Le collectif d’extrême gauche « Strasbourg, c’est nous » a dévoilé vendredi 7 novembre sa tête de liste pour les élections municipales de 2026. À 29 ans, Cem Yoldas, éducateur, porte-parole de la Jeune garde antifasciste, promet une ville féministe, antiraciste et solidaire, rompant avec les partis traditionnels.
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Eva Chibane
Publié le 8 novembre 2025 ·
Imprimé le 8 novembre 2025 à 10h57 ·
3 minutes
Dans une arrière-salle du café Libro, l’estrade est modeste. Costume bien ajusté, ton posé, Cem Yoldas, porte-parole de la Jeune garde antifasciste s’adresse à la salle :
« Nous sommes la seule liste de gauche de rupture avec le programme de Jeanne Barseghian. Nous voulons incarner une ville féministe, antifasciste, antiraciste, capable d’être un bastion contre l’extrême droite. »
Une annonce qui marque le retour sur la scène politique locale d’une partie des militants de la Jeune garde, dissoute par décret gouvernemental en juin 2025. Le collectif, qui se revendique antifasciste et ancré dans les luttes sociales, avait dénoncé une décision politique « injuste » visant à criminaliser l’antifascisme. Un recours a été déposé devant le Conseil d’État. Depuis, ses anciens militants ont poursuivi leurs engagements locaux, notamment dans les quartiers populaires.
Cem Yoldas, l’un de ses visages les plus connus de l’antifascisme à Strasbourg, prend désormais la tête du projet « Strasbourg, c’est nous ». Un collectif qui s’est structuré en mars 2025. Au départ, plusieurs forces militantes — dont l’Union pour la reconstruction communiste, le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), la Yeni Demokratik Gençlik et le collectif D’ailleurs nous sommes d’ici — se sont réunies pour aider des habitants des quartiers populaires à se réinscrire sur les listes électorales. Rapidement, l’idée d’un projet municipal plus large a émergé, centré sur la lutte contre la précarité, l’accès au logement pour tous, les services publics et une « écologie populaire ».
Transports, logement et alimentation
Vendredi 7 novembre, le candidat présente les grandes lignes d’un programme qui sera détaillé dans les semaines à venir. En cas de victoire en mars 2026, les transports seront gratuits pour tous. Les cantines municipales accessibles à tous ou à l’euro symbolique. Et dans les quartiers, des épiceries solidaires doivent se multiplier. Éducateur en prévention au Neuhof, il s’appuie sur le terrain et le quotidien des jeunes :
« Aujourd’hui, on fait face à une crise de l’alimentation. Dans les quartiers, les jeunes sont très exposés à des produits industriels, l’obésité est présente. »
Le soutien aux associations, en particulier féministes, et l’appui aux mobilisations sociales sont au centre de son projet. Dans le logement, Cem Yoldas promet un « plan d’urgence social » : lutte contre Airbnb, plafonnement des loyers, baisse de ceux des bailleurs municipaux. Sur la sécurité, son programme prévoit le désarmement de la police municipale, qu’il juge incompatible avec une politique de proximité.
Rompre avec des logiques racistes
« Nous ne voulons pas laisser l’extrême droite dicter les thèmes de campagne », insiste-t-il. Il cite Virginie Joron, candidate RN aux élections municipales (lire notre article), qui l’accuse de « communautarisme » : « C’est le reflet du racisme de l’extrême droite », tranche-t-il. Mais il dénonce aussi des « réflexes » persistants à gauche, qui continuent selon lui d’exclure une partie de la population. Il insiste :
« Je suis la seule tête de liste issue de l’immigration extra-européenne. Très souvent, on fait face à des réticences : “il n’est pas propre sur lui, il n’est pas présentable”. Nous voulons rompre avec ces logiques racistes. »
Cem Yoldas se positionne également sur le droit de vote pour les étrangers :
« Ce sont les oubliés de la gauche. Et moi, je veux que les étrangers vivant à Strasbourg puissent participer à la vie politique locale. Aujourd’hui, je suis entouré de gens qui veulent s’engager mais ne pourront pas être sur la liste car ils sont extra-européens. »
Vers le premier meeting avec Philippe Poutou
Pour Cem Yoldas, sa formation incarne « la seule force de gauche qui n’est pas portée par des professionnels de la politique ». Il considère le mouvement comme un « outsider ». « Aujourd’hui, la municipalité méprise l’espoir. Et Jeanne Barseghian a fauté », affirme-t-il, citant par exemple sa gestion du cas Hervé Polesi ou « le jumelage de la honte avec Ramat Gan », ville israélienne jumelée à Strasbourg. Pour lui, l’élection du nouveau maire à New York est la preuve que l’avenir est à une gauche « populaire ».
Avant de finaliser alliances et liste, Cem Yoldas souhaite dialoguer avec d’autres forces politiques et associatives. Le 8 décembre, il tiendra son premier meeting à la Maison des associations, en présence de Philippe Poutou.