La Zone d’expression prioritaire (Zep) élabore ces récits avec des jeunes de 14 à 30 ans, lors d’ateliers d’écriture encadrés par des journalistes. Ces témoignages sont ensuite publiés par des médias. Ouest-France a choisi d’être l’un d’eux. Tous les mois, dans le journal et sur ouest-france.fr, on peut lire ces récits de vie, comme celui d’Ada, 26 ans.

« Depuis ses 3 ans, mon petit frère a grandi dans une famille d’accueil, sous la responsabilité d’une assistante familiale. Mais à ses 16 ans, il a dû quitter ce foyer. L’assistante familiale, ne souhaitant plus le garder, a pris la décision de le laisser partir. Mon frère s’est retrouvé sans cadre familial.

En apprenant cela, j’ai décidé de m’impliquer. Mon objectif était clair : lui offrir un soutien émotionnel, physique et économique. Je voulais être ce repère que personne ne lui avait vraiment offert. Mon premier réflexe a été de demander à ma mère le contact de l’éducatrice en charge de son suivi, sans lui expliquer pourquoi, car je redoutais sa réaction. »

« La sécurité de mon frère était la priorité »

« Avant de passer ce coup de fil, j’étais très anxieuse à l’idée de m’opposer à ma mère. Mais je m’y étais préparée psychologiquement : la sécurité de mon frère était la priorité. Notre échange ayant été froid et fermé, j’ai préféré attendre le jugement pour lui en reparler. Une fois le numéro entre mes mains, j’ai appelé l’éducatrice pour lui faire part de mon souhait d’accueillir mon frère.

J’avais 24 ans à l’époque. Je vivais avec mon conjoint, notre situation financière était stable, et nous occupions une grande maison avec trois chambres — dont l’une n’attendant que d’être occupée.

J’ai donc adressé une lettre au juge des enfants pour déposer ma requête. Peu de temps après, j’ai été convoquée en présentiel. Ma mère aussi était conviée. J’étais mal à l’aise à l’idée de prendre la place qu’elle avait toujours eue, d’endosser ses responsabilités. L’ambiance était pesante, et j’avais de la peine pour elle. Mais je devais faire preuve de détermination pour prouver que j’étais capable de m’occuper de mon frère. Cela a créé une tension et une distance entre ma mère et moi pendant toute la procédure. »

« Créer un lien de filiation que nous n’avions jamais connu »

« J’ai aussi dû affronter des tensions avec l’éducatrice de mon frère, qui ne me prenait pas au sérieux à cause de mon âge. Il a même fallu un rendez-vous avec la juge pour remettre les choses à plat.

Finalement, j’ai obtenu le placement de mon frère, avec une aide financière de 500 € par mois pour subvenir à ses besoins. En revanche, je n’ai reçu aucune aide psychologique – ni avant ni pendant.

Mais pour moi, c’était l’opportunité de créer un lien de filiation que nous n’avions jamais connu jusque-là. Un accueil encadré, avec un idéal de vie en communauté, de partage et de stabilité. »