux mètres de profondeur, les ouvriers sont tombés sur ce qui ressemble à une véritable décharge.

« Ils ont découvert un véhicule, un fût d’huile, des batteries, des vêtements, de l’amiante… », décrit-il. « Ma femme était sous le choc, et moi, il m’a fallu quelque temps pour réaliser. »

« Ils savaient ce qu’il y avait dessous »

Le lendemain, la gendarmerie vient faire des constatations. Passée la stupeur, Julien craint quelque chose de plus grave qu’un simple dépôt sauvage : « Si on veut se débarrasser d’un véhicule, on appelle la casse… », songe-t-il. Rien de suspect n’est constaté par les gendarmes, mais l’un d’eux lui confiera plus tard avoir identifié le véhicule comme appartenant à l’un des vendeurs.

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« Ils savaient que vendre ce terrain aller poser problème, ils savaient ce qu’il y avait dessous », fustige Julien. « Soit ils se moquent de nous, soit ils sont inconscients », poursuit-il.

Les opérations de nettoyage et de dépollution du terrain sont estimés à 50 000 euros.
Les opérations de nettoyage et de dépollution du terrain sont estimées à 50 000 euros. ©Emilien Jacques

Quelques jours plus tard, le constructeur évalue à 50 000 euros l’opération d’évacuation et de dépollution du terrain. Le couple tente de trouver un accord financier avec la famille de vendeurs. Dans un courrier, ces derniers stipulent qu’ils acceptent, « en guise de dédommagement », de régler l’étude des sols demandée par le constructeur, estimée à… 1 500 euros. Et depuis, « plus de son plus d’image », se désole Julien, qui n’a plus d’autre choix que de faire appel à la justice.

Une décision de justice qui se fait attendre

Le couple dépose plainte auprès de la gendarmerie de Buchy, qui émet un avis au parquet de Rouen. Ce sont aux magistrats de décider si les vendeurs doivent être poursuivis ou non, et si oui, pour quels motifs. Les gendarmes sont donc suspendus à cette décision pour commencer l’enquête.

L’un d’entre eux confie : « On a déjà eu des abandons d’épaves, mais là, il y a une victime de cet abandon. Il y a une notion d’abus de confiance ». Avant de poursuivre à propos des mis en cause : « tous les éléments supposent qu’ils étaient au courant, mais il nous faut des éléments de preuves ».

Près de cinq mois plus tard, Julien et Sonia sont toujours dans l’attente d’une décision de justice, et chaque jour qui passe les rapproche du gouffre. Contacté par la rédaction, le parquet confirme avoir été avisé de cette affaire et doit encore décider quelles infractions seront retenues. 

Des conséquences dramatiques

En plus de voir leur rêve de construire leur maison s’éloigner, les conséquences financières de ce qui était inimaginable pour le couple il y a encore quelques mois s’avèrent, en attendant, désastreuses. Ils ont en effet contracté un prêt-relais, et la maison dans laquelle ils vivent actuellement à Buchy et dont ils sont propriétaires devrait être vendue depuis longtemps.

« Je suis obligé de revendre la maison. Elle était censée être vendue dès le début des travaux », explique le père de famille. Le couple et ses quatre enfants, tous âgés de moins de quinze ans, est aujourd’hui dans une impasse et entrevoit le pire.

Si rien ne se passe, on peut clairement finir à la rue.

Julien.

Jamais, en effet, Julien et Sonia n’auraient envisagé que cet incident entraîne une procédure aussi longue : « Quand c’est arrivé, on pensait que ça irait vite, même si on sait que notre affaire n’est pas considérée comme urgente… », déplore Julien. La famille tente aujourd’hui d’alerter sur sa situation : « Il faut que ça bouge. Si rien ne se passe, on peut clairement finir à la rue. Financièrement, on n’aura plus rien. »

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