Ironie ou message choc ? La COP 30 s’ouvre lundi à Bélem au Brésil, porte d’entrée sur l’Amazonie, alors que « le poumon de la planète » n’a jamais autant suffoqué. L’annuelle Conférence des parties sur les changements climatiques accueille 50.000 participants chargés d’empêcher l’effondrement de la coopération mondiale sur le climat.
« Il serait plus facile d’organiser la COP dans un pays riche », a déclaré le président du Brésil Luiz Inacio Lula da Silva avant le lancement de cet événement. Selon lui, accueillir ce trentième sommet est une opportunité : « nous voulons que les gens voient la situation réelle des forêts, de nos fleuves, de nos peuples qui y vivent. »
Déforestation de masse
Située en Amérique du Sud, la région accueille 10 % de la biodiversité mondiale est s’impose comme le dernier refuge de plusieurs espèces en voie d’extinction comme le jaguar, le dauphin rose ou l’aigle harpie. Sa forêt, qui joue un rôle essentiel contre le réchauffement climatique par l’absorption de gaz à effet de serre, subit pourtant de plein fouet la déforestation, l’orpaillage, les pollutions, les trafics et exactions en tous genres contre les populations, notamment indigènes.
Selon le Fonds Mondial pour la Nature (WWF) 43 millions d’hectares de forêt ont été perdus au sein des fronts de déforestation dans la région entre 2004 et 2017, l’équivalent de la superficie du Maroc. « L’Amazonie brésilienne a perdu 15,4 % de son couvert forestier », sur cette même période alerte l’ONG. Sur ces fronts, environ 45 % des forêts encore sur pieds ont subi « une certaine forme de fragmentation » ce qui les rend plus sujettes aux incendies. Ce rasement de forêt massif, causé par l’élevage, libère chaque année des millions de tonnes de carbone dans l’atmosphère.
Selon une étude de la revue Nature, jusqu’à 2021 le bassin de l’Amazonie était considéré comme un puits de carbone. Mais en raison de ce déboisement colossal et du changement climatique, la plus grande forêt du monde émet maintenant du gaz à effet de serre, au lieu d’en absorber. Des chercheurs étaient déjà arrivés à cette conclusion. Ils estiment qu’entre 2010 et 2019, l’Amazonie brésilienne a rejeté près de 20 % de CO2 de plus qu’elle n’en a absorbé. D’après Scott Denning, professeur de sciences atmosphériques à l’université du Colorado, ce constat « remet en cause la capacité des forêts tropicales à séquestrer à l’avenir de larges volumes de CO2 dérivé des énergies fossiles ».
Lac à 41 °C
Avec ses 6.700.000 km², l’Amazonie attire par ses ressources naturelles comme l’or ou le pétrole. Mais « les procédés d’extraction minière conduisent à la déforestation, à l’érosion des sols ainsi qu’à la contamination de l’eau », martèle l’organisation. L’orpaillage illégal est aussi l’une des principales causes de l’arrivée du paludisme dans la région, notamment en Guyane.
Plus récemment, une étude publiée jeudi dans la revue Science, menée par des chercheurs du Mamirauá Institute for Sustainable Development au Brésil, pointe un réchauffement extrême des eaux amazoniennes. En 2023 la hausse continue des températures à échelle mondiale a engendré une sécheresse inouïe et une vague de chaleur simultanées en Amazonie. « Cette combinaison a entraîné une forte mortalité chez les poissons et les dauphins de rivière, la température de plusieurs lacs de la région étudiée atteignant des niveaux records, et celle d’un lac entier atteignant 41 °C », affirment les chercheurs.
Un dérèglement qui affecte directement les populations locales. À la suite de cet « épisode extrême de sécheresse et de vague de chaleur, des milliers de personnes vivant dans les communautés riveraines se sont retrouvées isolées et privées d’accès à la nourriture, à l’eau potable et aux médicaments », souligne l’étude.
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Adoptée au Brésil, au sommet de la Terre de Rio de Janeiro, les pays membres de la Convention des Nations unies sur les changements climatiques, négocient depuis trente ans pour renforcer le régime climatique. Cette année, les États-Unis, première économie du monde et deuxième émetteur mondial de gaz à effet de serre, brillent par leur absence au sein de ces discussions. Une première.