Rendre l’écologie désirable et engageante pour tous était le thème de votre intervention vendredi à l’événement Ici on agit. Est-ce si simple aujourd’hui de communiquer sur le changement climatique et ses enjeux ?

Mehdy Coly, cofondateur de la holding d’investissement Team for the planet : « Cela dépend de la façon dont on communique. En général, les communications sur l’environnement sont, soit énervées, soit culpabilisantes, soit catastrophistes. Cela se comprend car le sujet est grave et qu’il y a un effondrement environnemental en cours. Cet état de fait a permis à certains de se mettre en action mais pour l’immense majorité des gens, ce constat dramatique ne marche pas du tout, et même, les éloigne des sujets environnementaux. On le voit en ce moment alors que les effets du changement climatique, de l’effondrement de la biodiversité sont plus visibles. L’écologie devient de moins en moins intéressante pour les citoyens dans le monde. »

Ce désintérêt pour les questions climatiques ne vient-il pas du contexte mondial actuel entre tensions géopolitiques et crise économique ?

« Tout est lié. Pourquoi est-ce qu’on a une crise en ce moment, par exemple, sur les droits de douane ? Parce que Trump a été élu. Pourquoi Trump a été élu alors même que les États-Unis subissent de plein fouet les effets du changement climatique ? Parce que le discours sur le climat ne convainc pas. D’un point de vue rationnel, si vraiment on observait la situation de façon abstraite, on se dirait ; comment est-il possible que l’humanité continue comme si de rien n’était alors qu’elle est en train de foncer droit dans le mur ? Mais, si on regarde à l‘échelle individuelle, on comprend pourquoi les gens ne s’y intéressent pas. »

« Il n’y a que les actes qui comptent »

Et donc : pourquoi alors ?

« Parce que c’est décourageant. On se dit, à mon échelle, je ne peux rien faire, c’est culpabilisant. On se dit, j’ai cru qu’il y avait un rêve américain, qu’il y avait un rêve de consommation illimité, que chaque génération vivrait d’une façon encore plus confortable que la génération précédente, et, en fait, non ce n’est pas vrai, en tout cas pas comme ça. Donc c’est très difficile de renoncer. Et puis si on est dans la recherche des bons et des méchants, on ne peut pas arriver à mobiliser. On rejette la faute sur les autres, sur les scientifiques notamment, leur parole est décrédibilisée. Rejeter la faute sur les autres, c’est considérer qu’on ne fait pas partie du problème. »

On en revient alors à changer de récit pour emporter le plus de gens possible dans la transition écologique. Est-ce qu’il existe une issue enthousiasmante ?

« Oui, recréer des imaginaires collectifs. C’est ce qu’on a essayé de faire avec Team for the planet. On s’est dit que si on s’unit, on peut créer des projets qui vont avoir de l’impact à très grande échelle. Les innovations qu’on porte chez nous, si elles deviennent mondiales, elles permettront de baisser les émissions mondiales de CO2 de 1 %. Donc cela peut être énorme ! On a impliqué les citoyens en leur donnant un rôle. Les gens se sont mis à agir positivement. »

Que dire aux personnes qui n’arrivent pas à se mobiliser, à agir pour le climat ? Comment faire pour aller les chercher ?

« Je ne leur dis rien. On ne peut pas obliger quelqu’un à changer. En revanche, ces personnes peuvent être inspirées par un proche et se mettre en mouvement. Mais aller les chercher en disant “faites ça, rejoignez-nous”, ça ne marche pas. Par exemple, cela ne sert à rien de clamer que c’est bien de prendre le vélo. En revanche, en faciliter l’usage, être exemplaire dans son comportement sur la route, oui, ça fonctionne. Il n’y a que les actes qui comptent. Il faut parler moins et faire plus. »