Bien huilée, la machine de haine et de racisme n’aura pas mis longtemps avant de s’emballer. Quelques heures seulement après avoir officialisé sa candidature pour la mairie de Bordeaux, lundi 3 novembre, Nordine Raymond, candidat la France insoumise (LFI), a vu déferler une vague de cyberharcèlement sur ses réseaux sociaux. Au fil des jours, les centaines de messages se sont transformées en milliers de commentaires nauséabonds, certains contenant des menaces de mort. Sur ces derniers, une plainte devrait être déposée dans les prochains jours.
«Pourquoi il a un prénom de bougnoule et un nom français ?», «Je croyais que c’était un nom parodique à la Jean Mouloud», «Nordine Raymond, c’est une blague ?» peut-on lire sous un tweet où le cuisinier de 34 ans, ancien patron d’un restaurant-bar, s’affiche tout sourire pour lancer sa campagne. Plusieurs comptes reliés à des messages racistes et des insultes ont été identifiés par son équipe comme appartenant à des militants d’extrême droite.
«Je dois avouer que j’ai été surpris par l’ampleur. C’est complètement dingue, ça en dit long sur l’atmosphère du moment. La société se tend et la libération de la parole raciste se poursuit», se désole le Girondin auprès de Libération. Quelques semaines plus tôt, c’est un autre candidat aux municipales bordelaises, Karfa Diallo, élu écologiste au conseil régional et fondateur de l’association Mémoires et partage, qui annonçait mi-octobre jeter l’éponge pour des questions d’organisation… mais aussi face à la multiplication d’attaques racistes à son encontre.
Ce qui «dérange les gens, c’est très certainement l’alliance d’un prénom arabe à un nom français», présume Nordine Raymond. «S’ils savaient que mon deuxième prénom est Angelo… J’incarne tout ce qu’ils détestent. Je suis le produit de l’amour entre une mère franco-italienne et un homme d’origine maghrébine», déroule le candidat dans une vidéo postée sur Instagram. Dans le même temps, un de ses camarades a lui-même été victime d’une agression antisémite. «Une homme m’a glissé à l’oreille que j’avais “une tête de Juif”», retrace Pierre Benaïm sur son compte X.
«Au début il y a une forme de découragement, de la tristesse mêlée à de la colère. C’est ce qu’ils cherchent, ils veulent nous faire du mal. Puis finalement, ça nous motive, ça donne encore plus de crédibilité à notre combat», analyse Nordine Raymond. Le candidat a quand même dû rassurer sa mère, très affectée : «Elle voudrait que j’arrête.»
La tête de liste insoumise préfère toutefois retenir «l’incroyable soutien» qui a suivi. «Il y a eu les cadres de mon mouvement, évidemment. Mais la réaction des autres partis politiques et du maire, Pierre Hurmic, c’est vrai que ce n’était pas attendu. Ça fait du bien.» A Bordeaux, les jeunes socialistes et le député écologiste Nicolas Thierry ont également dénoncé ces attaques.
Ces messages racistes sont venus électriser l’atmosphère politique déjà tendue dans la cité girondine. La candidate du Parti radical et opposante municipale Nathalie Delattre a annoncé avoir lancé une pétition contre la venue de Rima Hassan, pointant «la montée des actes antisémites et des crispations communautaires». L’eurodéputée LFI est attendue ce ce vendredi 7 novembre pour défendre la candidature de Nordine Raymond. «J’ai assez d’estime pour l’histoire du Parti radical pour ne pas penser qu’elle veuille sincèrement interdire de parole une élue de la République», veut croire le candidat mélenchoniste. Devant une salle qui s’annonce comble, il espère pouvoir lancer sa campagne et enfin parler politique.